Festival de Cannes – 19 mai 2013
Borgman est une curiosité. Le film navigue entre les genres et les univers avec un ton décalé et un humour à froid assez savoureux. Le talent du réalisateur pour composer ses plans ne gâche rien. Ç’aurait été un succès total si le scénario avait un sens, ou même un quelconque intérêt. Les scènes se suivent et ne se ressemblent pas, s’imbriquent à peine les unes dans les autres et, au final, le film ne semble être composé que d’idées pêle-mêle choisies au hasard par le réalisateur.
Comme c’est mon habitude maintenant, je sors du Palais des Festival pour rendre à la salle Debussy pour profiter de la projection de 11h. Toujours à cette heure c’est dans le cadre de la sélection Un certain regard et cette fois ci pour L’Image manquante, un film de Rithy Pan. Il n’y a pas foule pour découvrir le nouveau travail du réalisateur sur le Cambodge oppressé par les khmers rouges.
La particularité du film réside dans ses choix artistiques. En effet, le réalisateur raconte son enfance et cherche en vain une image d’époque à la hauteur de son souvenir, qui retranscrive son traumatisme. Il sait que cette image n’existe pas, ou qu’elle n’existe plus. Pour nous faire partager ses souvenirs, il décide d’utiliser des figurines de terre cuite peintes et des images d’archives. Une voix off vient donner corps aux mots du réalisateur. Plus que le témoignage glaçant, ce qui frappe c’est avec quel talent Rithy Pan crée le mouvement là où il n’y en a pas. On suit un film immobile, hypnotisés par les bruits d’ambiance et cette voix d’homme pendant que se crée dans nos esprits cette fameuse manquante. Un tour de force.
Parce que je suis une flemmarde, parce qu’il y a un peu de projections prévues ce jour là et parce que je veux souffler un peu, je n’ai dans mon planning que 3 films à voir (vous me direz, c’est déjà pas mal). Je saute une nouvelle fois le déjeuner pour me rendre pour la première fois cette année à la salle du soixantième. Cette salle préfabriquée est cachée derrière le Palais des Festival et abrite en général des projections rattrapages pour la presse ou les professionnels. L’année dernière les pluies diluviennes avaient fait s’effondrer une partie de la salle, cette année c’est la climatisation qui fait des siennes en agrémentant chaque projection d’un délicat bruit de moissonneuse batteuse.
Après une grosse heure de queue (je me console en me disant que c’est ensuite fini pour la journée), je me retrouve dans la salle pour Monsoon Shootout, un film indien d’Amit Kumar présenté dans le cadre des séances de minuit.
Monsoon Shoutout est une petite déception. Malgré ses images chocs et une très bonne gestion de la violence (qui nous laisse constamment en alerte), le scénario se révèle convenu, très lourd et même simpliste. Les interprétations des acteurs sont dignes des pires productions bolywoodiennes, c’est à dire pas très subtiles. Finalement, cette respiration, cette découverte d’une nouvelle facette du cinéma indien n’est pas à la hauteur de mes espérances. Mais le film ouvre quand même une porte sur un cinéma alternatif et audacieux… à suivre donc dans les prochaines années.
Il fait beau, je rentre à l’appartement me changer. Je croise une de mes colocataires journaliste et je finis, alors que ce n’était pas prévu, à faire la queue pour je ne sais quel film de la Quinzaine des réalisateurs. Finalement, après de longues minutes d’attente il s’avère évident que nous ne rentrerons pas. Solution de repli, nous voilà dans un espace appelé le Carré Grey Goose où on sert des cocktails à base de vodka. C’est la soirée apéritive du magazine de cinéma Snatch et l’ambiance est parfaite pour ce début de soirée.
J’accompagne mon amie vers le Palais puis je lance un appel à la cantonade pour trouver un compagnon de boisson. Il fait beau et je suis motivée. Ce soir, je vais sortir. Me voilà par hasard, sans carton d’invitation et à coup de tchatche, en plein milieu de la fête officielle du film de Serge Bozon, Tip Top sur la plage Chivas. C’est le monsieur lui-même qui mixe toute la soirée avec ses propres 45 tours ramenés de la maison et je peux vous assurer que cette sélection musicale et la générosité du bonhomme ont largement contribué au succès de l’évènement. Une vodka tonic, deux vodka tonic, trois vodka tonic et une bière Asahi plus tard, je regarde les vagues menacer la solidité des digues installées pour préserver l’endroit des intempéries. Je suis bien entourée, je me sens bien et je ne repars de là que quelques heures plus tard légèrement chancelante mais ravie. C’est une soirée cannoise comme je les aime, impromptue, bien fréquentée et surtout open bar.
Cette année, mon endurance physique m’étonne. Je ne cumule jamais plus de 5 heures de sommeil par nuit et je n’ai pas encore piqué des nuits dans une salle. Je maîtrise, j’aime cette sensation qui me grise. J’ai le beurre et l’argent du beurre, à part du soleil, que demandez de plus ?
Lucile Bellan
A (re)découvrir sur Artistik Rezo :
– Festival de Cannes – 18 mai 2013
– Sélection officielle du festival de Cannes 2013
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