Mémoires d’Opiums – Louvre des Antiquaires
« Mémoires d’Opiums » revient sur l’histoire et les rituels liés à cette drogue tirée du pavot. Elle expose un ensemble d’objets rares ayant servi à l’extraction, la préparation, la conservation et la consommation de l’opium. Paravents sculptés, costumes de hauts dignitaires brodés, pipes recouvertes de laque ou habillées d’écaille, de galuchat ou d’argent, arrêtoir en ivoire sculpté, plaquette en métal ouvragé, boîtes cylindriques en émaux cloisonnés font émerger les réminiscences du monde enfoui des fumeries d’opium… des siècles passés.
Du pavot à l’opium…
Originaire d’Asie Mineure, le pavot est cultivé et consommé en Chine depuis le VIIème siècle. Ses graines servent aux préparations culinaires et ses têtes pour les décoctions médicinales. Il est alors principalement employé pour soulager la douleur et traiter nombre de maladies et d’épidémies. Ce n’est qu’au XVIIème siècle que le pavot commence à être fumé en Chine.
L’interdiction du tabac par le dernier Empereur Ming en 1637 entraine les premières consommations d’opium. Ayant pris l’habitude d’inhaler la fumée, les fumeurs remplacent le tabac à terme par le pavot somnifère, dont la sève est extraite pour obtenir le « chandoo », un opium purifié semi liquide, exclusivement destiné à être fumé. S’immisçant dans les coutumes des élites chinoises dans un premier temps, cette pratique se banalise rapidement. À partir de 1830, des fumeries s’installent un peu partout dans le pays.
Au cours du XIXème siècle, la propagation de l’opium entraîne les pires ravages, atteignant l’ensemble des couches de la société. En 1906, la Chine instaure une politique d’interdiction de l’opium qui s’avère très efficace et a pour conséquence l’extinction des fumeries légales.
En Europe, les voyageurs de retour de Chine et d’Indochine importent l’usage de l’opium et le phénomène ne tarde pas à s’étendre en France. L’opium séduit alors une élite intellectuelle qui contribue à susciter une fascination sur l’imaginaire occidental. Ainsi au tournant des XIXe et XXe siècles, l’opium devient le symbole d’expériences sensorielles inédites et le signe d’appartenance à une élite culturelle.
Dès 1821, Thomas De Quincey, dont les œuvres viennent d’être publiées à la Pléiade, écrit Confessions d’un mangeur d’opium anglais, traduit ensuite par Alfred de Musset puis par Baudelaire et inspirera la Symphonie Fantastique de Berlioz (1830).
D’autres encore parmi les artistes et écrivains reconnus révèlent qu’ils sont des consommateurs réguliers : Mallarmé, Verlaine, ou Théophile Gautier qui, en 1838, s’adonne à une description détaillée dans le conte La pipe d’Opium. Un siècle plus tard, Cocteau apportait sa contribution avec son Journal d’une désintoxication.
Les rituels et ustensiles des « mangeurs de fumée »
Entre recherche esthétique et quête spirituelle, le rituel devait être précis si l’on voulait obtenir un effet optimum et les accessoires devaient faire l’objet d’un soin particulier, car de tous les stupéfiants, l’opium est sans doute celui qui requiert le dispositif le plus sophistiqué.
Une mise en scène particulière était indispensable à l’initiation. L’opium se fumait couché sur une natte ou un lit plus ou moins orné où des panneaux verticaux encadrent la couche de bois ou de bambou tressé. Selon les cas, l’opium et les ustensiles étaient directement approchés sur la « Kang Table », une petite table à quatre pieds, ou sur un plateau sur lequel étaient disposés la pipe et divers petits matériels indispensables au fumeur :
- pour la préparation : lampe, aiguille, ciseaux à mèche, doseur et boîte à opium, pot à laudanum pour l’opium mélangé d’alcool, présentoir à fourneaux …
- pour la consommation : la pipe, le fourneau, le suçon, la plaquette…
- pour le nettoyage : brosses et racloirs…
- parfois pour la récupération : ringard pour curer le tuyau de la pipe et récupérer cette sorte de calamine que l’on appelle le dross, cendrier à opium, boîtes à dross…
Tous ces objets qui font partie d’un art révolu suscitent l’intérêt d’un petit nombre de collectionneurs motivés par la haute qualité artistique plus que par l’objet du « voyage ». Certains choisissent de mettre en comparaison différents types d’un seul et même objet, le plus souvent une unique collection de pipes composée de matières différentes. D’autres optent pour une autre approche consistant à rassembler le plus possible d’objets appartenant à la parfaite panoplie du fumeur d’opium.
En reconstituant l’atmosphère d’une fumerie, « Mémoires d’Opiums » offre un voyage exotique au coeur de l’Empire Céleste et lève le voile sur les mystères qui entourent les volutes bleues de l’opium. Ces objets ont traversé les siècles et les continents et témoignent aujourd’hui de la virtuosité artisanale exercée en Chine au cours du XIXème siècle.
Mémoires d’Opiums
Du 1er septembre au 18 décembre 2011
Du mardi au dimanche, de 11h à 19h
Entrée libre
Louvre des Antiquaires
2, place du Palais Royal
75001 Paris
M° Palais Royal
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