Voyage dans les mémoires d’un fou : un one-man show tragi-comique
Voyage dans les mémoires d’un fou Seul en scène écrit, mis en scène et interprété par Lionel Cécilio Du 2 février au 29 avril 2017 Tarifs : 12€ à 20€ Réservation par tél. au 01 73 54 79 79 Durée : 1h15 Théâtre L’Archipel |
Du 2 février au 29 avril 2017
« Voyages dans les mémoires d’un fou » c’est le drame d’un homme qui semble désespérément seul et en lutte contre une maladie qui « partage son corps ». Déchiré entre la résignation et la lutte il se plonge dans les évènements heureux de son passé tout en nous narrant son quotidien fait de nuits blanches à coucher sur papier ses mémoires. Un récit au présent et au passé mais jamais au futur… Seul à son bureau, éclairé d’une simple bougie, on s’imagine au XIX siècle, l’homme est élégant tout vêtu de noir et pour écrire il trempe sa plume dans un encrier. Le texte est très littéraire et dense, remarquablement bien écrit, c’est au cours de cette rédaction que les images qui animent le narrateur se déploient dans une mise en abyme où la pièce devient légère, drôle comme si l’auteur se départissait enfin de ses contraintes littéraires pour donner libre cours à sa fantaisie. Il se souvient de son enfance où très tôt il a été caractérisé par une insolence, une authenticité qui le distinguait : « On m’y a transmis des règles, j’y ai appris la transgression, le sens critique, le sarcasme, l’ironie, et l’insolence. ». Se succèdent des joutes verbales entre un élève impertinent mais si juste et sa professeur d’école, entre un médecin intéressé et son client/ patient, puis de tous les personnages qui jalonneront sa vie : la fratrie, le curé etc.Le drame et la profondeur du texte des mémoires est ponctué de ces scènes légères qui évitent le pathos facile du thème de la maladie incurable. Une maitrise tridimensionnelle de la scène Occuper la scène ce n’est pas forcément s’agiter sur tout l’espace qu’elle comprend mais, comme ici, et malgré l’exigüité de la salle de l’Archipel, diviser l’espace en dimensions et compartimenter la scène pour qu’elle serve de cadre à chacune des scènes et du jeu des personnages. Le décor d’abord, il est simple et sobre, tout d’abord au fond, au milieu, une porte qui donne sur ce lieu inconnu où le narrateur est réfugié (un hôpital ? un asile ?) on devine qu’il est assisté médicalement ou pshychiatriquement par sa première parole « Qu’on ne me dérange pas, je ne veux voir personne ». Cette porte ne se fermera qu’une fois. Un lit à gauche et à droite ce qui devrait, paradoxalement être le centre de la scène, le bureau sur lequel on distingue un journal, une bougie allumée, une plume et son encrier. C’est ici un tryptique temporel qui est symbolisé, au centre les souvenirs lointains, l’enfance, l’adolescence, les périodes de découverte et d’ennui, à gauche le lit qui représente lui le passé également mais un passé plus proche, le début des souffrances : la découverte la maladie, une prise de conscience des drames à venir. A gauche le bureau martial où le présent se déclame comme une longue sentence, où le narrateur est presque immobile si ce ne sont les gestes répétitifs et inéluctables. Tryptique enfin des unités de jeu : unité de temps (la nuit), unité de lieu (une chambre) et unité d’action : l’écriture des mémoires. L’art maitrisé de la mise en scène dans le vrai sens du terme. Le One-Man show, une performance nécessairement comique ? Dans « Voyage dans les mémoires d’un fou » on assiste à ce qui semble être un tiraillement entre la comédie dramatique et le stand-up humoristique, comme si l’on n’assumait pas encore que le « seul sur scène » puisse avoir une autre thématique que l’humour. On peut regretter, et ce fut mon cas, d’avoir l’impression d’être « interrompu » par ces souvenirs où l’humour devient déterminant, interrompu dans l’attention qu’on prête à ce texte de qualité, si sincère et bien écrit. L’œuvre de Lionel Cecilio est révélatrice d’un grand talent littéraire et scénique et d’ailleurs le public en redemande puisque le spectacle est prolongé jusqu’au 25 Mai ! Nassim Zouaia [Crédits Photos : © Charlotte Spillemaecker ] |
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