Vivre est devenu difficile mais possible – La rose des vents
La première partie du diptyque, Vivre sans but transcendant est devenu possible, met en scène cinq jeunes, à peine sortis de l’adolescence. Mal dans leur peau, ils s’interrogent sur le pourquoi de leur existence en torturant leurs corps dont ils semblent ne pas savoir quoi faire. Si violemment, parfois, qu’il devient difficile de soutenir la force de leur regard. Parce que les personnages utilisent les véritables prénoms des comédiens, la frontière entre réel et fiction est trouble : difficile de savoir dans quelle mesure tout cela n’est que jeu – doute soutenu par l’excellente qualité du jeu de chacun des comédiens, Justine Lequette en particulier (photo), dont la présence reste gravée dans les esprits.
Par un va-et-vient subtil entre le plateau et les vidéos projetées derrière les comédiens, un jeu de superposition entre les différentes scènes, répétées sur les écrans alors qu’elles ont été filmées quelques instants plus tôt, la mise en scène d’Antoine Lemaire crée une mise en abyme vertigineuse, qui donne à cette énième description des touments de l’adolescence, une nouvelle dimension, à la fois douloureuse et pleine de poésie.
Vient ensuite Vivre est devenu difficile mais souhaitable, dans la Grande Salle de La rose des vents. Après les corps jeunes, les corps usés, fatigués. Six personnes âgées répètent Le Sacre du Printemps, d’Igor Stravinsky, ode à la jeunesse… alors que leurs corps refusent de céder à l’immobilisme qui les menace, ils évoquent leur peur de la mort, par les mots aussi bien que par les gestes. La mort est là, toujours en contrepoint, mais c’est un magnifique pied de nez que lui adressent ces six vieillards qui se mettent à nu dans un moment d’émotion rare.
Reprenant le principe de la vidéo filmée en temps réel utilisé dans la pièce précédente, Antoine Lemaire montre les visages superbes de ses comédiens sans fard ni concessions. Les corps dansent et se tordent, refusent la raideur qui les saisit pour mieux embrasser cette vie à laquelle ils ne s’accrochent plus que par un fil.
Si Vivre sans but transcendant est devenu possible est un premier choc pour les spectateurs de La rose des vents, Vivre est devenu possible mais souhaitable prend à la gorge de telle sorte que l’on surprend certains spectateurs essuyer leurs larmes en sortant de la salle. Une merveilleuse leçon de vie, d’espoir et d’acceptation donnée par ces six comédiens qui donnent tout ce qu’ils ont pour mieux nous bouleverser.
« Vivre est devenu difficile mais possible »
Diptyque de la Compagnie Thec, écrit et mis en scène par Antoine Lemaire
Vivre sans but transcendant est devenu possible
avec Arthur Fourcade, Armelle Forner, Justine Lequette (en alternance avec Anne Jouvenet), Faustine Notebaert, Lionel Ségard
Vivre est devenu difficile mais souhaitable
avec Françoise Bal Goetz, Georges Edmont, Philippe Peltier, Pierre Reggiani, Claudette Walker, Lydia Fromint ou Amelia Estevez
du mardi 10 au samedi 14 mai 2011
La rose des vents, scène nationale Lille Métropole Villeneuve d’Ascq
Boulevard Van Gogh – Villeneuve d’Ascq (59)
[Visuel : Antoine Lemaire]
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