La rencontre d’un auteur et d’un metteur en scène peut parvenir à l’union délicieuse des talents, et c’est un beau moyen d’escompter un résultat plus abouti, plus universel aussi. Mais cette confrontation délicate peut aussi engendrer une nuisance réciproque des deux individualités qui se confondent. Avec cette mise en scène de Vivant, on ne peut que déplorer que les mots existentiels d’Annie Zadek trouvent un écho réducteur dans les tableaux d’un Pierre Meunier qui n’est pas parvenu à donner vie à la sombre problématique du vivant, ou plutôt de l’être encore en vie s’interrogeant devant l’inéluctable approche de la mort.
Il semble que la mise en scène de Pierre Meunier ait jugé bon de se dessiner d’une morne complaisance, et ce sur un texte déjà pesant d’intensité psychologique. Le décor est gris et les sons assourdissants, certainement voulus de la couleur d’une âme à rendre. Et puis, à quoi sert la déconstruction du décor? Vu et revu cela sert ordinairement au dépouillement croissant, au déploiement d’un vide poétique et porteur de sens. .. On aurait compris si Pierre Meunier avait opté pour une mise en scène épurée et suggestive, mais c’est très loin d’être le cas. De bout en bout la scénographie est a contrario imposante, jusqu’à la maussade aquarelle géante qui vient clore le spectacle, hissée en toile de fond. Un parti pris en demie teinte donc, que quelques tentatives colorées dépourvues de sens ne font que rendre moins résolu, comme lorsque la comédienne traverse la scène parée d’un coussin blanc orné du dessin enfantin d’un visage… Pourquoi ? Une question qui revient trop souvent et pointe violemment les défauts de cette mise en scène de Vivant.
Le rythme de la pièce incommode également. Tout est langueur, lenteur, et si le caractère poétique de l’écriture d’Annie Zadek laisse des interlignes de silence propices à des temps de réflexion, ceux-là ne sont pas ici rendus par de simples respirations, et se font si interminables qu’ils en deviennent favorables à la perte du spectateur, soit dans ses préoccupations quotidiennes, soit dans les bras de Morphée.
Pour ce qui est de la performance d’acteur, ce n’est pas qu’elle soit absente mais plutôt qu’elle sonne faux ou trop. Hervé Pierre outre sa figure que l’on conçoit triste étant donné les questionnements existentiels qui le déchirent, est globalement geignard et ses allures de pleureuse fatiguent à la longue. Quant à Julie Sicard, en plus d’être complètement inutile sur le plateau, on dirait qu’elle tire la gueule comme on dit vulgairement, et qu’elle n’est là que pour signifier lourdement le vivant par la forme de son ventre de femme enceinte. Lorsqu’elle se déshabille toujours muette pour nous le signifier réel, une formule très actuelle et basique nous vient, mais elle nous vient… Et c’est too much !
Vivant, c’est la noyade du sens et de la métaphysique dans une complaisance démesurée, et c’est trop ! Trop austère, trop plaintif, trop figuratif, trop vu, et trop _ terriblement _ long pour ne pas mourir d’ennui.
Christine Sanchez
D’Annie Zadeck
Mise en scène de Pierre Meunier
Avec Julie Sicard et Hervé Pierre
Du 28 mai au 28 juin 2009, du mercredi au dimanche à 18h30
Location : par téléphone du mercredi au dimanche de 14h à 17h, sur le site internet www.comediefrançaise.fr
Tarif : de 8 à 17 euros.
Comédie Française
Studio-Théâtre
Galerie du Carroussel du Louvre
99, rue de Rivoli
75001 Paris