Un homme trop facile ? – Roland Giraud – Théâtre Gaîté Montparnasse
Nous sommes dans la loge d’Alexandre, comédien célèbre, trente minutes avant le début de la première du Misanthrope. Autour de lui s’affairent sa fidèle habilleuse et la comédienne, dans tous ses états, qui jouera Célimène. Sa fille vient lui faire un bisou d’encouragement quand un auteur imbu de lui-même fut intrusion… pour lui dire combien il le déteste (ce pourrait bien être lui, le vrai misanthrope de la pièce !). Alexandre, en vieux routard des planches, ne stresse pas mais sera nettement plus ébranlé par la mystérieuse apparition (grâce à un ingénieux jeu de miroirs) du « vrai » Alceste. Ce dernier n’est pas là pour lui donner des conseils mais… pour lui refuser le droit de l’incarner, au motif qu’il n’a pas une once de ressemblance avec lui, voire qu’il est son exact contraire. Entre eux, s’amorce un duel de mots aptes à défendre convictions et arguments contradictoires…
Il était évident pour moi que j’allais assister à un échange subtil qui serait à la fois philosophique, artistique, empreint d’humour et brillant, à l’image en somme de ce à quoi nous a habitué Eric-Emmanuel Schmitt. Certes, la langue est belle et habile, d’autant qu’Alceste parle en alexandrins, et le texte, émaillé de savoureuses répliques, foisonne de pénétrantes considérations tant sur l’âme humaine que sur le théâtre.
Malheureusement, le propos est parasité par des pistes sur lesquelles l’auteur nous perd et qui n’aboutissent pas à grand-chose. Parmi elles, des menaces de mort anonymes, une relation père-fille orageuse, des parties de jambes en l’air entre deux portes, des attirances, un voyou sorti de prison… sans parler de la comédienne qui court après ses chiens ! Ces digressions, qui auraient simplement pu amener une certaine légèreté, provoquent en fait moult flottements et font perdre à l’ensemble la profondeur espérée. Cela se ressent même sur le jeu des comédiens qui, lorsque leurs personnages sont confrontés à ces situations à la finalité ambiguë, semblent hésitants sur leur psychologie.Seuls Jérôme Anger (Alceste) et Sylvain Katan (l’auteur) tirent parfaitement leur épingle du jeu, faisant de leurs rôles les plus finement définis.
Si les applaudissements étaient nourris au tomber de rideau et si beaucoup de spectateurs sont sortis enchantés, j’étais, vous l’aurez compris, bien plus partagée. Aussi… à vous de juger maintenant !
Caroline Fabre
Un homme trop facile ?
D’Eric-Emmanuel Schmitt
Mise en scène de Christophe Lidon
Avec Roland Giraud,
Du 18 janvier au 12 mai 2013
Du mardi au samedi 21h
Le dimanche à 15h
Tarifs : 44 € (1ère catégorie), 38 € (2ème catégorie) et 20 € (3ème catégorie)
Gaïté Montparnasse
26, rue de la Gaîté
75014 Paris
M° Gaîté ou Edgar Quinet
A découvrir sur Artistik Rezo :
– Les pièces à voir à Paris en février 2013
[Crédit photo : Bernard Richebe]
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