Le Misanthrope – théâtre du Lucernaire
L’hypocrisie, voici le maître mot dans cette pièce de Molière. Alceste, affligé par la frivolité, prône un « idéal d’honnêteté et de transparence des cœurs ». En mal avec le monde dans lequel il vit, Alceste amoureux de la jeune Célimène ne peut se résoudre à un amour partager.
Le Misanthrope, une comédie qui se termine mal
Dimitri Klockenbring tente de rendre sur scène toute la colère d’Alceste, une colère qui se fait si bien l’écho de notre société actuelle. « Mon but n’est pas d’honorer un «classique», mais de m’en servir pour parler des hommes et des femmes d’aujourd’hui. »
Avec une mise en scène, voir une mise en situation contemporaine, Dimitri Klockenbring a su atteindre son but. La crédible des acteurs ne s’heurte nullement au langage de Molière. La pièce en est même servie dans sa lisibilité et accessibilité.
Fort de cette colère, Tristan Le Goff (Alceste) propose un jeu tout en puissance. Révélant ainsi un Alceste combattant. Un combattant des causes perdues dont il sera le seul à souffrir, voici le personnage utopiste dépeint de réalités. Pour le metteur en scène, Alceste doit traverser un état de crise, qui « le conduira à traverser divers états d’âme en peu de temps, qui iront de la simple «râlerie» à la très grande colère, proche de la folie, mais aussi jusqu’à vivre une certaine résignation. Il passera aussi par des phases d’épuisement total, de dépression. »
Entre passion et folie, Tristan Le Goff offre une performance remarquable du début à la fin. Lorraine De Sagazan (Célimène) incarne une veuve déterminée au plaisir. Elle joue d’une voix puissante et d’une liberté des gestes. Si pour Dimitri Klockenbring « la femme n’est pas uniquement prétexte, mais elle est bel et bien au centre, libérée de toute attache familiale et religieuse », la direction qu’il offre à sa comédienne donne à voir cette tutrice d’indépendance.
Un Misanthrope minimal
Dans un décor dépourvu d’élément, la pièce se déroule sur un canapé. Reconstitution imaginaire d’un salon, ce minimalisme donne un support visuellement suffisant au spectateur qui pourra alors se perdre dans la rêverie des mots et des actions.
La mise en scène qui se meut dans ce minima de scénographique, prend très vite un effet mélancolique, voir tragique. Des effets de lumières, de mélodies, et d’errances, confèrent à la pièce une atmosphère de tristesse, révélant ainsi une lucidité sur l’avenir solitaire des personnages principaux.
« Mais si Molière décide de raconter un univers violent et impitoyable, il décide, dans le même temps, d’en faire une comédie. L’humour comme consolation. » annonce Dimitri Klockenbring. Sa représentation du Misanthrope est effectivement un agréable moment qui sait démontrer, dans la simplicité, toute la subtilité des vers de Molière.
Le Misanthrope
Mise en scène de Dimitri Klockenbring
Avec Tristan Le Goff (Alceste), Lorraine de Sagazan (Célimène), Thomas Zaghedoud (Philinte), Joséphine Mikorey (Arsinoé), Pierre Buntz (Oronte), Inès De Broissia (Eliante), Romain Cottard (Acaste) et Nicolas Lumbreras / Dimitri Klockenbring (Clitandre et Du Bois).
Du 1er février au 28 mars 2012
Du mardi au samedi à 21h30
Les dimanches à 15h
Durée : 1h35
Théâtre du Lucernaire
53, rue Notre-Dame des Champs
75006 Paris
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