Si tu me regardes, j’existe à la Folie Théâtre
Quatre comédiennes centrées sur l’une d’entre elles : Claire. Claire grandit, Claire devient femme alors qu’elle ne rêve que d’une chose : rester enfant. Dans une époque où la frontière entre une vie d’adolescente et une vie de femme devient de plus en plus mince, Claire elle, ne veut surtout pas grandir. Grandir, c’est vieillir. C’est la peur de voir ses amis partir avant soi. Au-delà du syndrome de Peter Pan, une autre envie, celle de faire un régime pour plaire à un homme. Une envie de maigrir qui se transforme alors peu à peu en un véritable rejet de la nourriture, en une obsession permanente.
« Si tu me regardes, j’existe est un voyage entre rêve et réalité, entre le maintenant inhumain et rationnel de la maladie et les souvenirs époustouflants du temps perdu, temps enfantin bercé d’illusion et de gaieté ». Pour sa pièce qui est un acte-unique, l’auteur-metteur en scène italienne, Francesca Volchitza Cabrini, a choisi une esthétique minimaliste portée par divers accessoires, donnant l’illusion d’un décor nouveau et de personnages différents.
C’est avant tout la lumière formidablement orchestrée et le jeu des actrices qui permettent au spectateur de mieux pénétrer l’histoire. Quatre actrices déroulent leur jeu autour du centre de gravité de la pièce : Claire. Tour à tour père, mère, grand-mère, tante, boulangère, Vanessa Bile-Audouard, Charlotte Victoire Legrain et Giada Melley sont les proches de Claire : les Indifférenciés, ceux qui assistent impuissants à son effacement progressif. Ils sont aussi sa conscience, ses voix intérieures, ses cauchemars et ses obsessions. Mention particulière à Marion Monier (Claire) pour son incroyable talent de comédienne. Dans un jeu sans concessions, elle se livre toute entière au public et fait preuve d’une véracité implacable.
On ne rira pas beaucoup avec Si tu me regardes, j’existe et l’on ne pourra pas en blâmer l’auteur, puisqu’un tel sujet ne porte pas vraiment à la réjouissance. Certes, la pièce n’a pas la prétention de changer le monde ni de dévoiler au grand jour les secrets devenus de polichinelle de cette maladie. Toutefois, elle offre sans détours ni pudeur, une clé de lecture et de compréhension d’un monde trop souvent silencieux et fermé. On prendra donc plaisir à regarder cette très belle représentation afin qu’elle aussi, elle existe.
Jonathan Hoenig
Lire aussi sur Artistik Rezo L’île des esclaves à La Folie Théâtre.
Si tu me regardes, j’existe
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