“Reverse !” : la nouvelle revue du Cirque Électrique
Ils ont l’habitude de renverser nos habitudes avec leurs soirées cabaret qui ne ressemblent à rien d’autre. Leur nouveau « Cabaret Décadent » s’intitule Reverse ! et propose un programme totalement différent du précédent. Du genre à la perspective et aux disciplines circassiennes, ici tout est inversé.
Les choses doivent-elles nécessairement être telles qu’elles nous paraissent fièrement établies ? Le plafond ne peut-il pas se trouver au sol ? Le masculin doit-il toujours avoir une apparence masculine ? Pourquoi un cracheur de feu ne pourrait-il pas avaler les flammes ? Et un créateur d’espaces culturels alternatifs se déguiser en queer qui se transforme en dictateur africain, pour animer le show ?
Bref, ce “Cabaret Décadent” qui tient les rênes du Cirque Électrique en ce printemps précoce parisien prend des airs d’underground berlinois où on se réchauffe parce que dehors on glisse sur la glace. Tout inverser, c’est le but, fatalement ambitieux, de cette revue si sulfureuse et si délicieusement décadente.
Les “Cabarets” du Cirque Électrique sont en train de devenir un classique de la vie parisienne. Ils se suivent, déclinés selon le même principe et dans la même joie de vivre, et se renouvellent parce que Hervé Vallée et son équipe attirent toujours de nouvelles sommités de la scène parisienne et mondiale. Ça marche comme sur des roulettes, et les serveurs en rajoutent puisqu’ils traversent la piste en patins pour livrer ce que vous avez commandé au bar.
Et on lance ici un appel au public, pour sortir dans des tenues plus folles que ça, parce qu’on n’a pas vu beaucoup d’effort pour se fonder dans cet esprit berlinois, complètement déjanté et populaire à la fois. C’est ce qu’on appelle la liberté, tout simplement. Eh oui, Mesdames et Messieurs, il ne faut pas hésiter, quand on va au “Cabaret Décadent”, placé sous la devise “Reverse !” ou “Inversion”, à s’auto-inverser un peu plus que d’habitude. Tout de même ! Et ceux qui veulent finissent la soirée en dansant sur la piste.
Là, justement, où s’est déroulé ce “Cabaret Décadent”, avec des hommes qui se transforment en religieuse, en fillette japonaise ou cachent leurs parties génitales pour faire de la pole dance, le corps couvert des tatouages les plus pittoresques. Celui-là par exemple est labellisé “danseur queer” et s’appelle Syoulla Jins. Mais il y a aussi des moments plus poétiques, comme celui avec Antoine Redon dans sa roue Cyr, qui crée un véritable poème visuel et sensuel.
On conseille par ailleurs de rester sous le chapiteau à l’entracte pour ne pas rater le retour en groupe des artistes, dans l’une de ces parades déjantées qui sont une autre raison d’aller aux soirées cabaret du Cirque Électrique. On voit ensuite un jongleur (François Borie) qui fait tourner ses massues plus vite qu’un moteur de Formule 1. Et un tirage au sort qui fait monter sur scène quelques spectateurs qui vont prendre leurs bulletins sur la peau du fakir Guillaume Leclerc, où ils sont attachés avec des agrafes réelles.
C’est donc entendu, au “Cabaret Décadent”, les hommes se dépassent. Mais les femmes aussi. Amélie Kourim assure les indispensables voltes au trapèze ballant et retourne le monde en marchant au plafond. Le Chaplin au mât chinois est en vérité une femme (Constance Bugnon, également danseuse contemporaine).
Alors, qui a les jambes les plus longues, nichées sur des talons plus hauts que tout ce qu’une femme oserait caler sous ses pieds ? Ce serait sans doute un concours entre Syoulla Jins et le Monsieur Loyal, Otomo de Manuel, qui porte de toute façon des tenues à couper le souffle. Et au-dessus du bar, les musiciens jouent les morceaux composés spécialement pour ce programme. Tout est live, tout est authentique, et inversement, selon la devise de la soirée :”Reverse !”
Thomas Hahn
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