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Regardez mais ne touchez pas ! – Théophile Gautier – Le Lucernaire

3 décembre 2012
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Regardez mais ne touchez pas ! - Théophile Gautier - Le Lucernaire

Ce voyage en Espagne toujours marqué par une authenticité du dire sera à l’origine de carnets d’impression du même nom et fera naitre cette pièce que nous redécouvrons aujourd’hui avec joie comme si Gauthier écrivait toujours. Une sorte de résurrection qui donne aux comédiens au metteur en scène comme au public l’occasion de savourer un théâtre surprenant, vigoureux, et inédit. 

Le synopsis de cette belle toile scénique nous rappelle le protocole royal qu’il soit d’Espagne ou de quelqu’autre royauté d’ailleurs. Il est en effet interdit de touchez la reine ou le roi d’ailleurs. C’est historique ! 

Gauthier avait d’ailleurs commencer à intituler cette pièce «  Regardez mais ne touchez pas à la reine » avec la malice et la lègéreté de plume qu’on lui connait il sort les spectateurs, ses contemporains du théatre dramatique de taille auquel on les habitue pour tourner la recette en comédie pour finir. En filigranes c’est un peu le Ruy Blas d’Hugo qu’on reconnait là à cela prêt que la pièce de Gauthier ne comporte que trois actes contre cinq et n’est pas écrite en Alexandrins. La fatalité du drame Romantique d’Hugo se mue ici en comédie pleine de rebonds et de cocasseries.

Théophile Gautier nous fait goûter la à nouveau un usage de la langue française d’exception avec un vrai sens du rythme et une richesse lexicale qu’on aimerait contemporaine avec désolation. Hugo dans l’ombre forme la racine inspiratrice que gauthier transforme en plante vivace

Mais rentrons un peu dans la projection, plongeons nous les yeux grand ouvert dans le jeu des comédiens et de l’auteur : la Reine d’Espagne, Elisabeth Farnèse (Chloé Donn ou Jeanne Cogny) est en danger, son cheval s’embale mais personne ne doit la toucher ! La mort et la sentence incombant à celui qui enfreint la règle. Deux inconnus surgissent alors, au péril de leur vie, libèrent la Reine évanouie de son cheval endiablé. Néanmoins, en tentant de fuir les  hommes de la garde royale, un des deux sauveteurs trouve la mort dans une rivière, tandis que l’autre est toujours poursuivi. Doña Beatrix [Flore Gandiol], amie fidèle et suivante de la suzeraine, désespérée par les évènements, a promis sa main et sa fortune à qui sauvera la Reine.

Le salmigondis des combines et des quiproquos de la pièce pour les épousailles prend forme. L’un des deux postulants malhonnête et pavé de mauvaises intentions Don Melchior se fait passer pour le sauveur de la reine. Tandis que le véritable héros, le capitaine Don Gaspar [Alexis Perret], fou amoureux de Doña Beatrix, essaie « bec et ongles » d’échapper aux alguazils et se réfugie chez la servante de la Reine, Griselda [Judith Margolin ou Sarah Bensoussan]. Qui de ces deux antagonistes trouvera place dans le cœur de la belle ?

Théophile Gautier était un scrupuleux observateur au point qu’on pourrait penser tant la scénographie comme les textes sont à l’aise avec la culture ibérique que ce voyage n’est autre que celui d’un autochtone plutôt que d’un horsain.Capes noires, chapeaux noirs, dentelles rouges eventails et mantilles sont portés par des comédiens laissant croire que le texte et les décors sont bel et bien sortis de l’esprit d’un espagnole tant ils sont en symbiose dans leur rôle, répliques et dialogues que dans leur vêture et dans le décors dans lequel Gauthier à choisi de nous les montrer. 

Entre drame et romance les personnages se transposent facilement de la commedia dell’arte (l’amoureux caché, le matamore, le triste sire) dans le récit de cape et d’épée (la reine intouchable qu’il faut sauvé, le couplé éprouvé, l’ami dévoué). Il ne faudrait toutefois pas passer sous silence l’étonnant homme orchestre : Paul Marchadier qui incarne ici le personnage de Désiré Reniflard . Inventé de toutes pièce par l’auteur pour raconter son voyage en Espagne, Penchenat lui donne ici un rôle de coryphée loin de la tragédie grecque toutefois. Il apparait au début de la pièce comme le double de l’auteur puis se fond à la mise en scène sous forme d’homme orchestre, souffleur, bruiteur passant de ce rôle à celui des alguazils que sont les gardes royaux.

Le comique de la commédia dell Arte ce personnage l’entretien bellement dans l’usage d’instruments incongrus ou d’imitations animalières poussant les spectateur à rire de bon cœur à la fois parce que le rire et inéluctable dans ce comique de situation mais aussi parce qu’il nait de la célérité et du talent avec lequel Paul Marchadier alias Désiré Reniflard sait passer d’un rôle à l’autre.

Le talent de l’auteur procède aussi de ce mimétisme Shakespearien ou désiré reniflard serait en quelque sorte par analogie le double adapté du chef de troupe dans le songe d’une nuit d’été.

Cette pièce créée le 20 octobre 1847 fut jouée la première fois sur la scène du théâtre de l’Odéon à paris . Hugo ne pourra pas voir la pièce affairé qu’il est à cette période de la santé de sa femme Adèle et de son quatrième enfant François Victor, tous deux atteints de la typhoïde. Il ne se prive toutefois pas d’encourager Gauthier en lui écrivant le 22 octobre 1847 : « J’entends dire de toutes parts que votre pièce est ravissante. » Alors on se pose légitimement cette question : Pourquoi ne l’a ton plus jamais jouée ?

Un an après le bicentenaire de la naissance de Théophile Gauthier, Jean-Claude Penchenat comédien et metteur en scène de renom à qui l’on doit en cofondateur la naissance du théâtre du soleil puis du théâtre du Campagnol ( Centre Dramatique National) nous fait vivre un grand moment théâtral que seule la passion et l’expérience d’un tel professionnel capable d’humer un texte rare et de l’exhumer de la sorte nous ramene sur la sur la scène pour admirer une telle pépite. L’image du jeune romantique venu soutenir Hugo à la première d’Hernani. Passionné d’art et d’un goût pour l’ailleurs Penchenat nous donne à gouter ce grand homme là la période d’un voyage théâtral avec l’Espagne en clichés dans un français modelé, ciselé et enrichit par sa passion de l’art et des décors .

Yves-Alexandre Julien

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Regardez mais ne touchez pas !

De Théophile Gautier 

Mise en scène de Jean-Claude Penchenat
Assistante : Maria Antonia Pingitore

Avec Paul Marchadier, Damien Roussineau, Alexis Perret, Samuel Bonnafil, Flore Gandiol, Chloé Donn en alternance avec Jeanne Gogny et Judith Margolin (en alternance avec Sarah Bensoussan)

Scénographie de Jean-Baptiste Rony // Assistants pour la construction : Damien Roussineau et Alexis Perret // Costumes et accessoires : Théâtre de l’Épée-de-Bois et Jean Claude Penchenat // Costumière : Claude Rocher // Lumières : Maria Antonia Pingitore et Adib Kharrat

Prolongations jusqu’au 20 janvier 2013
Du mardi au samedi à 21h30 et le dimanche à 17h

Plein tarif : 30 € // Tarif réduit (seniors) : 25 €
Tarif réduit (moins de 26 ans et chômeurs) : 15 €
Enfant jusqu’à 12 ans : 10 €

Durée : 1h20

Le Lucernaire 
53, rue Notre-Dame-des-Champs
75006 Paris
M° Saint-Sulpice, Vavin ou Notre Dame des Champs

www.lucernaire.fr

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