0 Shares 1262 Views

Regarde maman, je danse

12 mai 2009
1262 Vues
regarde_je_danse

 

Une table, deux chaises et deux poupées. Le plateau est sobre, mais l’histoire de Vanessa Van Durme est compliquée. Pieds nus et vêtus d’une simple robe de nuit rose, l’auteur et interprète livre sans pudeur les souffrances de son enfance, sa quête infinie du bonheur et l’inadéquation caractérisant la relation qu’elle entretient avec son corps.

Légèrement, le spectacle commence par des considérations-clichés sur le côté misogyne des sociétés contemporaines : entre les enfants, le travail et la maison,  les femmes ont trois métiers, sans parler de la corvée de la nuit, alors que les hommes n’en ont qu’un. Toutes ces femmes, éreintées par leur journée surchargées, n’ont pas eu le choix de leur condition, elles sont nées ainsi. Alors qu’il fait mieux vivre d’être un homme, Vanessa, elle, a choisi de devenir une femme et de rejoindre le camp du sexe faible.

La question d’un non choix.

Or, ce que dévoile la pièce, c’est justement que cette décision n’était pas un choix. Vanessa n’était pas elle-même dans ce corps d’homme et ce sentiment d’inadéquation qui traverse son être, elle le date au moment même de sa naissance. Elle a bien essayé l’homosexualité, mais la solution était ailleurs : il s’agissait de changer de corps. Et en effet, le seul instant de complétude vis-à-vis de son être, elle l’éprouve lors de son premier rapport sexuel à travers son nouveau corps, son corps de femme.

Entre le léger et le grave, l’amusant et l’émouvant, Vanessa raconte une enfance frustrée, passée à essayer de jouer aux jeux des filles, à se maquiller et à s’habiller des affaires de sa mère malgré la colère paternelle. Elle fait part de sa jeunesse à s’essayer à l’homosexualité, elle livre le récit cocasse de son opération au Maroc, en 1975, celui de sa deuxième naissance, une naissance vaginale et marocaine comme elle s’amuse à le dire.

Or toutes ces confidences ne manquent-elles pas un peu de retenue ? Le spectateur ne se retrouve-t-il pas dans la position indélicate du voyeur, face à cet être dont l’émotion et la souffrance ont tout l’air d’être réels ? Cependant Vanessa ne fait pas de manières, et puisqu’elle a décidé de se livrer, elle livre tout mais en cherchant à nous mettre à l’aise. Ainsi à travers la problématique de son genre identitaire, l’auteur et interprète questionne un autre genre, celui, littéraire, de l’autobiographie au théâtre, de ses limites et de l’absence de distance qu’il établit entre le spectateur, la fiction et le réel.

 

Chloé Goudehooft

 

De et avec Vanessa Van Durme
traduction Monique Nagielkopf
mise en scène Frank Van Laecke
coaching Griet Debacker
lumières Jaak Van de Velde

 

Du 11 au 16 mai 2009
Renseignements

tél : 01 42 74 22 77
www.theatredelaville-paris.com

Théâtre de la Ville.
les ABBESSES
31 rue des Abbesses
Paris 18

Articles liés

“Tant pis c’est moi” à La Scala
Agenda
66 vues

“Tant pis c’est moi” à La Scala

Une vie dessinée par un secret de famille Écrire un récit théâtral relatant l’histoire d’un homme, ce n’est pas seulement organiser les faits et anecdotes qu’il vous transmet en une dramaturgie efficace, c’est aussi faire remonter à la surface...

“Un siècle, vie et mort de Galia Libertad” à découvrir au Théâtre de la Tempête
Agenda
84 vues

“Un siècle, vie et mort de Galia Libertad” à découvrir au Théâtre de la Tempête

C’est Galia Libertad – leur amie, leur mère, leur grand-mère, leur amante – qui les a réunis pour leur faire ses adieux. Ce petit groupe d’amis et de proches, trois générations traversées par un siècle de notre histoire, se retrouvent...

“Chaque vie est une histoire” : une double exposition événement au Palais de la Porte Dorée
Agenda
104 vues

“Chaque vie est une histoire” : une double exposition événement au Palais de la Porte Dorée

Depuis le 8 novembre, le Palais de la Porte Dorée accueille une double exposition inédite, “Chaque vie est une histoire”, qui investit pour la première fois l’ensemble du Palais, de ses espaces historiques au Musée national de l’histoire de...