Les Amantes d’Elfriede Jelinek
Aussi à l’aise avec Elfriede Jelinek (née en 1946) qu’avec Sévigné née bien plus tôt, avec Nietzsche, Sand ou encore avec Dane Cuypers née tout récemment, pour laquelle elle donne prochainement lecture de son splendide « Tourments et Merveilles en pays khmer » paru chez Actes Sud (Mai 2009), Brigitte Mougin passe de la narration au dialogue sans qu’on s’en aperçoive. Cette façon qu’elle a de faire apparaître tour à tour l’auteur et ses personnages, parfaitement vivants, ça ne tient pas du tour de passe-passe mais de sa capacité de comédienne à véritablement construire son interprétation !
Elle a du talent, du charme bien évidemment, allez-y et recommandez ce spectacle (au chapeau, c’est peu cher pour une bonne heure de telle qualité).
«Les Amantes» nous renvoient à la reconstruction d’après-guerre mais là n’est plus le propos, il s’agit de comprendre que le sort des femmes est joué, jeté aux orties comme celui des hommes qui se bercent d’illusions trop simples dans une Europe où chacun ne se pose que des questions banales. E. Jelinek nous prévient : “Elles deviennent femme, rien que femme… elles deviennent mère, rien que mère…elles périssent de toutes façons” .
Interview : Brigitte Mougin répond aux questions d’Artistik Rezo
« Pourquoi Jelinek sur une scène ?
C’est ma manière de faire partager la découverte de Jelinek, le désir de la mettre en voix. La musicalité du texte de Jalinek qui m’est apparue dès la première lecture, c’est comme une partition de musique, on a envie de la jouer dès qu’on la lit.
Le propos de Jelinek ?
Jelinek décrit la misère, la médiocrité. Ce qu’elle nous raconte pourrait se dérouler dans n’importe quel milieu social avec toute la dose qu’elle instille de dérision, de cynisme. C’est sa forme d’humour qui est convaincante.
La colère est palpable, sa révolte visible. Elle refuse de participer à ce qui semble tellement normal pour les êtres humains. L’amour, la possession affective ou matérielle, la beauté, l’argent, le travail, la laideur lui semblent dérisoires. Qu’ils soient riches ou pauvres, voilà bien des gens somme toute assez médiocres, une somme de petites gens.
La lumière qui apparaît dans le propos de Jelinek c’est l’obligation qu’elle fait à ses lecteurs de prendre conscience.
Jelinek en les bousculant les amène à réfléchir. Sans en avoir la prétention, elle leur impose cependant cette prise de conscience avec sa part littéraire de vérité. Ni sociologue, ni philosophe, elle écrit sans concession. Je la rapproche volontiers de Thomas Bernhardt. Comme observant le monde de l’extérieur tout en étant à l’intérieur ?
Je la trouve «déjantée» dans son œuvre, dans sa façon de construire le roman ; j’ai donc naturellement dégagé l’essentiel dans le découpage que j’ai fait des Amantes, c’est à dire son rythme, ses cadences, ses répétitions, et, je me répète, cette musique de son texte que j’aime interpréter.
Les Amantes ?
Le texte « Les Amantes » dépasse l’anecdote. Bien évidemment, il s’agit de l’histoire de deux jeunes filles du même village mais aux destins différents. Mais on ne s’arrêtera pas à cette histoire trop simple, et puis on comprendra Jelinek »
Les Amantes d’Elfriede Jelinek
Mise en relief de Brigitte Mougin
Tous les jeudis et vendredis jusqu’au 5 mars 2010 à 20h00
Spectacle en libre participation («au chapeau»)
Réservations : 01 45 40 05 08 ou brigitte.mougin@live.fr Cette adresse email est protégée contre les robots des spammeurs, vous devez activer Javascript pour la voir.
La Crypte d’Al Hana
102, rue de l’Ouest
75014Paris
Métro Pernety
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