Pinocchio – Ateliers Berthier
Le spectacle de Joël Pommerat est saisissant : les enfants réagissent plutôt bien, les adultes tremblent un peu.
Sur scène, un conteur étrange tiré des fêtes foraines, hâbleur au débit rapide et percutant, enchaîne les étapes du récit, rythmées par des coupures de noir complet sur scène. Les bruitages effrayants participent à cet étourdissement, à ce choc explosif. On est loin du conte de fée édulcoré mais plongé dans la réalité d’aujourd’hui que vivent bon nombres d’enfants dans les milieux défavorisés. Pas de jugement, mais un simple constat de cette réalité, de cette violence latente, liée dans ce conte à la pauvreté que refuse Pinocchio au péril de sa vie. Le pantin exige rudement à manger à son père bienveillant mais très âgé et dépassé. Des répliques culpabilisantes résonnent très fortement dans le texte pour les parents comme : « Il est difficile de refuser quelque chose aux enfants », ou au contraire pleines d’espoir : « Je serai non pas ce que tu attends de moi mais encore mieux » ; car elles laissent entendre que l’enfant se construit à la recherche de sa propre liberté et qu’il n’est pas un simple prolongement des désirs insatisfaits des parents.
Le cheminement de Pinocchio est bouleversant et cruel : il sera pendu à un arbre, battu, restera enfermé en prison dans une cage plus de huit mois. Il découvre le monde avec ses yeux aveugles, il ne craint rien, c’est un pantin résistant à tout, tenté par des rêves d’argent, de plaisirs et d’illusions. Il traverse les tentations et en sort grandi, rappelé à l’ordre par sa bonne fée. Le metteur en scène a choisi de la faire apparaître, tantôt en noir réprobatrice, tantôt désirable mais inaccessible, immense dans une robe blanche immaculée. Les enfants sollicités par le forain sont d’avis au début qu’on ne peut pas changer, pourtant certains osent croire en Pinocchio malgré tout, et espèrent qu’il ira de nouveau à l’école pour apprendre et se construire. Faisons leur confiance.
Marie Torrès
Pinocchio
De Joël Pommerat
D’après le conte Carlo Collodi
Mise en scène de Joël Pommerat
Spectacle pur tous à partir de 8 ans
Du 24 novembre au 26 décembre 2010 à 20h
Le dimanche à 15h
Réservations : 01.44.85.40.40
Plein Tarif : 28€ // Jeunes moins de 26 ans, étudiant, RSA : 14€ (Justificatif indispensable)
Demandeurs d’emploi : 18€ (Justificatif indispensable)
Élèves d’écoles de théâtre: 6€ (Justificatif indispensable)
Ateliers Berthier
1, rue André Suarès
75017 Paris
M° Porte de Clichy
RER Porte de Clichy
[Visuel : © Elisabeth Carecchio]
Articles liés
Nick Cave offre une grand messe jubilatoire à l’Accor Arena de Paris
Il existe des artistes inclassables, totalement hors normes, et Nick Cave appartient à cette catégorie. Après un passage remarqué à Rock en Seine en 2022, il est revenu à Paris ce 17 novembre 2024. Sa voix de velours, de...
Un week-end à l’Est… en plein Paris ! Édition 2024
Célébrant les cultures de certains pays d’Asie et d’Orient pour la huitième fois d’affilée, le festival Un week-end à l’Est a décidé de mettre à l’honneur cette année, Erevan, mais plus généralement, l’Arménie. A l’instar donc des éditions précédentes,...
“Travelling song”, le concert de musique de la Renaissance au Temple de Port-Royal
Avec « Traveling Songs », nous proposons un voyage musical à travers l’Europe de la Renaissance, autour de pièces très célèbres de la fin du XVe siècle au début du XVIIe siècle, dont les mélodies ont été reprises et...