Jean Piat joue à cache-cache avec sa propre histoire
Pièces d’identité |
Depuis l’âge de 4 ans, Jean Piat aime surprendre son auditoire. Aujourd’hui, dans Pièces d’Identités au Théâtre des Bouffes-Parisiens, il a laissé Ruy Blas, Cyrano et le Comte d’Artois au vestiaire afin de retrouver, grandeur nature, tel un roi nu, son public de toujours. On va justement commencer par son public. Il est multiple d’autant qu’il rassemble une majorité de sa génération et un cortège permanent de jeunes au milieu des moins jeunes. Beaucoup de femmes, pardi ! C’est peu dire qu’il est attendu. Aussi, lorsque le rideau s’ouvre et qu’apparaît l’acteur, figé dans son grand fauteuil, devant le bureau de sa bibliothèque (on est chez lui, visiblement), chacun retient son souffle. Et justement, là où généralement on applaudit l’entrée en scène de l’acteur connu et reconnu, ici, rien… on entendrait une mouche voler ! Il attaque le monologue de son existence d’homme de l’art [ théâtre, télévision, cinéma] avec bonhomie. Usant de son beau sourire (Jean Piat séducteur), il parle des grands rôles qu’il a tenus et redonne de ses textes sur un ton bien naturel. Jeune comédien, on lui demandait :”Vous jouez quoi ?” Puis les années passant : ” Vous jouez toujours ? ” Aujourd’hui, quand on le rencontre : ” Vous jouez encore ? “
Jean Piat en sort des vertes et des pas mûres avec son humour bien à lui (Jean Piat facétieux.) Il parle de Sacha Guitry, de Cyrano, de lui-même avec cette permanente dérision qu’il a choisie pour nous faire partager ses « Pièces d’Identités » avec son sourire de petit malin (Till Eulenspiegel) qui se joue de toutes les situations. Il représente à lui tout seul la comédie de situation avec ses quiproquos et ses coups de théâtre avec cascades et péripéties, rebondissements et épiques conclusions. Au fil du récit de son parcours aux multiples identités, il se raconte avec une joie certaine et l’on verrait volontiers là, le fantôme de Giacomo Casanova qui se marrait en rédigeant ses mémoires. Le monologue de l’acteur de fond Ce style, résolument choisi du monologue d’acteur est sa signature depuis « PROF » ( de Jean-Pierre Dopagne, mis en scène par Jean-Claude Idée.) Il tenait le rôle d’un professeur. Dès qu’il entrait en scène, en blouse grise, cartable à la main, il se figeait à l’avant-scène devant son public médusé pour l’apostropher : « A mon époque, on se levait ! » Le public riait et … se levait (authentique !) Il a aimé, il aime Guitry, il nous le confie comme il en avait publié son « Je vous aime bien, monsieur Guitry, 2002 — prix Saint-Simon » Il nous raconte son théâtre des grands textes et des auteurs : Molière, Hugo, Musset, Giraudoux, Rostand, Shakespeare, Marivaux, Feydeau, Beaumarchais…etc. De Beaumarchais, il puise sa force, celle qui lui a permis de toujours laisser le personnage entrer calmement dans sa peau d’acteur « alors qu’on nous répète que c’est l’acteur qui devrait entrer dans la peau du personnage ! » Reprenez son « Beaumarchais, un intermittent du spectacle, 2004— Médaille de vermeil » (Jean Piat écrivain) Dans cette leçon de théâtre, Jean Piat nous fait partager sa passion du monologue. Le monologue qui lui semble demeurer le meilleur des ponts tendus entre l’acteur et son auditoire. Pour en conclure, en citant à nouveau Guitry, que « leur pays à eux, les acteurs, c’est le public ! » Patrick DuCome Vous retrouverez les « Pièces d’Identités » de Jean Piat dans son dernier livre « Et… vous jouez encore ! – Flammarion, 2015 » |
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