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Orphée et Eurydice au TCE : prodige du chant pur

©Vincent PONTET

Le chef d’orchestre Diego Fasolis, spécialiste mondial de la musique baroque, dirige pour 6 représentations le contre-ténor Philippe Jaroussky et la soprano Patricia Petibon dans le joyau musical en trois actes de Gluck. Le plus pur de la musique incarnée par deux interprètes d’exception.

Un mythe qui porte l’amour à son incandescence

©Vincent PONTET

L’histoire d’Orphée et d’Eurydice, la naïade dont le poète tombe éperdument amoureux et qu’il envoûte, comme tous ceux qui l’entourent, par la pureté de son chant prodigieux, est devenu un mythe qui confronte au plus haut point l’amour et la mort. Ces deux-là, en effet, auront besoin de se perdre pour se retrouver au plus profond des Enfers où malgré eux, et grâce à la manigance du Dieu Amour, ils s’échapperont ensemble mais séparés par une absence totale de regard, pour se retrouver ensuite. L’amour à l’épreuve de la mort, puisqu’il faut se perdre pour s’éprouver l’un à l’autre, mais aussi ici, dans ce sublime opéra de Gluck composé en 1762, l’amour incarné par la chair de la musique.

Un opéra au service de l’action et des personnages

©Vincent PONTET

C’est donc un opéra révolutionnaire que va composer Gluck, débarrassé des lourdeurs et des scories qui le surchargeaient à l’époque. Une ligne mélodique d’une pureté parfaite qui soutient la ligne de chant des personnages, épouse les émotions de manière simple, vivante, moderne. Rien de plus beau, de plus puissant que cette partition jouée par I Barocchisti avec sur le plateau le Choeur de Radio France. C’est cette même idée de simplicité, de pureté qu’a adoptée le metteur en scène Robert Carsen avec une scénographie austère, une lande de cailloux gris, dénudée, paysage lunaire où se recueillent des personnages habillés de noir, en robes longues et chapeaux, mais dont le chant illumine l’espace scénique.

Chanteurs d’exception

©Vincent PONTET

C’est sur cette terre rocailleuse que Philippe Jaroussky, Orphée, pleure sa bien aimée. Costume et cravate sombre de jeune homme élégant, le chanteur irradie de présence et de musicalité, chaleur du timbre, douceur et précisions des lignes mélodiques, de l’aigu au médium. Son chant, la douceur de sa voix, souple, dans le respect parfait de la partition, envoûte véritablement, comme le ferait Orphée. Au second acte, alors que les enfers sont représentés par des corps enveloppés de draps blancs, très belle image de spectres encerclés par des flammes, c’est Eurydice qui apparaît. Patricia Petibon, longue chevelure brune, s’extrait de son enveloppe et renaît à la vie. Voix déchirante, étranglée par le désespoir de ne pas être considérée par Orphée, la soprano est magnifique de douleur et de d’amour blessé. La jeune Emoke Baráth, qui joue amour, fait une très belle apparition sur le plateau, silhouette androgyne et fluidité vocale appropriée. Une heureuse réussite.

Hélène Kuttner

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