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Merlin ou la Terre dévastée au Théâtre de la Colline

7 décembre 2009
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MerlinColline2

Dès la première scène, le ton est donné : nu comme un ver, au milieu de la scène, Merlin est façonné par le Diable son père, qui le met face à sa condition de mage visionnaire. C’est avec la même audace, le même ton décalé, la même extravagance que se déroulera la pièce, durant 3h40 d’instants de pure comédie, de grande tension dramatique ou encore de fantaisie surréaliste. Pas d’interdits ni de restrictions : très vite, le spectateur prend conscience que tout est possible, que la pièce va bien au-delà des limites du théâtre pour résonner de manière bien plus universelle en chacun de nous.

 

Des Chevaliers aux Possédés

C’est d’ailleurs pour cela qu’il semble dommage que le Théâtre de la Colline ait confiné les Possédés au Petit Théâtre : cette fresque-là a besoin d’espace pour vivre, pour respirer, pour donner toute la mesure de son ambition dramatique. La troupe s’empare avec une force presque animale de la pièce de Tankred Dorst et se l’approprie sans tabous ni complexes. Corps nus, ensanglantés, embourbés témoignent de cette volonté d’ancrer le public dans la réalité de ce qu’est l’homme. Associé à une jubilation du langage, ce choix visuel saisissant se fixe sur la rétine du spectateur et ce dernier, plongé dans l’univers réinventé de la cour du roi Arthur, n’en sort pas indemne.

 

Il y a du sublime dans cette production de Merlin ou la Terre dévastée. Une profonde envie de s’élever au dessus de la condition humaine – pour, bien souvent, retomber à terre avec plus de violence encore. Ainsi Merlin prend-il conscience de son impuissance face aux désirs des hommes, plus soucieux de leurs intérêts personnels que d’accomplir leur destinée. Ainsi Arthur reste-t-il un mari jaloux plus soucieux de préserver son couple que de rendre la justice, dont il se proclame pourtant le fondateur. Seul Perceval semble échapper à cette médiocrité des hommes – ce qui lui vaut d’être banni de l’ordre des Chevaliers de la Table Ronde. Plus que des héros, ces personnages-là sont des individus pris dans la tourmente du mythe.

Pleine de bruit et de fureur, Merlin ou la Terre dévastée est une production ambitieuse – et réussie. Pendant 3h40, le spectateur est emporté par la puissance imaginative du collectif Les Possédés. Et alors que les comédiens viennent saluer leur public conquis, celui-ci se rappellera pourquoi il aime le théâtre – ou bien ne manquera pas d’en tomber amoureux si ça n’était pas déjà le cas. Un incontournable cette saison, à ne pas manquer sous aucun prétexte.

 

Audrey Chaix

 

 

Retrouvez cet article sur Culture’s Pub.

 

 

Merlin ou la Terre dévastée
Texte : Tankred Dorst, traduit par Hélène Mauler et René Zahnd
Mise en scène : Rodolphe Dana
Création du Collectif Les Possédés

 

Jusqu’au 19 décembre
Petit Théâtre
Durée : 3h40 (entracte non compris)
Du mardi au samedi à 19h30, le dimanche à 15h
Plein tarif 27€, le mardi 19€, moins de 30 ans et demandeurs d’emploi 13€

Théâtre de la Colline

15 rue Malte-Brun
Paris 20e
Réservations : 01 44 62 52 52

 

www.colline.fr

 

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