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Marlène Saldana : “Je passe par toutes les couleurs de l’arc-en-ciel”

© JePik

Rencontre avec une comédienne et danseuse atypique. Elle aime les masques, les costumes, les perruques, le body painting… Bref, c’est une bête de scène qui ne manque pas de projets.

Pouvez-vous nous parler un peu de votre parcours ?

J’ai commencé de manière très classique dans des cours de théâtre pour enfants. Puis, j’ai continué au lycée. En parallèle, je faisais beaucoup d’équitation et je me destinais plutôt à faire carrière dans ce milieu-là. À 19 ans, je suis entrée dans une école de théâtre parrainée par Jean-Pierre Bacri et Agnès Jaoui : la scène sur Saône, à Lyon. Le matin, on avait des cours et, après, on disposait d’une salle de spectacle. On a fait beaucoup de spectacles, peut-être « merdiques », mais on les faisait nous-mêmes !

À Paris, j’ai rencontré beaucoup de personnes très importantes pour moi : Edward Bond, un dramaturge anglais ; Hugo Lagomarsino, créateur de marionnettes et spectacles pour enfants ; Yves-Noël Genod, qui m’a beaucoup apporté dans un genre alternatif, entre théâtre, danse et art contemporain. Dans ce milieu-là, j’ai rencontré Sophie Perez et Xavier Boussiron avec qui j’ai commencé à travailler. Les projets se sont alors enchaînés.

Une petite phrase qui résumerait pourquoi vous faites ce métier ?

Je réponds toujours la même chose et il faudrait peut-être que je change ! Mais je pense toujours à cette phrase de Nietzsche : « L’art nous est donné pour nous empêcher de mourir de la vérité ». Pour moi, c’est tellement ça ! Et je trouve que c’est encore plus vrai aujourd’hui, car dans les périodes de crise, mieux vaut se raccrocher à l’art.

© Damien Meyer

Danse, théâtre…Quel moyen d’expression préférez-vous ? 

Je pense être la même dans toutes les disciplines ; en revanche, ce n’est pas le même plaisir. Après, j’adore danser dans les pièces de Boris Charmatz, surtout pour ce que ça représente. Je n’ai pas une formation de danseuse, alors être avec des interprètes formidables et émérites, c’est comme prendre un mec dans la rue et le faire jouer avec Marlon Brando : c’est génial.

Hier, j’étais au TAP à Poitiers, avec Steven Cohen, à qui quelqu’un a posé un peu la même question. J’ai aimé sa réponse : pour lui, les arts sont comme des flaques d’eau qui se contaminent les unes aux autres et qui font des éclaboussures quand on saute dedans.

Vous jouez des rôles très variés : Staline, Yves Saint Laurent, Louis II de Bavière… Un rôle vous a-t-il plus touchée qu’un autre ?

Touchée ? C’est dur de répondre parce que l’on parle beaucoup plus du théâtre. Alors que Danse de nuit de Boris Charmatz a été pour moi une pièce très gratifiante, dans le sens où, à la fin, je me suis vraiment dit : « Ah ! Là, j’ai fait un truc ». C’était très dur physiquement et mentalement, car ce spectacle parlait des attentats de Charlie Hebdo. Jouer dans la rue, en pleine vague d’attentats djihadistes, avait beaucoup de sens. Après, en terme de rôles, j’adorais jouer Garrett, atteinte de trisomie 21, dans Prélude à l’agonie. J’ai aussi adoré jouer Jacques Demy, dans les Idoles ; Yves Saint Laurent, bien sûr ; Staline : c’était très drôle à faire. Finalement, on trouve quelque chose dans chaque rôle ou pièce…

© JePik

Comment vivez-vous la crise actuelle ?

Attention ! Je ne me plains pas car je sais qu’il y a beaucoup de personnes qui ne bossent pas et qui sont vraiment mal. Mais pour la création, c’est hyper dur. Notre rythme est bouleversé, le temps n’est pas le même, il faut sans cesse tout remanier, tu ne sais pas si tu vas pouvoir jouer, répéter. Et quand les répétitions ont lieu, elles vont vite, alors que la création se fait huit mois après. Quel sera donc le résultat final ?

Sinon, je passe par toutes les couleurs de l’arc-en-ciel ! Je pense évidemment beaucoup à la nouvelle génération, d’autant qu’avec Michaël Phelippeau, Gaëlle Bourges et Jonathan Drillet, on travaille actuellement sur une pièce avec 22 jeunes interprètes. On est au plus près de leurs préoccupations car, déjà, la fin de formation déclenche son lot d’angoisses, la sortie est un saut dans le vide… C’est vraiment dur pour eux !

Un récap des projets à venir ?

Show girl, en septembre, au festival de La Bâtie, à Genève (tournée en cours). Le Ciel de Nantes, de Christophe Honoré, en tournée de novembre à mars et en mars au Théâtre de l’Odéon.

Des spectacles à l’étranger : avec Boris Charmatz, où l’on reprend la Ronde, créée au Grand Palais ; la prochaine pièce du Zerep, 22 castors front contre front (on fait d’ailleurs tout pour qu’elle soit visible à Paris cet été).

Propos recueillis par Victoria Sebastian

À découvrir sur Artistik Rezo :

 Idoles, des histoires d’amour signées Christophe Honoré, d’Hélène Kuttner

 

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