Marko Milic – Series
Ce n’est pas par piques, mais par un fin humour décalé qu’il exprime son rapport au monde. Toutefois, un œil réellement acéré sur l’existence, apparaît dans un travail pétri par l’expérience, les rencontres, et les expositions plastiques, aussi bien contemporaines que classiques, dont il raffole. Serbe, anglophone, notre homme est un nomade. Toujours sur les routes, où le pousse le vent de son inspiration et des contrats fleurissants de sa carrière émergente en voie de reconnaissance.
Pour Series, la création que l’on pourra voir à Vienne, et dont on a pu voir les prémices au festival Uzès Danse, l’été dernier, le thème principal est une interrogation sur le caractère mystique du spectacle et sa réalité conventionnelle. Un solo qui en dit long sur le sens d’être en scène… et son éventuelle perte. Marko, pour l’occasion, sera paré d’un rideau de scène, garni de pompons rouges, devant des chandeliers et des images baroques d’anges joufflus… Le décor est planté, celui du théâtre. Au départ, une série de roulades. Puis un pose lente d’élévation, de dos au public. « Je veux faire réfléchir les gens à ce qu’ils veulent, mais au fait qu’aujourd’hui, la danse est au cœur des regards. Que signifie le fait d’être plongé dans le noir en situation d’observation ?
Par le passé, les spectateurs et les danseurs étaient plus dans une expérience de partage. Au 19ème siècle, progressivement, s’est perdue, au profit de la représentation conventionnelle, la portée mystique du spectacle vivant. J’aimerais, pour ma part, être inspiré par cette dimension spirituelle que nous sommes en train de perdre. » Marko imagine qu’à l’époque du spiritisme, les gens se réunissaient autour du medium, dans le sens d’un acte collectif, où était délivré un message. Tous les êtres présents étaient actifs. De nos jours, ce qui manque à notre danseur et chorégraphe, c’est cet aspect de partage. « Les gens se permettent de juger, avec une facilité déconcertante…Je remarque qu’à force de voir des spectacles, on devient blasé, désabusé. Or, pour apprécier vraiment une pièce, il faut se sentir prêt à la voir en dehors d’un schéma mental de consommation. »
Marko est arrivé en France en 2007 au Performing Arts Forum, à Saint Erme. Il a été frappé par la qualité d’accueil de l’organisation de Jan Ritsema, son éthique, de la présence de Jean-Marc Adolphe, son aide à « sweet and tender collaborations. De belles rencontres ont fait le reste. Alors, heureux d’être en France ? « Oui, pour son accès à la culture, avec le foisonnement d’expositions et le haut niveau des arts. »
Marko a commencé la danse à 20 ans, après le théâtre, la photographie, et des études d’andragogie. « Les cours de psychologie pédagogique m’ont fasciné, pour m’avoir appris, performances à l’appui, des méthodes de thérapie »… De quoi aider les autres, nourri de la connaissance de leurs failles. Car Marko observe, et ce, toujours dans le but d’être utile. Une bienveillance réjouissante. Mais pas naïve. Ne vous fiez pas aux apparences.
Bérengère Alfort
Series de Marko Milic
Festival ImpulsTanz
A Vienne, les 1 et 3 août 2011 à 20h
[Crédit visuel : Rosa Wernecke]
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