Les Arts dans la Rue 2013 – Châtillon
« Collection » de Nathalie Pernette est une suite de six pièces brèves pour trois, voire quatre danseurs qui font bouger le public à travers la ville. A chaque arrêt, les citadins chorégraphiques se jouent des situations qui nous embarrassent dans la vie de tous les jours, aux croisements des autres, dans une métropole contemporaine. Les émotions fondamentales de l’humain se donnent en ballet : joie, peur, colère, tristesse… La vocation de Nathalie Pernette pour l’espace public est née avec une première série de « Miniatures », aussi drôles que poétiques et proposées dans différents endroits d’une même ville. Avec sa « Collection » elle montre qu’elle s’est vraiment prise au jeu. Aussi, les danseurs sont certes chorégraphiés avec soin et précision, mais le public se vit enfin comme un groupe partageant une expérience active. Une telle balade dans les rues, dans un but artistique, est un joli moment de complicité entre spectateurs. Plus joyeux qu’une manif’, plus solidaire que la ruée vers Auchan.
Yann Lheureux vient, lui aussi, pour jouer avec la course effrénée dans la jungle urbaine. Il démontre comment l’homme s’y transforme en animal. Ce qui n’est pas sans évoquer la guérilla urbaine, surtout en version nocturne. Car celui qui court pour se perdre en lui-même, poussée par ses pulsions, est livré à la fois à ses instincts de peur et d’appréhension qu’à sa pulsion d’attaque. Se disperser pour fuir ou se rassembler pour aller de l’avant? Les personnages n’ont pas le temps de réfléchir. D’où une forte dose d’empathie chez le spectateur, d’où ce dialogue avec l’animalité, chez chacun. Ce ballet urbain a été créé en 2010 au festival de Busan en Corée pour ensuite passer en France, en Espagne, en Tunisie, à l’Ile Maurice et à Madagascar, à chaque fois interprété par des danseurs du pays.
Il est plus surprenant de voir Andrea Sitter avec son solo « La Reine s’ennuie » en extérieur. Qu’adviendra de son ironie si fine, de sa grâce, de son jeu avec l’espace, ses fantasmes et des clins d’œil à l’univers du conte de fées ? Pour que sa magie reste intacte, les organisateurs lui ont donc proposé un environnement plus bucolique que le bitume traversé par des danseurs en pleine course. La reine va donc affronter ses souvenirs de l’ours des forêts bavaroises ou du Roi Grenouille dans un environnement digne d’un personnage féerique : un parc.
Et si les sept vieux échappés de leur maison de retraite se ruaient justement dans ce parc? Comme ils ne sont pas des nains, mais des vieux malins, ils pourraient choisir précisément ce lieu pour terminer leur petit déjeuner. Ayant emprunté le raccourci d’une « Issue de secours », les voilà, un brin excités (mais ça se comprend), qui traversent les rues, leurs plateaux-repas dans les bras. Ils rassemblent le public pour l’apostropher an chantant, car ils ont des souvenirs et émotions à revendre. A la fin, leur incroyable énergie culmine dans une évocation de Delacroix et de ’68. Ils peuvent se le permettre, car ils sont authentiques dans tout ce qu’ils font. Leur appel à la révolte change le regard sur les vieux, et c’est bien l’un des buts de ces « Echappées belles ».
Au sein d’un festival des arts de la rue (pardon, il fallait dire : des arts dans la rue), les équipes ont le droit de se croiser. Ca peut arriver puisque le quatre exemples cités ne sont qu’une toute petite partie de la programmation. Le programme complet et le plan par le lien ci-dessous. Bonnes promenades artistiques!
Thomas Hahn
Les arts dans la rue 2013
Rues de Châtillon
Les 21 et 22 septembre 2013
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