Les Amours tragiques de Pyrame et Thisbé – Théâtre de L’Athénée Louis Jouvet
Comment jouait-on les pièces au XVII ème à la Cour du Roi ? Réponse en découvrant ce grand poème baroque de Théophile de Viau, mis en scène par Bejamin Lazar, qui a centré sa mise en scène sur le langage et la gestuelle de l’acteur.
Le metteur en scène, ancien élève d’Eugène Green, a choisi de révéler la dimension démiurgique de la langue de Théophile de Viau. L’interprète redonne ainsi au langage sa toute puissance de création. Dire c’est faire naître : la parole est sacrée. Tout le travail du comédien réside dans ce travail de diction, de sur-articulation pour faire entendre toutes les sonorités du mot, mêmes les lettres muettes. Le mot s’étend, s’enfle et devient tout puissant. Nul n’a besoin de voir la lionne qui effraie Thisbé, elle est là, nommée. Le verbe est enrichi d’une gestuelle codée. Chaque mot a son langage gestuel, redondant. Le geste illustre la parole, il ne la précède pas comme on le voit au théâtre ou dans la vie quotidienne.
Les acteurs jouent face au public, éclairés par le feu des bougies. Deux hommes très discrets apparaissent à chaque scène pour les orienter. Le visage des acteurs brille d’une lumière évoquant le mystère. Cela fonctionne parfaitement car les personnages se cachent pour s’entretenir : les amants comme les parents, le roi et les valets. Chacun ourdit un plan dans l’ombre. Pas de décor, le plateau est noir. Seuls deux lustres, suspendus, soutenant l’apparition du roi, descendent et remontent, tout comme la belle nuit étoilée, décor de la méprise des deux amants.
Une très grande poésie et une extrême sensibilité se dégagent de ce texte grâce aux talents de tous les comédiens. Le jeu très juste de la mère de Pyrame, Alexandra Rübner a d’emblée donné le ton tragique au drame qui allait se dérouler. Benjamin Lazar excelle dans la diction baroque, le comédien est rompu à cet exercice appliqué. La jeune Thisbé incarnée avec douceur et sensualité par Louise Moaty, émeut par sa détermination. Avec force, elle revendique sa liberté et repousse les ardeurs du roi (Nicolas Vial). Le comédien est magnifique dans sa colère terrible et sa jalousie. Les envolées lyriques d’Anne-Guersande Ledoux ont saisi toute la salle.
Un travail magnifique à découvrir avant le 12 juin à l’Athénée.
Marie Torrès
Les Amours tragiques de Pyrame et Thisbé
Texte de Théophile de Viau
Mise en scène de Benjamin Lazar
Du 27 mai au 12 juin 2010
Réservations : 01.53.05.19.19
Théâtre Louis-Jouvet , Athénée
Square de l’Opéra Louis-Jouvet
7 rue Boudreau
M° Opéra ou Havre-Caumartin
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