Ballet: L’entrée au répertoire d’Onéguine à Garnier
John Cranko est ce chorégraphe d’origine sud-africaine qui a marqué le vingtième siècle danse par ses livrets mais aussi par sa faculté à persévérer dans la lignée du « ballet d’action » de Jean-Georges Noverre, avec un ballet pour le moins « théâtral ». Onéguine est la troisième pièce de John Cranko que l’Opéra national de Paris décide de consacrer en l’intégrant à l’histoire d’un répertoire.
Sur un assortiment d’airs choisis de Piotr Ilyitch Tchaikovski, ce ballet nous ramène avec ferveur à la profondeur déployée par Alexandre Pouchkine dans son roman phare, Eugène Onéguine. Très nettement inspiré par ce bijou de littérature, Onéguine est un ballet qui retranscrit dans une énergie classique et puissante des corps, toute la fulgurance de drames passionnels sur lesquels vient rôder le tragique d’une histoire d’amour qui se prolonge à mesure qu’elle se manque.
Le décor luxueux et les costumes légers pensés par Jürgen Rose, parviennent ensemble pour apporter au ballet la douceur d’une poétique qui donne vie à la haute société russe racontée par Alexandre Pouchkine. On s’émerveille en particulier de coiffures grâce auxquelles de petites perles, s’entrechoquant dans la finesse de sourds cliquetis, offrent aux danseuses de mêler la musicalité de leurs pas-de-deux à celle donnée en majeure par l’orchestre.
Ce ballet retrace la sombre évolution de son danseur éponyme, d’un Onéguine toujours en noir, pénétrant d’une envergure majestueuse et glaciale. Dans le premier acte, il se pose en dandy inconséquent qui sème le malheur tout autour de lui. Il est d’abord ce dandy désabusé et peut-être joueur, capable d’éconduire sa belle pour une autre déjà convoitée, et ce jusqu’à provoquer un duel. Malheureux gagnant, ce duel le contraint à l’exil. Dix ans plus tard c’est un Onéguine vieilli, réfléchi et peut-être même repu de langueur qui revient fréquenter les bals de Saint-Pétersbourg pour y retrouver sa première conquête, désormais engagée et en proie à ses devoirs d’épouse… Alternance d’ensembles et de duos, les danseurs de l’Opéra nous proposent de vivre la douloureuse histoire de ces destinées manquées. Si la virtuosité des interprètes ne peut être remise en question, elle parvient surtout dans l’intensité du troisième acte, et explose dans la teneur tragique d’un duo d’amour final.
On peut certes regretter que le pendant ultra-théâtral de la représentation lui confère un aspect désuet qui ôte au drame incarné, et son caractère atemporel, et sa faculté d’aboutir en émotions vraies. Il reste que sans parvenir jusqu’à notre contemporanéité, ce ballet volontairement théâtral et mélodramatique nous raconte une bien belle histoire, et d’une bien jolie manière. Une entrée respectable donc au panthéon des ballets classiques, pour cet Onéguine de John Cranko.
Christine Sanchez
Chorégraphie et mise en scène : John Cranko
Avec les Etoiles, les Premiers Danseurs, et le Corps de Ballet
Jusqu’au 20 mai 2009
Les 16, 18, 21, 22, 24 et 30 avril à 19h30.
Le 3 mai à 14h30.
Les 4, 6, 7, 11, 12, 14, 15, 18, 19 et 20 mai à 19h30.
Location :
-par téléphone au 08 92 89 90 90
-par internet : www.operadeparis.fr
-aux guichets : Palais Garnier ou Opéra Bastille, tous les jours entre 10h30 et 18h30 à l’exception des dimanches et jours fériés.
Tarif : de 6 à 89 euros.
Palais Garnier
1, Place de l’Opéra
Paris IX – Métro Opéra
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