“L’Ecole des femmes”, farce musicale pour tous publics
Au Théâtre Déjazet, l’acteur Nicolas Rigas met en scène une joyeuse troupe de comédiens, chanteurs, musiciens et acrobates pour jouer la comédie de Molière assaisonnée des plus célèbres chansons des « Contes d’Hoffmann » d’Offenbach. Un délicieux mélange ironique et caustique, pour tous publics, rendu vivant grâce au talent et à l’énergie des interprètes.
Comment épouser une sotte ?
Dans la leçon qu’Arnolphe (Nicolas Rigas) prodigue à son ami Chrysalde (Salvaore Ingoglia) sur le petit banc devant la maison qui protège Agnès du regard public, il s’agit bien, pour l’homme infatué et bouffi d’angoisse qu’il est, de faire le projet d’épouser sa protégée, une jeune fille qu’il a élevée depuis sa petite enfance comme un père adoptif. A l’abri du monde, gardée par deux énergumènes, des paysans rustres et obéissants incarnés par les cascadeurs Romain Canonne et Jean Adrien, en robe de toile et fichu sur la tête, qui s’envoient des beignes avec l’énergie de catcheurs, jaillissant dans les airs en faisant la grande roue comme si de rien n’était avec une malice fabuleuse.
Galipettes et farce philosophique
Ce mélange des genres, sur un texte intégral remarquablement incarné et clair, qui mêle les acrobaties des deux paysans au verbiage pompeux et ridicule d’Arnolphe, les sorties croustillantes d’Agnès dans sa robe de communiante (Antonine Bacquet ou Amélie Tati) et les chansons d’Offenbach très bien interprétées, alors que trois musiciens, un violoniste, un violoncelliste et une flûtiste jouent dans une loge de côté, participe avec un grand bonheur à la réussite de ce spectacle. Le décor du Théâtre du Petit Monde est simple à souhait, mais il n’en faut pas plus, un escalier, une porte-fenêtre, deux orangers, et une belle lumière pour dessiner l’univers codifié d’Arnolphe qui va se trouver totalement bouleversé par l’irruption du bel Horace, auquel Martin Loizillon prête son physique de jeune premier frais et dispos.
Un spectacle d’une clarté lumineuse
Du coup, la fraîcheur et la vérité d’Agnès, la vantardise maladroite d’Arnolphe, la malice d’Horace et la bêtise d’Alain et Georgette deviennent des données évidentes pour comprendre la pièce et le propos de son auteur, Molière, dans la défense des femmes que l’on modelait à l’époque comme des poupées. Les scènes s’enchaînent de manière cocasse, le texte s’offre avec une vraie liberté, les corps en mouvement épousent le tempo de la comédie italienne, vive et enlevée, alors que le public, à tous âges, peut saisir cette pièce provocante et ironique, riche, drôle et hallucinante de folie. La musique et les chansons insufflent au tout un agréable et harmonieux vent de fantaisie et de légèreté. Un régal.
Hélène Kuttner
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