Le Journal d’Anne Frank – Théâtre Rive Gauche
Quelle bonne idée d’avoir confié à Éric-Emmanuel Schmitt — à l’issue d’une consultation mondiale organisée par le Fonds Anne Frank — la nouvelle adaptation de ce célèbre et bouleversant ouvrage ! Parce que c’est aussi un hymne à la vie, il nous en propose une reconstruction particulièrement habile et vivante.
La pièce débute. Otto Frank, le père d’Anne, vient de découvrir qu’elle ne reviendrait jamais du camp de Bergen-Belsen. Il a pour la première fois entre les mains le journal de sa fille. Rappelons au passage que, seul survivant de la famille, il sera à l’origine de la publication de cette œuvre. Dans son bureau, calé côté cour et excentré par rapport à la scène, il a d’abord du mal l’ouvrir, tant les souvenirs sont douloureux. Puis il commence à en prendre connaissance. Le plateau s’anime alors, redonnant vie aux protagonistes de cette histoire. Tout le petit monde d’Anne est là : ses parents bien sûr, sa sœur Margot, les van Daan et leur fils Peter dont Anne tombera amoureuse, mais aussi la fidèle secrétaire de son père qui les a tant aidés. Hormis cette dernière, tous vivent cachés, parce qu’ils sont juifs, dans un appartement clandestin niché au sein de l’annexe de l’entreprise d’Otto Frank, à Amsterdam alors sous occupation nazie. De multiples aller-retours dans le temps, nous permettront ensuite de les accompagner dans leur vie quotidienne, de 1942 à 1944, via des scènes dialoguées et autres monologues fidèles au texte du journal.
Nous passerons alors sans relâche du présent tragique d’un père — qui redécouvre pourtant avec surprise, tendresse et ravissement sa fille — au passé vivant, au fond dramatique certes, mais coloré par la plume d’Ann, tour à tour insolente, candide, aimante ou amoureuse et toujours brillante. Ce va-et-vient aurait pu être fastidieux… sans la magnifique mise en scène de Steve Suissa ! Elle nous permet de passer avec fluidité d’une scène poignante à une autre, amusante, charmante ou encore attendrissante. Par moments, on se croirait presque au cinéma, tant les plans, courts dans l’ensemble, s’enchaînent et nous transportent aisément d’une époque à une autre, d’un endroit à un autre, d’une ambiance à une autre.
La distribution possède la même haute tenue. Francis Huster investit son personnage avec une intensité remarquable. Naturel, vibrant d’émotion, il nous tire bien des larmes. Roxane Duran (que l’on a pu découvrir dans Le Ruban blanc d’Haneke) est totalement convaincante dans le rôle d’Anne Frank. Elle restitue à merveille sa fraîcheur, sa joie de vivre comme sa perspicacité et son caractère bien trempé. A leurs côtés, Yann Babilee Keogh, Odile Cohen, Yann Goven, Charlotte Kady, Katia Miran, Bertrand Usclat et Gaia Weiss sont également impeccables.
Le plaisir du théâtre étant au rendez-vous, je vous conseille vivement ce spectacle auquel vous seriez bien avisés d’emmener vos jeunes. Ils découvriront, ou redécouvriront, un texte chargé d’Histoire autrement qu’à l’école, de façon extrêmement vivante, et qui leur parlera vraiment.
Caroline Fabre
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Le Journal d’Anne Frank
Une pièce de Eric-Emmanuel Schmitt
D’après Le Journal d’Anne Frank
Mise en scène de Steve Suissa
Avec par ordre d’entrée en scène : Francis Huster, Gaïa Weiss, Roxane Duran, Odile Cohen, Katia Miran, Charlotte Kady, Yann Babilee Keogh, Bertrand Usclat et Yann Goven
Décors : Stéfanie Jarre // Costumes : Sylvie Pensa // Lumières : Jérôme Almeras // Son : Alexandre Lessertisseur // Casting : Agathe Hassenforder
Depuis le 5 septembre 2012 au 31 mars 2013
Du mardi au samedi 21h
Le samedi à 15h30
Le dimanche à 15h
Théâtre Rive Gauche
6, rue de la Gaité
75014 Paris
M° Edgar Quinet
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[Crédit visuel du bas : Le Journal d’Anne Frank d’Eric Emmanuel Schmitt. Photo Lot]
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