Le Jour de l’Italienne – Théâtre 13
Le jour de l’Italienne retrace les étapes les plus importantes de la création d’un spectacle sur une période de deux mois, compilée en une heure et dix minutes. Grâce à un intelligent travail d’ellipse, on navigue entre les lectures, les essayages costumes, les essais lumières, les coups de gueules du metteur en scène, les lectures « sans le texte », les coups de blues des comédiens, pour arriver à la répétition générale avant le jour J. Cette joyeuse troupe est en train de monter L’Épreuve de Marivaux. Ce qui insuffle l’esprit de l’œuvre travaillée aux comédiens et donne place à un véritable théâtre de la vie où se mêle jalousie, amour, peurs et espoir. Comment gérer ses émotions lorsque l’on travaille avec ? Au-delà d’une occasion de rire, cette pièce soulève aussi des questions sur le métier de comédien lui-même. Comment considérer cette période de répétition, où les âmes sont mises à rude épreuve ? Comment ne pas considérer que la répétition est un travail en lui-même nécessitant de véritables investissements en termes de temps, d’esprit et d’énergie. Un questionnement pertinent sur la paupérisation du statut d’artiste, où l’envers du décor constitue les trois quarts du travail. Une pièce qui réconcilie art et artisanat.
La scénographie est en perpétuelle évolution. Suivant le travail des comédiens sur la pièce, le décor est le reflet de l’accomplissement du travail d’inteprétation. Au départ, la scène est dépouillée de tout artifice avec une table et quelques chaises. Les rouages du théâtre étant laissés à la vue de tous, nous plongeant ainsi dans les vraies coulisses du théâtre et évitant le pastiche. Puis au fur et à mesure, les lumières se font plus sophistiquées, des éléments de la pièce de Marivaux s’intègrent au décor sans que l’on s’en aperçoive. A la toute fin, on est immergé dans le décor de L’Epreuve.
Le jeu et la mise en scène sont précis, les effets de brouhaha devant paraître plus vrais que nature tant les séances de répétitions doivent être difficile à gérer. Le metteur en scène, interprétée par Sophie Carpentier, dont la prestation est parfaite, est situé dans le public comme pour nous inclure plus facilement dans la séance de travail. Elle intervient fréquemment, nous invitant à suivre son point de vue contre celui des comédiens. C’est elle qui rythme le spectacle, gère les égocentrismes ou les lumières. Tel un maestro, dirigeant ses violonistes, Sophie Lecarpentier, nous permet le temps d’une heure, de nous faire découvrir et nous faire partager les turpitudes du métier de metteur en scène. On y découvre aussi son importance fondamentale et rend donc hommage au seul protagoniste qui n’apparaît pas sur la scène. Le tout sans se prendre au sérieux, puisqu’elle ponctue la pièce par des indications de jeu absolument ahurissantes faites de non sens et de contraires : un vrai petit régal.
La troupe est vraiment attachante notamment grâce à ce style de jeu direct et parlé. Chaque personnage de cette pièce vient sur le coté de la scène nous expliquer comment il voit le rôle qu’on lui a donné. Ce qui permet de faire apparaître, avec une dose de cynisme truculent, le vrai caractère du comédien, fait de narcissisme, d’humour mais aussi d’une réelle envie de partager. Les comédiens font une véritable performance en arrivant à rendre crédible leur jeu dans Le Jour de l’italienne et dans l’Épreuve de Marivaux. Ils auraient pu être tenté de stigmatiser un des deux afin de ne pas troubler le public mais le parti pris fonctionne et apporte à la pièce une crédibilité inespérée. Cette troupe est formée d’inteprètes de talent parmi lesquels : Emmanuel Noblet, Xavier Clion, Alix Poisson on encore Julien Saada qui se détachent clairement par leur justesse et leur drôlerie.
Une répet’ vraiment réussie, un moment pédagogique et drôle.
Mathieu Metral
Le jour de l’Italienne
Du 28 Avril au 7 Juin 2009
Plein tarif : 22 euros // Tarif réduit : 15 euros
Durée : 1h20
Théâtre 13
103A, boulebard Auguste Blanqui
75013 Paris
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