Le Jardin Saint Aubin, “un théâtre de poche à ciel ouvert” aux portes du Perche
Le Jardin Saint Aubin se transforme en théâtre de poche à ciel ouvert de juin à septembre 2021 ; Annie Yver, sa directrice artistique, nous raconte son parcours, son lieu de spectacle ainsi que les artistes programmés pour cette édition.
Pouvez-vous vous présenter ? Quel est votre rôle au jardin Saint Aubin ?
Je suis Annie Yver, je suis la directrice artistique du Jardin Saint Aubin. Je développe une programmation sur l’été, je fais la communication et je recherche les artistes. Je les connais pour la plupart, ils ne sont pas là par hasard : ce sont des coups de cœur, des choix ! Mon mari, lui, s’occupe de l’environnement artistique, notamment à travers les aspects techniques : la régie et la sonorisation. Je suis aussi comédienne et chanteuse dans un groupe qui s’appelle les MikMak Sisters. Nous avons un petit jardin dans lequel nous proposons des spectacles éclectiques : chanson française, musique classique, poésie rock, chanson anglo-saxonne, théâtre-danse, musique jazz…
Quel est votre parcours professionnel ?
J’ai été enseignante très jeune après avoir fait l’École Normale. J’étais passionnée par la pédagogie. En parallèle, je me suis beaucoup intéressée à tout ce qui est culturel dont la danse contemporaine ; je chantais aussi avec quelques groupes, puis j’ai développé des ateliers de pratiques artistiques pour des enfants. Au bout d’une quinzaine d’années j’ai eu l’impression d’avoir fait le tour du métier d’enseignante, j’ai donc quitté l’éducation nationale. Je suis rentrée au Ministère de la Jeunesse et des Sports où j’avais plusieurs rôles dans les pratiques et projets culturels. Je m’investissais de plus en plus personnellement dans un groupe de chanteuses, comédiennes qui commençait déjà à devenir professionnel : les Têtes à claques. Avec ce groupe, nous sommes parties trois années de suite à Avignon présenter notre spectacle. Nous avons joué partout en France et dans les pays limitrophes. Pendant presque 15 ans, nous avons chanté, joué et nous avons fait environ 300 représentations. C’était assez énorme !
Puis, j’ai quitté le Ministère et je suis devenue intermittente du spectacle. On ne devient pas intermittente du spectacle facilement, il faut avoir un certain parcours, c’était mon cas. J’ai pris des cours de pratique culturelle au théâtre d’Alençon et ensuite j’ai rejoint une école de chant à Paris.
Mon mari et moi sommes allés vivre à Mortagne-au-Perche. Nous avons développé un lieu culturel, le Jardin Propice. Ce lieu proposait des ateliers de chant, des spectacles variés, allant du théâtre à la danse contemporaine. Un lieu d’accueil était ouvert aux résidences d’artistes.
Nous avons quitté ce lieu pour aller aux portes du Perche, c’est comme cela qu’est né le Jardin Saint Aubin, où j’ai développé et créé un autre groupe de femmes : nous sommes trois, nous chantons et nous jouons. Notre second spectacle est présenté cette année au Jardin Saint Aubin : les MikMak Sisters Saison 2 !
Pouvez-vous nous parler de votre lieu de spectacle, le Jardin Saint-Aubin ?
Le Jardin Saint Aubin est un projet personnel, c’est notre jardin ! Nous le transformons en théâtre de poche à ciel ouvert. Le lieu est petit, nous ne pouvons pas accueillir plus de 50 personnes, mais c’est déjà pas mal ! Nous avons investi dans une vraie scène ; même si elle n’est pas très grande – 3 mètres sur 3, cela permet d’accueillir des spectacles de petites formes, avec un maximum de 3 artistes.
Votre programmation est plutôt éclectique, comment choisissez-vous les artistes qui viennent jouer sur votre scène ?
Le Jardin Saint Aubin accueille des spectacles très variés ; pour les MikMak Sisters c’était simple, j’en fais partie.
Le Duo Seigle, ce sont deux frères, l’un est violoniste et l’autre violoncelliste. Je suis allée voir leur concert plusieurs fois. Je me suis dit “quelle qualité”, et en plus, ils sont très sympas. C’est important parce que nous ne voulons que des relations simples, saines avec des gens qui ne se prennent pas la tête et qui proposent un travail très pro. Ce sont des grands professionnels.
Le samedi 10 juillet, Nicolas Jules, chanteur et guitariste est venu jouer. Nous étions à Granville avec mon mari, nous l’avons découvert sur scène complétement par hasard. Cela a été une révélation ! J’ai pris contact avec lui, je lui ai proposé de venir jouer au Jardin Saint Aubin. Il a accepté sachant que la jauge serait de 50 personnes maximum. Tous les gens présents étaient ravis. C’est vraiment un artiste hors du commun qu’on ne rencontre pas sur les ondes ni à la télé mais qui a un talent extraordinaire.
Once in a Blue Moon est un duo, ce sont des copains. Elisa Fiasca est au chant accompagnée de David Comenchal à la guitare. Ils joueront le vendredi 6 août à 19h des ballades anglo-saxonnes de blues. Elisa Fiasca chante partout dans le Perche, presque toutes les semaines, si on veut l’entendre, c’est facile !
La Compagnie Résonances viendra jouer le samedi 20 août à 19h. C’est un duo, elle est danseuse contemporaine et comédienne et lui est comédien. Ils ont créé un spectacle sur un sujet difficile : la rafle du Vel d’hiv (Vélodrome d’Hiver). Quand je commençais à faire la programmation, ils l’ont su et ils se sont positionnés pour venir jouer. Au départ je n’étais pas emballée par le thème, mais j’ai appris que le texte avait été écrit par un Mamertain, et nous sommes à 5 km de Mamers. C’est bien aussi de valoriser les auteurs de la région.
Céline Bonacina est saxophoniste (baryton). Son talent est reconnu internationalement. Elle a joué dans tous les grands festivals de jazz. Étant très sollicitée sur les festivals, elle nous fait l’amitié de venir jouer au Jardin Saint Aubin avec un autre artiste clarinettiste le dimanche 5 septembre à 16h. On peut l’entendre un peu partout, par exemple sur France Musique. Ce ne sera pas un mini concert, ce sera un beau concert dans un endroit tout petit.
C’est beaucoup de travail de faire venir les gens dans un trou paumé ! Je n’ai pas de problème pour recruter les artistes. Je sais ce qui peut plaire au public et je veux des spectacles de qualité. Dans le Perche, nous avons beau être en pleine campagne, il y a énormément d’offres culturelles, peut-être plus que du côté d’Alençon.
Quels sont les projets qui vous tiennent à cœur ?
Nous passons notre temps entre Granville et le Perche. J’ai le projet de développer à Granville un lieu de diffusion culturelle, avec entre autres des expositions. Je suis à la recherche d’un lieu fermé, ce qui n’est pas simple. Granville est maintenant une station balnéaire où il est très difficile de trouver du bâti car tout a été vendu après les confinements. Les gens se sont rués soit en campagne soit en bord de mer, il n’y a plus rien ! C’est aussi ce qui m’a décidé de programmer des spectacles dans notre jardin.
De juin à septembre, nous diffusons deux spectacles par mois, c’est riche ! Cela me semblerait intéressant de proposer quelque chose sur un week-end. À suivre…
Avez-vous entrepris quelque chose culturellement pendant le confinement ?
Pendant le premier confinement, non. J’avoue que, pour moi, cela a été un arrêt brutal, je ne pensais pas que cela allait autant m’atteindre. Nous étions en pleine création du nouveau spectacle avec les MikMak Sisters. J’ai passé mon temps à cuisiner. Ce qui n’a rien à voir avec l’artistique et le culturel mais c’est créatif. C’était difficile. Il fallait vraiment que j’aboutisse à quelque chose après toute cette période, j’en avais besoin. Ma vie sans la culture et sans le milieu artistique ne veut rien dire.
Propos recueillis par Zoé Lavanant
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