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Le festival d’Avignon, un gage d’avenir pour les pièces.

29 avril 2009
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Valérie Bruneau est chargée de diffusion pour la pièce Dialogue d’un chien avec son maître sur la nécessité de mordre ses amis, créée au Théâtre national de la communauté française de Belgique en novembre 2007. Entretien avec elle.

 

Le ministère de la communauté française (ndlr : équivalent du ministère de la culture en France) a acheté il y a quelques années le théâtre des Doms à Avignon, dirigé par Philippe Gromteer. En 2007, Philippe Gromteer est venu trois semaines à Bruxelles faire sa programmation pour Avignon, il a vu la pièce et a invité la troupe pour 2008.

Au festival, la pièce a rencontré un succès fou : on refusait du monde à l’entrée. En tant que chargée de diffusion, je contactais les programmateurs, qui étaient dix, vingt, trente tous les jours !

Grâce à Avignon, la pièce fait une soixantaine de dates en Belgique en 2009, mais elle va surtout tourner dans toute la France, jusqu’au mois de mai 2010. On sait d’ores et déjà que la tournée sera prolongée et c’est grâce à l’impact formidable du festival qui nous a permis d’accéder à la France.

Avignon est LE lieu de rencontre de tous les programmateurs. Le bouche à oreille y fonctionne fort. Il faut savoir que des petites communes nous font aussi venir. Par exemple, dans la région de Caen, l’ODACC (l’Office Départemental d’Action Culturelle du Calvados) nous a programmés dans sept petits lieux. Le festival nous permet donc d’être vus par un public extrêmement large, des scènes nationales aux endroits les plus petits.

 

Le festival off d’Avignon représente donc une opportunité unique pour les pièces de s’exporter. Il leur donne une visibilité exceptionnelle puisque tout le métier est présent pour dégoter la « pépite ». Lorsqu’une pièce est repérée, on peut être certain de la retrouver pendant un long moment après, et dans des lieux prestigieux. Dialogue d’un chien avec son maître sur la nécessité de mordre ses amis s’installera d’ailleurs au théâtre du Rond Point en 2010.

 

Comment les acteurs voient-ils le festival d’Avignon, à la fois pourleur carrière personnelle et pour le futur de leur pièce? Fabrice Schillaci interprète le chien  et Philippe Jeusette joue le maître dans la pièce.

Que représente le festival d’Avignon pour vous ?

Fabrice Schillaci : Le festival d’Avignon est une super fête du théâtre qui offre la possibilité de vendre un spectacle. Mais il est dommage qu’il n’y ait plus aucune réglementation dans le off, qui a un peu perdu de son âme.

Philippe Jeusette : Le festival d’Avignon est une aventure. Je l’ai fait en in et en off. Grâce au festival, un spectacle peut vivre très longtemps. Le nôtre a été vu par environ trois cent soixante programmateurs. Le festival offre donc une visibilité incomparable  aux pièces.

 

Quelle est la différence entre le festival in et le festival off ?

Philippe Jeusette : Dans le festival off, on voit n’importe quoi alors que le in ne propose qu’une sélection restreinte. Mais nous avons joué notre pièce dans un lieu qui propose presque du in : le théâtre des Doms. Le public et les professionnels le savent. Il y a donc une sélection possible dans le off par les lieux.

 

Avignon a-t-il un charme spécial pour vous ?

Fabrice Schillaci : C’est incroyable de voir autant de spectacles dans une si petite ville. En tant que spectateur , je trouve que le festival in a plus de charme que le off parce qu’il y a beaucoup d’illusions perdues dans le off. Certaines compagnies se ruinent pour y être et ne récoltent pas les fruits de leur investissement. Il faut une infrastructure d’accueil sérieuse qui répond de la qualité des pièces. Mais le charme réside surtout dans la concentration qui est magique.

Philippe Jeusette : C’est LA grande foire du théâtre avec le festival d’Edimbourg. On peut comparer le festival d’Avignon au Tour de France pour les cyclistes. Je reste toujours fasciné par la motivation du public, qui vient en famille et qui assiste à un nombre incroyable de pièces pendant les deux semaines du festival, qui ne sont parfois que leurs deux seules semaines de vacances pour l’été.

 

Retrouvez-vous ce charme dans le Festival de la Jeune Création Contemporaine ?

Fabrice Schillaci : J’ai eu une participation active à ce festival (dans la présentation du festival, dans des master class…). On est très bien accueillis ; l’ambiance est chaleureuse.

Philippe Jeusette : Je n’ai pas vraiment pris part au festival. Comme j’habite en Belgique, je ne suis venu que pour notre représentation. Mais on reconnaît ici l’esprit festival, le public est chaleureux et il y a une ambiance spéciale, unique.

 

Le festival de la Jeune Création Contemporaine permet de présenter les pièces du festival off d’Avignon au public parisien avant leur programmation dans des salles plus fréquentées. Initiatrice du Festival de la Jeune Création Contemporaine, Nathalie Juvet est la directrice artistique de la compagnie Pour l’Instant, comédienne, metteuse en scène et enseignante.
Elle a eu l’opportunité, grâce à sa carrière d’actrice, d’acquérir une expérience professionnelle qui lui a permis de développer une ligne artistique exigeante et originale à travers ses propres projets.

 

Qu’est-ce qui vous a amené à créer le Festival de la Jeune Création Contemporaine ?

Il y cinq ans, en accompagnant des pièces au festival d’Avignon, je voyais plein de spectacle d’une qualité exceptionnelle, et j’avais envie qu’une population étrangère à Avignon les découvre.

 

Avez-vous rencontré beaucoup de difficultés pour créer ce festival ? Quelles ont été vos démarches ?

Oui. J’ai démarché auprès de responsables de la culture à Saint-Cloud (92), dans un premier temps, et j’ai proposé trois spectacles pour commencer. J’ai trouvé les moyens de mobiliser le public pour des choses qui lui étaient encore inconnues et pour le théâtre contemporain.

 

Justement, comment avez-vous séduit le public ?

Je l’ai séduit par une politique de grand renseignement sur les spectacles. J’ai commencé par en parler aux proches, avant de convaincre les autres. Au début, je suis allée les chercher un par un et j’ai fait un travail d’information, je les ai conseillés.

 

Comment choisissez-vous les pièces ?

Je me rends au festival off d’Avignon et je vois entre quatre et sept pièces par jour.
Il y a un journal, le Journal du off, qui nous informe sur tout le travail des compagnies, qu’on peut apercevoir notamment grâce aux photos. Je l’épluche consciencieusement pour connaître leur travail.
J’écoute aussi beaucoup ce qui se dit dans les files d’attentes pour savoir si je vais être attirée. Sinon, je fonctionne pas mal à l’instinct et beaucoup au « pif ». On sait un peu ce qu’on cherche à l’avance, mais il y a des tas de surprises.

 

Avec qui traitez-vous pour « exporter » les pièces ?

Les pièces qui sont jouées en Avignon ne viennent pas d’Avignon. On traite avec l’administrateur, aussi nommé le diffuseur, de la troupe. Mais, par exemple, pour la pièce Dialogue d’un chien avec son maître sur la nécessité de mordre ses amis, j’ai insisté auprès d’un acteur qui a convaincu la troupe.

 

La concurrence est-elle rude pour l’obtention des pièces ?

Oui, mais nous ne rencontrons pas trop de problèmes parce que nous présentons les pièces en avant première par rapport aux autres programmateurs (ndlr : les programmateurs prennent les pièces pour la saison suivante, c’est-à-dire environ deux ans après le festival, alors que le Festival de la Jeune Création Contemporaine a lieu au printemps suivant le festival).

 

Comment concluriez-vous sur le festival off d’Avignon ?
Avignon est un formidable marché mondial. Les compagnies font beaucoup d’efforts, notamment sur le plan financier, pour se montrer et ont souvent peu de retours. Nous permettons aux pièces de perdurer au-delà du festival.

 

Propos recueillis par Claire BARROIS

 

Dialogue d’un chien avec son maître sur la nécessité de mordre ses amis.

De Jean-Marie Piemme
Mise en scène de Philippe Sireuil
Avec Philippe Jeusette, Fabrice Schillaci

 

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