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Le Canard sauvage – La Colline

16 janvier 2014
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Le Canard sauvage - La Colline

Le Canard sauvage

De Henrik Ibsen

Adaptation, mise en scène et scénographie de Stéphane Braunschweig

Avec Suzanne Aubert, Christophe Brault, Rodolphe Congé, Claude Duparfait, Luce Mouchel, Charlie Nelson, Thierry Paret, Chloé Réjon et la participation de Jean-Marie Winling

Du 10 janvier au 15 février 2014
Du mercredi au samedi à 20h30
Le mardi à 19h30
Le dimanche à 15h30

Tarifs : de 14 à 29 euros

Réservation par téléphone :
01.44.62.52.52

Durée : 2h45

La Colline
15, rue Malte-Brun
75020 Paris
M° Gambetta

www.colline.fr

Du 10 janvier au 15 février 2014

Perclus d’une morale austère, ce drame d’Ibsen peine à trouver un écho contemporain malgré une scénographie et une adaptation orientées vers des tonalités psychologiques.

La volonté du metteur en scène Stéphane Braunschweig de proposer un registre freudien apparaît d’emblée, notamment à travers le traitement de la figure du père. Celui-ci, nommé Werle, n’est pas sur scène mais il a été filmé et c’est par l’image gigantesque de la vidéo qu’il s’adresse à son fils assis sur scène et semblant minuscule devant cette stature écrasante. A partir de ce père dominant se déroule toute la pièce. A la tête d’une grande entreprise forestière de Norvège, il a dans le passé été soupçonné de malversation mais a échappé à une condamnation, contrairement au vieil Ekdal. Celui-ci, qui vit chez son fils, entretient avec son ancien employeur une étrange relation qui lui rapporte un peu d’argent. Werle, qui continue à le payer, a-t-il donc une dette envers lui ? La question devient encore plus inquiétante, quand les proches découvrent que Werle s’engage aussi à verser une pension à Hedvig, la petite fille de Ekdal. Les lignes majeures des ressorts psychologiques se dévoilent petit à petit. Car on le sait, les soutiens financiers sont quelquefois teintés d’une sensation de faute à racheter. Les sentiments se payent, certaines amours laissent derrière elles des créances ou des obligations. Et les donneurs souvent se déchargent d’une culpabilité. Derrière ces arrangements, l’adolescente Helvig prend une place grandissante et dramatique, car l’identité de son père est remise en question.

Mais même si ces traits sont bien dégagés, ils ne suffisent pas aujourd’hui à poser un enjeu théâtral sur la durée. L’auteur norvégien Ibsen né en 1828 et mort en 1906 oppose dans cette affaire deux visions, celle d’un idéaliste qui veut que toute la vérité soit dévoilée, quitte à faire des sacrifices sur fond religieux, et celle d’un pragmatique partisan d’accommodements propices à protéger les uns et les autres et leur bien-être. Le propos de la morale rigide apparentée au protestantisme est tenu par Claude Duparfait, dans le rôle de Gregers. Nerveux et affecté, intransigeant et torturé, il développe son obsession de transparence et de pureté à travers un jeu compassé et une démarche nouée. A ses côtés, Chloé Réjon en Gina et Rodophe Congé en Hjalmar composent un couple à l’image de la mise en scène, tantôt penchant vers un mélodrame désuet dont on ne sait s’il faut rire franchement, tantôt enclin à un registre de monotonie bourgeoise lassante pour qui la regarde. C’est en quelque sorte l’ensemble qui est serré dans cette ambiance ambigüe. Certains apprécieront son caractère strict, d’autres respireront lors de quelques percées comiques. Le décor est conçu également sur une double image. Pour représenter la maison, un énorme caisson de structure en bois est posé sur la scène et enferme lourdement la cellule familiale. Inversement, la paroi de fond s’ouvre parfois sur la forêt et alors une perspective de nature invite à la liberté. Entre la sévérité d’un naturalisme désuet et des dégagements sur la grandeur de la forêt qui appelle à la délivrance, cet univers souffre d’un carcan inhérent à la pièce. Ibsen fait peser sur elle ce qui lui fut souvent reproché, à savoir une hésitation entre conservatisme et modernité. Les adeptes d’Ibsen trouveront néanmoins dans cette scénographie soignée une étrange rigueur traversée par la fraicheur de l’adolescente, qui peut plaire et absorber en profondeur.

Isabelle Bournat

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