Le bel indifférent, c’est l’histoire d’une femme, rongée par la solitude, abîmée par sa vie, rejetée dans son couple. C’est l’histoire d’une femme qui, lassée de subir, trouve le courage d’enfin oser dire à celui qu’elle aime ce qui la ronge depuis si longtemps.
Un discours amoureux, un monologue coléreux qui fait du spectateur un témoin bien malgré lui de cette tragédie de la jalousie. Ecorchée vive, elle passe du rire aux larmes, de la colère à la tristesse, de la détermination à l’indécision. Comment faire pour attirer l’attention de celui qu’elle aime ? Jusqu’où s’épuiser pour n’obtenir de lui qu’un peu d’empathie ?
Derrière cette tragédie du couple, Cocteau s’en prend en réalité à la solitude, celle d’une femme en mal d’amour. Dans cette métaphore du monde où le bel indifférent n’est pas seulement cet homme, mais le reflet d’une société où l’incommunicabilité règne en maître, le couple sert ici de prétexte à une forme symptomatique d’isolement.
Un thème largement exploité par la Charlotte de Jehan-Rictus, qui s’inscrit comme un prolongement
cohérent et mesuré du Bel indifférent. Dans cet autre monologue, une pauvre femme pousse la chansonnette dans un argot daté. Une complainte désespérée sur l’indifférence du chaland, l’apathie du reste du monde.
C’est Edith Piaf qui, à l’époque, avait incarné avec succès l’héroïne de Cocteau. Si Catherine Berriane n’a pas la réputation de Piaf, l’actrice n’en est pas moins talentueuse. Charismatique et émouvante, elle restitue avec force et justesse les subtilités de ces deux textes complexes. En digne interprète, elle transmet tout le tragique de ses personnages et joue parfaitement avec ses émotions. Divine Catherine dont la beauté du jeu sonne comme un hommage aux textes de Cocteau et Rictus.
Le succès de ces deux monologues classiques dépend entièrement de la prestation de son interprète. Un pari risqué donc, mais entièrement réussi grâce au talent de Catherine Berriane. Maîtresse de ses émotions, elle restitue les textes avec une parfaite maîtrise et insuffle à ces deux monologues tout le tragique qui les caractérisent.
Mathilde Degorce
Le Bel indifférent de Jean Cocteau suivi de La Charlotte de Jehan-Rictus
Mise en scène : Daniel Mesguich
Assisté de : Sarah Gabrielle
Interprètes : Catherine Berriane et Florent Ferrier
Lumières : Eric Pelladeau
Bande son : Benjamin Farley
Production : Compagnie du Théâtre Mordoré
Jusqu’au 6 mars 2010
Du mardi au samedi à 21h30
Relâche exceptionnelle le mardi 9 février 2010
Réservations : 01 45 44 57 34
Tarifs : 30€ (plein tarif) – 20€ (tarif réduit séniors) – 15€ (- de 26 ans/chômeurs)
Durée : 1h15
Théâtre du Lucernaire
53 rue Notre-Dame des champs
75006 Paris
Métro : Notre-Dame des champs (ligne 12) ou Vavin (ligne 4)