Ladies Night au Théâtre de l’Essaïon
Fable sociale à l’aube de la première scène, Ladies Night s’embrase de rayonnements comiques à mesure de la succession des tableaux, pour finalement s’épancher dans un zénith retentissant.
Le café de Bernie, décor initial, s’emplit du désespoir des fermetures d’usines et de leur cortège de chômeurs. Précaires parmi tant d’autres, six compagnons d’infortune errent ainsi en ce lieu de naufrage ontologique. Jusqu’au « déclic ». A partir d’une moquerie hagarde et insensée sur un spectacle de Chippendales annoncé dans la presse, les esprits s’échaudent entre folie, dernière chance et inconscience.
Le burlesque de la situation puise évidemment dans le physique des six personnages masculins, « gaulés comme des buvards ». La gouaille de cette bande et ses échanges verbaux parfois musclés – masquant des personnalités fragiles ? – manquent certes de délicatesse, mais leur spontanéité surprend et déclenche l’hilarité. Que ce soit avec les abdominaux en tablettes de chocolat que « Gégé a bouffées » ; ou encore lors d’une séance d’exercices, quand le corps doit effectuer un mouvement de « huit », avec la réplique qui ne tarde pas : « La poule elle fait un œuf [neuf] avec son cul ».
Richesse du texte et densité du jeu
Cette fluidité dans l’échange gagne en intensité grâce à la gestuelle des comédiens, rivalisant d’ingéniosité au service du jeu. L’esprit de troupe, jubilatoire et évident, s’enrichit de la contribution féminine de Glenda, chorégraphe pour « le grand saut », pour la représentation ultime à assumer. L’ensemble des personnages occupe ainsi admirablement la scène de l’Essaïon, tant par le verbe que par l’action. La dualité des ouvertures – idéalement intégrées à la scénographie, côté jardin et en fond de plateau – permet également une animation décuplée dans l’espace. Les changements de décors et les intermèdes musicaux achèvent alors de soutenir le rythme effréné de la pièce.
Ladies Night s’inscrit dans un contexte de rupture identitaire liée au chômage. Les auteurs abordent avec amusement la nudité et la virilité mais s’attardent aussi sur les rapports homme-femme et même père-fils. Fidèle au schéma fabulateur, la morale exhorte à la cohésion et à la fraternité pour échapper à toute lassitude existentielle. De la richesse du texte et de la densité du jeu découlent ainsi naturellement humour et tendresse.
Cyril Masurel
Ladies Night au Théâtre de l’Essaïon
Mise en scène : Guylaine Laliberté
Wes : Marc Diabira en alternance avec Alain Azerot, Gérard : Laurent Mentec, Jacky : Pascal Aubert, Manu : Michel Laliberté, Steph : Sacha Petronijevic en alternance avec Pascal Guignard, Benoît : Franck Partaud, Bernie : Michel Voletti Glenda : Marielle Lieber-Claire
Co-écrit par Anthony McCarten, Stephen Sinclair et Jacques Collard.
Durée: 1h50
Jusqu’au 27 février 2010
Les vendredis et samedis à 21h30
Réservations : 01 42 78 46 42 ou www.essaion.com
Tarifs : 20 €, réduit : 15 € (moins de 26 ans, étudiants, plus de 65 ans, habitants du 4ème arrondissement, demandeurs d’emploi, intermittents du spectacle, associations et groupes de 10 personnes minimum, sur présentation d’un justificatif)
Soirée spéciale le 31 décembre à 19h et 21h30 ( Champagne et canapés) : tarif : 50€
Théâtre de l’Essaïon
6, rue Pierre au Lard, Paris 4e
Métro Hôtel de Ville (lignes 1 ou 11), Rambuteau (ligne 11) ou Châtelet (ligne 1,4,7,11 et 14).
www.essaion-theatre.com
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