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Jacques Mailhot – la politique du rire

1 mars 2013
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Jacques Mailhot

Quarante ans d’humour politique

Chansonnier depuis 1972, Jacques Mailhot a raillé Georges Pompidou, Valéry Giscard d’Estaing, François Mitterrand, Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy et depuis mai dernier, François Hollande. Le changement, il connaît. Il fait ses premiers pas dans le métier à l’Échelle de Jacob (café-théâtre parisien), passe par le Théâtre de Dix Heures puis reste dix-sept ans sur les ondes de France Inter dans l’émission « L’Oreille en Coin ».

Aujourd’hui, Jacques Mailhot jongle entre le théâtre des Deux Ânes et Paris Première, où la troupe fait sa cinglante revue de presse chaque semaine.

Maître de la satire politique, il vit les changements de gouvernement avec enthousiasme : « C’est très bon ! Ça occasionne un renouvellement de la classe politique. Aujourd’hui, il y a un souffle d’air frais avec cette nouvelle génération de socialistes qu’on connaissait peu. Moi, j’avais beaucoup pratiqué les socialistes sous Mitterrand donc c’est vraiment un renouvellement. » Tributaires de l’actualité politique, les chansonniers doivent pourtant se réinventer pour garder leur public.

Le Théâtre des Deux Ânes, que Jacques Mailhot dirige depuis 1995, fait toujours salle comble. À l’affiche depuis septembre, « Hollande met le P.I.Bas ». Le directeur du théâtre nous assure que lui et ses pairs n’ont presque jamais de procès intentés par des politiques mécontents de leurs sketchs, mais leurs affiches peuvent être interdites… Celle du spectacle actuel a été retirée du magazine TGV « parce qu’ils estiment que l’actionnaire principal de la SNCF c’est l’État, et que le chef de l’État, c’est Hollande… ça s’explique on va dire » concède l’humoriste.

Une tradition républicaine

Si les chansonniers ne sont pas familiers des tribunaux, c’est parce que ce genre de satire fait partie des « jeux de la République » estime Jacques Mailhot. « À l’époque de Vincent Auriol, les chansonniers étaient reçus une fois par an à l’Élysée pour un déjeuner ! » Mais cette tradition s’est tout de même un peu « effilochée » selon lui, « c’est dommage parce qu’il y a maintenant des gens qui pensent faire de l’humour politique en réglant des comptes, or ça n’est pas ça du tout ! ». Il ne citera personne ; invectiver certes, mais sur scène exclusivement.

La passion de la politique, Jacques Mailhot ne la tient pas de ses études. Licencié de Lettres et de Cinéma, la politique est plus une affaire de famille chez les Mailhot : « mon grand père était un militant socialiste, il était mineur et a beaucoup soutenu Jean Jaurès (…) Mon père, quant à lui, était à l’ombre avec le Général De Gaulle. Ma famille a eu une activité politique très importante. » Le métier nécessite un certains flair. Lui et son acolyte Jean Roucas écrivent leurs textes durant l’été, en établissant le bilan de l’année politique mais surtout, en anticipant les événements phares de la rentrée qui s’annonce. « Le mariage pour tous par exemple, on a senti dès septembre que ça allait être un moment important de la session politique à venir (…) c’est un bouleversement de société » puis il ajoute, rieur, « il ne faut pas être grand clair pour anticiper le truc ! »

L’anticipation se double de modifications permanentes des textes, qui suivent les remous de l’actualité et de ses protagonistes. Le personnage de Hollande demande des ajustements, explique Jacques Mailhot. « Il avait au début cette étiquette et ce volontarisme d’être un président normal, or à la faveur du Mali, c’est devenu presque un chef de guerre, donc il faut changer le texte, s’adapter. » Est-il de gauche ou de droite ? Nous ne sauront pas, car selon l’humoriste, là n’est pas la question. Il regrette d’ailleurs l’attitude de certains confrères qui auraient dit : « ‘Sarko parti, j’arrête, parce que c’était ma cible’. Ça n’a aucun rapport avec notre métier ! » s’exclame-t-il. « Nous, quel que soit le Président de la République, qu’il soit de gauche de droite du centre, on doit continuer à faire notre métier. Ce qui nous intéresse, c’est de tourner quelque chose en dérision, de montrer les disfonctionnements de la République et quelque fois aussi, ses qualités ! »

Nathalie Troquereau

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