La Mouette à l’Odéon : un vol subjuguant
La Mouette De Tchékhov Avec Bénédicte Cerutti, Marine Dillard, Valérie Dréville, Cédric Eeckhout, Jean-Pierre Gos, François Loriquet, Sébastien Pouderoux de la Comédie-Française, Mélodie Richard et Matthieu Sampeur Jusqu’au 25 juin 2016 Du mardi au samedi à 20h Le dimanche à 15h Relâche les lundis Tarifs : de 6€ à 40€ Réservations en ligne Odéon-Théâtre de l’Europe |
Jusqu’au 25 juin 2016
Adaptée et mise en scène par Ostermeier, La mouette de Tchékhov fait planer une captivante atmosphère, où l’art et l’amour s’enracinent pleinement dans nos sociétés actuelles puis s’étirent magnifiquement dans un temps suspendu. Lorsqu’elle fut créée il y a plus d’un siècle à Saint-Pétersbourg, la pièce de l’auteur russe fut un échec, déroutant le public par des lois dramaturgiques nouvelles. Avec cette version inventive de Ostermeier, la surprise est forte mais elle soulève un dense renouvellement d’émotions et de sensations, une extraordinaire grâce combinée aux complexités de notre époque, un souffle au rythme à la fois lent et avivé d’appogiatures humoristiques. On reste pendant deux heures trente emporté par cette majesté d’ensemble striée par des cris perçants et parfois rieurs, à l’image de ceux d’une mouette. Le plateau est occupé par une vaste boite grise qu’une peintre recouvre en direct d’une peinture noire d’où va se dégager un lac appelé à disparaître à nouveau. De même que l’artiste peintre, les comédiens, lorsqu’ils ne jouent pas, restent sur scène, assis sur des bancs, gris également. Seule une estrade de bois se détache et s’avance vers la salle. Par ce dispositif en contrastes, s’installe l’axe qui structure la pièce, à savoir l’opposition entre forme théâtrale ancienne et moderne, forme d’amour bourgeoise ou romantique et opposition générationnelle.
Le metteur en scène a fait travailler son équipe à partir de nombreuses improvisations, afin qu’ils investissent leurs personnage de la véracité de leurs réactions, au plus près du partenaire, dans la justesse des émotions. De cette base de travail, il a gardé des phrases qu’il intègre dans la pièce, tout comme la lecture de Maupassant suggérée par Tchékhov est remplacée par celle de Houellebecq. Les intermèdes musicaux sont en anglais et nombreuses sont les incises sur des conflits actuels avec tout ce que cela engendre d’angoisses et de lâchetés, tant artistiques et politiques qu’intimes. Tchékhov disait avoir écrit cette pièce avec tout son amour et de même, Thomas Ostermeier et ses comédiens proposent une Mouette dans laquelle ils mettent toutes leurs expériences et leur amour d’individus d’aujourd’hui.
Emilie Darlier-Bournat A découvrir sur Artistik Rezo : [Photos Arno Declair] |
Articles liés

Quelques-uns des plus beaux films d’Émilie Dequenne à voir ou à revoir
L’actrice belge, Émilie Dequenne, est décédée à 43 ans le dimanche 16 mars, emportée par un cancer très rare. Émilie Dequenne se fait connaître en 1999 à l’âge de 17 ans dans la réalisation des frères Dardenne, “Rosetta”, dont...

Exposition “Steve McQueen : L’héritage d’une icône” du 28 au 30 mars à Courbevoie
Du 28 au 30 mars, ne manquez pas l’exposition exclusive “Steve McQueen : L’héritage d’une icône” organisée par Les Épicuriens. Pendant tout un week-end, plongez dans l’univers du légendaire Steve McQueen, icône intemporelle du cinéma et passionné de belles...

“Absalon, Absalon !” : le vertige d’un théâtre total
À l’Odéon, Séverine Chavrier, metteure en scène et directrice de la Comédie de Genève, nous immerge totalement dans le flamboyant roman de l’Américain William Faulkner avec un spectacle qui convoque en même temps l’art de l’acteur et l’utilisation de...