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La famille Ortiz au Rive Gauche, gaieté et secret de famille

© Fabienne Rappeneau

L’auteur de la famille Ortiz est Jean-Philippe Daguerre, celui-là même qui a signé Adieu Monsieur Haffmann dont le succès est auréolé de quatre Molières. Cette fois, ce n’est pas la grande histoire qui sert de socle à la pièce mais le cadre familial. Et l’histoire n’en est pas moins enlevée, à la fois drôle et glissant avec loufoquerie dans les méandres intimes.

C’est donc dans dans un cercle restreint que nous plonge Jean-Philippe Daguerre. La famille Ortiz est composée d’un fils ainé surnommé Madiba, de jumeaux nommés Ali et Lino, d’un père toréador et d’une mère infirmière. Ils sont soudés comme en rêve chaque famille et la gaieté règne dans la maison. Le père a un caractère solide et courageux, la mère est la vertu incarnée, attachée à ces hommes petits et grands avec un souci permanent de les rendre heureux. Les frères s’entendent bien et partagent leur adolescence dans une ambiance propice à la solidarité et à la pétulance.

Mais alors que l’auteur emmène joliment son petit monde sur les bords de la Garonne pour une partie de pêche à la ligne, un drame va être occulté. Le mensonge va être secrètement enfoui, volontairement camouflé par les uns, ignoré par les autres, et cette dissimulation  ira jusqu’à briser la chaine familiale idéale. Le fils ainé en sera la victime et, portant à tort toutes les suspicions, c’est au Japon qu’il tentera d’oublier ce déchirement de la cellule que l’on croyait unie comme les cinq doigts de la main.

© Fabienne Rappeneau

Le thème du secret familial qui peut littéralement empoisonner ou détruire une fratrie est donc ici repris avec le talent de l’auteur et celui d’une troupe énergique. Le spectacle opte pour une variété de couleurs enlevées et une tonalité de comédie. Le divertissement est souhaité, l’ensemble est vif, enjoué, virevoltant. La pièce est clairement tirée vers la fantaisie, dans une volonté de garder un rythme et une direction légère, hors des sentiers du naturalisme. Pour autant, les peines causées par le non-dit ne sont pas occultées. Les comédiens ont un ressort festif, ils tournent avec agilité autour du drame sans y verser, à l’image des combats de toréros, le patriarche en étant ici un représentant. Ils donnent à la pièce de Jean-Philippe Daguerre qui la met également en scène sa vraie saveur. C’est en cela bien troussé et le public trouvera matière à cogiter sur les conflits familiaux nés de secrets ou de mensonges tout en passant une soirée pétillante.

Emilie Darlier-Bournat

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