Parzival, épisodes et écho – Ballet de Hambourg – John Neumeier
L’Américain John Neumeier est le plus européen des chorégraphes américains*. Depuis 1973, c’est lui qui est à la tête du ballet de Hambourg, compagnie composée aujourd’hui de cinquante-six danseurs de vingt nationalités différentes. Invité pour la troisième fois à Paris, il revisite aujourd’hui le mythe « Parziva » à travers des moments essentiels de sa vie. Neumeier a mis six mois pour concevoir cette chorégraphie qui fut présentée en 2006 à Hambourg. Ce qu’il considère lui-même comme ce qu’il a fait de plus complexe**, Parzival, épisodes et échos est une œuvre contemporaine et profondément universelle. Elle renvoie à notre condition d’homme innocent emplie de pureté mais aussi de pulsions sauvages dont l’enfance restera la période la plus importante de notre destinée.
Episodes
La première partie s’intitule Episodes. Dix passages allant de l’enfance de Perceval à son premier combat contre le Chevalier Vermeil, jusqu’à son arrivée à la cour du roi Arthur et la découverte de l’Amour. L’univers de Neumeier est sobre, propre, esthétique et minimaliste. Lui qui conçoit lui-même la mise en scène, les costumes et les lumières entraîne l’audience dans un voyage où le bleu fait écho à l’enfance, le rouge au monde adulte, le vert à la violence et le jaune à la découverte du sexe féminin. Il y a du Bob Wilson dans ce beau dégradé de couleurs. On pense même à la mise en scène de Gunter Kramer sur L’or du Rhin de Wagner présentée l’année dernière à l’Opéra Bastille (présence de commandos, de jeunes anges vêtus de blanc rappelant les dieux olympiques…). Au niveau sonore, trois musiques singulièrement différentes… mais si proches l’une de l’autre. Richard Wagner, John Adams et Arvo Pärt. Wagner : musique du souvenir. John Adams : musique du voyage***. La plus touchante reste Für Alina pour piano d’Arvo Pärt. Un instant tout en douceur. La fin d’Episodes avec le passage El Dorado de John Adams fera enfin planer le doute sexuel où l’amour de Parzival est partagé entre celle d’une femme et celle du roi pêcheur qu’il a entrevu auparavant. L’androgynie à l’état pur. Pour ce faire, Edvin Revazov ne danse pas seulement bien : il vit sur scène pour son personnage avec intensité et véracité. Beau, grand, aux cheveux blonds et aux yeux bleus : un parfait Perceval en somme.
Echo
A la fin de cette première partie, nous pensions avoir tout vu. Neumeier a en effet le seul souci de se répéter dans certains gestes, ce qui tend à lasser parfois l’attention (signe de silence, salutation par la main, signe de croix…). Pourtant, Echo est ce qu’il y a de plus important et de plus abouti. Il établit un pont en quatre passages entre son personnage et l’être humain. Par la répétition de certaines musiques dont le Prélude de Parsifal de Wagner, Neumeier rappelle que l’enfance nous guide. Jeune candide solitaire, parfois égoïste, nerveux et innocent, Perceval sera presque touché par la grâce à la fin de sa vie. Le premier passage A travers le monde, sans but et loin de Dieu ainsi que L’ermite sont ainsi les plus réussis. Au final, il restera toujours cet enfant bercé par sa mère et protégé par l’esprit de son père. Comme l’homme lui-même, il aura vécu d’illusions et d’aventures qui ne seront rien au regard de l’amour et de la vie. C’est précisément ce que Neumeier réussit à chorégraphier avec justesse.
Edouard Brane
* John Neumeier par Marie-Françoise Christout
** Le Figaro, 25 décembre 2006
*** Chroniques de travail – John Neumeier, 27 avril 2006
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