L’Autre, au milieu du couple
L’Autre De Florian Zeller Mise en scène de Thibault Ameline Avec Jeoffrey Bourdenet, Benjamin Jungers, Carolina Jurczak Du mardi au samedi à 21h, dimanche à 15h Plein tarif : 24 € Réservations au Durée : 1h10 Théâtre de Poche-Montparnasse M° Montparnasse |
Depuis le 1er décembre 2015 Cette première pièce de Florian Zeller est reprise au Théâtre de Poche, dans un univers intimiste et minimaliste qui laisse toute la place à un dialogue délicatement taillé, où s’aiguisent les fragilités, mensonges et fantasmes du couple. Ce n’est pas une conversation de salon mais de chambre à coucher, puisque tous les échanges ont lieu autour d’un simple et unique cube qui sert de lit. Aucun accessoire ni décor, la scène dépouillée se remplit en délicatesse des phrases et des corps. Ceux-ci autant que les mots restent suggestifs, évocateurs, volontairement élégants, toujours dans le registre de la joliesse, tant verbale que charnelle. Alors que la pièce s’ouvre et se ferme sur le réveil d’une femme dont l’amant remet sa cravate, tout ce qui se déroule au milieu glisse avec une brillance agréable entre réalité et imaginaire. Les neuf scènes qui s’enchaînent font jaillir de légers bruissements qui sont peut-être le rêve ou l’angoisse, tantôt de la femme, tantôt du mari, à moins qu’il ne s’agisse de la petite voix intérieure de l’un ou de l’autre, incarné par un comédien. Bref, tandis qu’une femme et un homme se livrent à une délicieuse et sobre tromperie, ils ajoutent à la sensualité le ressort malin d’une peur affriolante, comme lorsqu’un enfant s’aventure en se réjouissant de la transgression. Les dialogues s’enchaînent finement et avec vivacité. Le metteur en scène qui a tout centré sur le jeu des personnages a trouvé le bon tempo de ce voyage ou songe d’un trio amoureux, et les comédiens, à l’unisson sur cette palette, avancent sans faux pas. Apparemment, rien ne se passe, mais entre les silences et le babillage galant rôde constamment un autre, insaisissable et mouvant, qui pourrait être le rival, le refoulé, le souvenir, la peur ou le désir caché. L’ambiguïté maintenue permet au spectateur de se balancer plaisamment dans ces états de conscience indéterminés et de retomber en souplesse dans la réalité. À la fin de la pièce, la femme alanguie, dénudée mais pas trop, évoquant du bout des pieds un érotisme aimable, se rassure en susurrant à l’amant que tout cela restera leur secret. Et l’amant, pas contrariant, acquiesce avant de sortir sur un “Salut !” désinvolte. À cette image de la légèreté réaliste après le frisson, le public a déambulé et a pu se reconnaître dans les petites cachotteries de l’amour sain et sauf après les fantaisies des coulisses du cœur. On retrouve là le marivaudage d’aujourd’hui qu’affectionne l’auteur et qui lui vaut de grands succès. Émilie Darlier [embedyt] https://www.youtube.com/watch?v=3u13FG4XT6k[/embedyt] [Photo © D.R.] |
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