Kader Attou, histoire et avenir du hip-hop
Opus 14 De Kader Attou Du 16 au 19 décembre 2015 The Roots De Kader Attou Du 23 au 30 décembre 2015 Tarifs : 13 € – 35 € Réservation au Durée : 1h15 Théâtre National de Chaillot M° Trocadéro |
The Roots ressemble à un tableau de Magritte. Fauteuil, chaise ou canapé chavirent et semblent s’incliner devant vingt ans de création de la compagnie Accrorap, fondée en 1989 par Kader Attou et Mourad Merzouki (entre autres). C’est entendu, ils sont chez eux dans cette danse comme dans leur propre maison, mais le hip-hop entraîne le séjour dans un véritable tourbillon. Les B-Boys’n’Girls vrillent avec une virtuosité stupéfiante, mais ne lâchent rien côté poésie et humanité, forts d’une précision technique hors du commun. [embedyt] https://www.youtube.com/watch?v=gs_0ohncvS0[/embedyt] Longtemps, Kader Attou tenait à nous raconter des histoires dansées, comme dans Petites histoires.com (2008). The Roots s’empare de l’histoire du genre. Cette pièce pour onze interprètes donne à entendre et à voir le passage de la old school à la new school, côté musique et danse. Les ambiances chaleureuses de la funk et de la soul, racines musicales de la culture hip-hop, donnent naissance à une danse fluide et presque romantique, où l’idée d’harmonie n’est pas absente et s’incarne dans des unissons très musicaux. Et on plonge dans un rêve, comme dans un univers à la James Thierrée. Quand le spectacle entre dans sa seconde partie, les rythmes s’accélèrent, les genres musicaux se diversifient et la danse s’affiche de plus en plus rapide, virtuose et imprévisible. Conclusion : le hip-hop aussi est un enfant de son temps ; il évolue avec la société, la reflète et se reflète dans sa propre mémoire. À chacun(e) de décider à quel univers va sa préférence. The Roots est une pièce qui s’entraîne. Depuis sa création en 2013, elle est devenue la création la plus jouée d’Accrorap, la compagnie implantée au Centre Chorégraphique National de La Rochelle, dirigé par Kader Attou. Ensuite, et nous sommes maintenant en 2014, Kader Attou ouvre définitivement un nouveau chapitre de sa propre trajectoire, et peut-être dans l’ascension du hip-hop en général. Opus 14 voit plus large, plus artistique, et voilà, c’est reparti “comme en quatorze”. Mais la pièce ne s’appelle pas ainsi en raison de son année de création. Il s’agit tout simplement de la quatorzième création du chorégraphe et de sa compagnie, mais le titre montre bien l’ambition d’afficher la danse hip-hop comme art majeur. Il s’y libère de toute idée de narration et compose les tableaux entièrement à partir de l’habileté physique des seize danseurs et danseuses. Opus 14 ouvre de nouveaux horizons, avec un hip-hop qui devient partie prenante d’une œuvre d’art plastique. Rien de plus logique, puisque cette danse s’est toujours développée en sculptant le corps, tout en lui appliquant des concepts vestimentaires. En se libérant de ses uniformes, le hip-hop peut inviter les stylistes de l’espace et des arts visuels. Pendant de longues années, l’idée de raconter des histoires a été importante pour dépasser l’esprit des défis et battles, pour développer des langages scéniques novateurs. Le hip-hop a cherché et trouvé l’échange avec d’autres univers artistiques. [embedyt] https://www.youtube.com/watch?v=HGrlG6H4Uuc[/embedyt] Mais aujourd’hui, et Opus 14 le prouve amplement, le hip-hop peut trouver un mode d’expression chorégraphiquement pur (et pourtant ouvert) dans une fusion exaltante avec les arts graphiques et visuels. L’univers pictural d’Opus 14 est une pure fascination. Sur le sol et le mur de fond apparaissent des dessins imitant des volutes de glaise. Ces œuvres de la peintre Ludmila Volf créent un lien avec la terre et les origines, tout en plongeant le spectacle dans une ambiance des plus poétiques. Opus 14 s’éloigne des racines du hip-hop pour aborder l’universalité, par exemple à travers les divers registres musicaux – acoustique, électro ou lyrique – harmonieusement fusionnés par le compositeur Régis Baillet, aussi naturellement que Kader Attou enchaîne des solos époustouflants avec des tableaux d’ensemble, dans un rythme entraînant. Ce qui nous amène à dire que pour l’avenir du hip-hop, Attou a tout d’un atout. Thomas Hahn [Photos © Michel Cavalca] |
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