June Events : des spectacles pas comme les autres
Les origines de la danse ne sont-ils pas à chercher dans la fête ? Le festival June Events lie la danse d’auteur actuelle à l’esprit festif qui soude la communauté. Danser, marcher, manger, explorer, débattre : Ensemble ! En juin, il y aura une première moitié pour vivre June Events et une seconde, pour échanger ses souvenirs.
C’est la 13e édition de June Events, et elle met l’accent sur le partage. À certains, il suffit pour cela de créer un spectacle sur le plateau, avec leurs interprètes chorégraphiques. D’autres invitent les spectateurs à participer activement, à travers la ville ou bien en pleine nuit, dans le Parc Floral de Vincennes. On peut approcher certaines créatures dans leur univers intime et étrange ou bien se laisser enrober de sons guérisseurs. D’autres exposent au public leurs toutes nouvelles recherches pour en débattre (et l’entrée est libre).
La fête
La fête est liée aux sons et au mouvement. Et elle peut libérer, tout en partant sur une voie spirituelle. C’est dans cet esprit que le chorégraphe Fouad Boussouf propose « Näss (Les gens) », où sept danseurs se laissent emporter par les rythmes gnawa de la tradition sub-saharienne, dans un spectacle électrique, cosmopolite et bien sûr festif, mais aussi potentiellement guérisseur.
C’est dans cette philosophie encore que Marie Chesnais s’allie avec Swann, musicien et sound healer, pour « Rhein », un voyage dansé et sonore dans la tradition des musiques thérapeutiques et des rituels sacrées, devant un mur couvert de gongs cuivrés.
Et puisque la soirée se poursuit avec « Cosmic Love », la première pièce de groupe de la québécoise Clara Furey, on reste dans l’idée de gestes ritualisés, de faire vibrer un espace et d’un partage des énergies. Clara Furey et le compositeur et musicien Tomas Furey ont travaillé sur le concept d’une expérience auditive immersive pour atteindre un processus transformateur.
Les soins
Une expérience sonore très intime est au cœur d’un duo féminin : « Dans « Confier » de Margot Dorléans, la chorégraphe et la danseuse Manon Parent s’enlacent et se confient mutuellement leurs battements de cœur, captés et transformés en partition musicale par Laurent Durupt. Le soin qu’on prend de l’autre est aussi un soin apporté à soi-même, dit Dorléans (entrée libre sur réservation).
Et bien sûr, l’ultime soin est la résurrection. Christian & François Ben Aïm nous en proposent, dans « Arise », une version laïque, rock et sensuelle avec Pies Faccini interprétant à la guitare électrique ses envolées si poétiques. Activée une première fois dans la Sainte Chapelle, cet appel à la transformation et à l’élévation se produira dans la chapelle du Château de Vincennes en première partie, pour laisser entrer la lumière à travers les vitraux.
La nuit
Dans « La nuit, nos autres », la chorégraphe Aina Alegre parle d’auto-célébration. Pour cela, l’ambiance sera nocturne, et trois interprètes vont chercher dans leur intimité à franchir les limites qui la lumière du jour et les conventions sociales leur imposent habituellement. On n’en sait pas plus, c’est une création et un brin mystérieuse. Mais n’est-ce pas le propre de la nuit ?
La chorégraphe Nina Santes orchestre une soirée et une nuit bien particulières (le samedi 8 juin) en invitant plusieurs complices artistiques à investir le site de la Cartoucherie. À partir de 18h, se succèdent pratiques, rencontres, projections, banquet, performances et d’étranges spectacles, comme ce duo simiesque d’Antonia Baehr et Latifa Laâbissi dans une installation de Nadia Lauro – 3h30 durant. Ces deux singes, Consul et Meshie, seront-ils les « invité.e.s mystère » annoncé.e.s au banquet performatif, proposé au cours de la soirée ?
Ensuite, le public est invité à un parcours nocturne au Parc Floral tout proche. Certain.e.s tenteront peut-être d’y passer la nuit. Pour les faire revenir aux théâtres, June Events leur propose un concert surprise qui débutera à 1h30 du matin, suivi d’un DJ set de Lise Vermont sous le thème How to be a sex godddess. Voilà pour le bouquet final et probablement matinal. Mais la soirée commence en douceur : et en guise d’introduction et d’accompagnement, une cabane sera installée à l’Atelier de Paris, pour offrir diverses pratiques du corps et de la voix, des rencontres, des projections, des lectures…
Le jour
Pour mettre en valeur la lumière du jour, June Events n’est pas avare en événements dans l’espace public. Le jour de l’ouverture, le 1er juin, des cortèges de marcheurs vont partir de quatre lieux (Studio Le Regard du Cygne, Micadanses, Atelier de Paris et Canal Saint-Martin) pour rejoindre le Palais de la Porte Dorée où la chorégraphe Joanne Leighton orchestre une soirée avec deux spectacles et un DJ set. Dans « 9000 pas », six interprètent dansent et marchent sur un sol recouvert de sel, portés par la musique de Steve Reich.
L’après-midi, on peut même profiter de l’occasion de voir Amala Dianor, ce danseur d’exception, aujourd’hui une vedette en tant que chorégraphe, interpréter dans deux lieux différents du 12e arrondissement, son très beau solo « Man Rec », et c’est gratuit, comme la performance « Bird » de Christian Ben Aïm, le jour de la clôture (15 juin) sur la place de l’Église de Vincennes.
L’intime
Le portrait et le regard sur ses origines sont un sujet de prédilection pour la délicatesse du geste dansé. Le corps est porteur de souvenirs qu’il laisse échapper de façon subtile, que l’on travaille sur ses propres souvenirs ou ceux d’un être rencontré par hasard. Meytal Blanaru est Israélienne et a grandi dans un Kibboutz, dans le partage des biens. Elle partage aujourd’hui sa recherche de ces souvenirs dans un trio, « We were the future », où une vision est toujours effacée pour en proposer une autre. Une sorte d’autofiction donc, et une pièce très intime.
Est-ce difficile pour une artiste de se livrer ainsi ? En tout cas, elle a le choix des moyens artistiques. La chose est bien différente pour les personnes qui interprètent leurs propres portraits dans les pièces de Mickaël Phelippeau, surtout dans le cas de Heddy Salem, jeune boxeur des quartiers nord de Marseille. Et il arrive à June Events avec un second portrait, celui de la danseuse baroque Lou Cantor, pour une soirée qui sera donc très contrastée.
L’intime n’est cependant pas l’apanage des petites formes ou de la vie réelle. Le grand maître Saburo Teshigawara le prouve dans « Transparent Monster », un trio tout en finesse, qui se dessine en creux entre les trois danseurs. Et le chorégraphe suisse Thomas Hauert esquisse un tableau tout aussi sensible pour plus de vingt interprètes, qui font remonter beaucoup de fragilité et de sensibilité. C’est sur ces deux spectacles, présentés par la troupe du Ballet de Lorraine, que June Events se terminera, le 15 juin.
Thomas Hahn
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