“Jacques et son maître” : Kundera et Diderot en majesté au Théâtre Montparnasse
© Fabienne Rappeneau
Vingt ans après sa création, Nicolas Briançon remonte sur la scène dans le rôle de Jacques pour servir son maître Stéphane Hillel, dans une mise en scène joyeusement mélancolique, au son de l’accordéon tzigane et dans des lumières chatoyantes. Un régal de théâtre régi par la liberté du romanesque, de l’imaginaire et du fantasme.
Couple en goguette
Qui sont-ils, ces deux là ? Le premier, hâbleur et rieur, Jacques, que campe un magnifique Nicolas Briançon, tout en élégance et en fantaisie, pousse dans une carriole son maître qui attend de lui l’histoire détaillée de son dépucelage. Stéphane Hillel, faussement candide, les yeux de chien battu, est finalement dans la même galère que son valet Jacques dont il ne peut se passer. Et comme dans Jacques et don maître de Diderot, le valet, personnage principal, et le maître sont tous deux soumis aux aléas de l’histoire et du roman picaresque. Privés de Dieu, du Diable, mais pas des femmes, ils s’inventent et se réinventent par la plume de l’auteur et l’intérêt du spectateur avec lequel ils dialoguent constamment. Comment les suivre, eux qui traversent trois histoires, du maître au domestique en passant par Madame de la Pommeraie, maîtresse femme qui trompe subtilement l’orgueil des hommes, des situations atroces d’enfants battus, de femmes trompées, de domination de classe, de désir bafoué ?
La jouissance du jeu théâtral

© Fabienne Rappeneau
La réussite de ce spectacle, dans cette nouvelle distribution, tient en grande partie à la générosité et au talent des comédiens et musiciens présents sur la scène. Lisa Martino (l’aubergiste), Pierre Alain-Leleu (Saint Ouen), Maxime Lombard, Philippe Beautier, Camille Favre-Bulle, Elena Terenteva et Jana Bittnerova, avec les musiciens Marek Czerniawski et Boban Milojevic complètent cette distribution haute en couleurs et en verbes, qui sur scène forme une belle équipe de bohèmes au romantisme noir, dans une scénographie dépouillée de tréteaux en bois et des costumes délicats signés Pierre-Yves Leprince et Michel Dussarat. Ce qui fait que l’on ne sait jamais ou l’on est, fiction ou réel, théâtre ou roman, tellement l’intrigue brouille les pistes du discours. Une ode à la liberté, à la folie, et au fatalisme philosophique, écrit par un romancier qui venait de connaître l’entrée des chars russes à Prague dans la nuit du 20 au 21 août 1968 en Tchécoslovaquie, sabrant ainsi les rêves d’un “socialisme à visage humain”.
Hélène Kuttner
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