Germaine Acogny : “Médée, c’est nous !”
À un endroit du début De Germaine Acogny Mise en scène de Mikaël Serre Avec Germaine Acogny Du 16 au 19 mars 2016 Tarifs : de 10 à 26 € Réservation Durée : 1h Théâtre des Abbesses M° Abbesses |
Du 16 au 19 mars 2016 Dans À un endroit du début, Germaine Acogny salue la tragédie grecque par la danse et scelle le sort de Médée à celui de l’Afrique. Et c’est finalement son histoire personnelle qui se reflète dans son nouveau solo, création commune avec Mikaël Serre, homme de théâtre franco-allemand. Au Théâtre des Abbesses, la grande dame de la danse africaine rencontre un virtuose de la mise en scène. Quand Germaine Acogny annonce un solo, le plateau est plus agité que dans certaines pièces de groupe. Cette grande dame de la danse, incontestablement au même rang qu’une Pina Bausch ou une Carolyn Carlson, n’est revenue sur les planches que récemment. À plus de 70 ans, âge qu’elle porte avec une fraîcheur déconcertante, elle entame une nouvelle vie artistique en travaillant avec des artistes européens de premier plan. A-t-elle jamais été ailleurs qu’à un endroit du début ? Dans la danse sénégalaise, elle a développé sa propre technique, un style lié à son époque et aux commencements en même temps.
[embedyt] https://www.youtube.com/watch?v=lvPmFOhdEsY[/embedyt] À un endroit du début, c’est ici aussi les débuts du théâtre occidental, avec ce personnage de Médée, une immigrée rejetée, stigmatisée, trompée, calomniée. Ce sort peu enviable, Germaine Acogny le lie directement à la position de l’Afrique dans le monde actuel, avec un regard particulier sur les femmes. C’est “à un endroit du début”, qui est forcément un endroit de retrouvailles, que cette Germaine qui fume la pipe et apprécie le whisky trouve en son père le premier repère. Né au Bénin dans une culture animiste, il devint énarque français et administrateur des colonies ! Si Macbeth connaissait trois sorcières, Médée se trouve ici au centre de trois histoires. D’abord celle, personnelle, d’Acogny avec son parcours entre la troupe de Béjart et le Sénégal. Ensuite celle des mythes ancestraux de la culture yoruba (dont sa grand-mère était une prêtresse). Et enfin celle des vagues migratoires actuelles, aboutissement logique de cette création danse-théâtre-vidéo. La scénographie est aussi simple que spectaculaire, espace imaginaire traversant les époques et les univers grâce à une création vidéo foisonnante de Sébastien Dupouey, artiste visuel qui a laissé une empreinte forte au théâtre entre Berlin, Munich, Amsterdam et Moscou, sans oublier la France, son pays natal. Par ailleurs, Mikäel Serre, le metteur en scène, travaille tout autant entre la France et l’Allemagne, ce qui fait qu’on touche ici véritablement “à un endroit du début”, autrement dit à une racine commune des civilisations. Il n’est pas étonnant de voir Germaine Acogny devenir ici une artiste expressionniste pur jus germanique, à moins qu’elle ne l’ait toujours été. Car cette Germaine proprement universelle a tout pour incarner un endroit du début de l’humanité, source de nos fructueux échanges millénaires. Thomas Hahn [Photos © Thomas Dorn] |
Articles liés
“Riding on a cloud” un récit émouvant à La Commune
A dix-sept ans, Yasser, le frère de Rabih Mroué, subit une blessure qui le contraint à réapprendre à parler. C’est lui qui nous fait face sur scène. Ce questionnement de la représentation et des limites entre fiction et documentaire...
“Des maquereaux pour la sirène” au théâtre La Croisée des Chemins
Victor l’a quittée. Ils vivaient une histoire d’amour fusionnelle depuis deux ans. Ce n’était pas toujours très beau, c’était parfois violent, mais elle était sûre d’une chose, il ne la quitterait jamais. Elle transformait chaque nouvelle marque qu’il infligeait...
La Croisée des Chemins dévoile le spectacle musical “Et les femmes poètes ?”
Raconter la vie d’une femme dans sa poésie propre, de l’enfance à l’âge adulte. En découvrir la trame, en dérouler le fil. Les mains féminines ont beaucoup tissé, brodé, cousu mais elles ont aussi écrit ! Alors, place à leurs...