Gang of Witches : Patriarchy is burning !
Au Yoyo, le Club du Palais de Tokyo, le patriarcat sera mis à rude épreuve, le temps d’un weekend (15 et 16 juin). Performeuses, danseuses, musiciennes et autres lancent des vagues de rap, de voguing, de New Burlesque, d’expositions, de débats… La démarche est militante et de haute volée artistique.
Elles sont un collectif artistique de tous horizons, fédérées par un désir d’égalité et de justice entre les sexes, l’envie de créer et de communiquer. Chaque année, Gang of Witches propose un événement majeur qui fédère un maximum de disciplines artistiques pour interroger et conforter la position de la femme. Ce collectif, composé de peintres, sculptrices, écrivaines, photographes, vidéastes, musiciennes, danseuses et performeuses (sans que la forme féminine exclue ici le masculin), est essentiellement – mais pas exclusivement – féminin, voire féministe.
La sorcière éco-féministe
Une nouvelle vague sorcière traverse actuellement le paysage artistique, surtout là où la sorcière rencontre un maximum d’espace pour s’exprimer : dans la danse contemporaine et la performance, et avec Gang of Witches également dans la musique. L’éco-féminisme arrive donc dans la musique et, avec l’ensemble du weekend au Palais de Tokyo, également dans la peinture, la photographie etc. « Patriarchy is burning » est la devise de leur manfestation, mais aussi le titre de leur premier album, produit en vinyle et également disponible en download. Qui sont-elles ? Sophie Rokh alias MC Chaton, ancienne rockeuse et « riot girl », Paola Hivelin aka W et Son Of A Pitch (S.O.A.P) ont publié en 2018 un premier titre, « We are Gang Of Witches ». Ensemble elles ont inventé le Witch hop.
Mais d’où vient cet engouement pour la sorcière ? La vague de l’éco-féminisme vient des Etats-Unis, avant tout avec la militante altermondialiste et écrivaine Starhawk. La sorcière est ici vue comme figure féminine savante, subversive, jouissive et liée aux forces de la nature, ce qui fait d’elle naturellement une militante écologiste. Gang of Witches accélèrent donc le rythme et reviennent à la charge avec un nouveau tube incendiaire et triomphant.
Et elle écrivent : « L’image de la sorcière, savante, indépendante et puissante, souvent crainte, parfois moquée, toujours auréolée de mystère et maîtresse de son identité, est un marqueur de la place de la femme dans la société et des enjeux de chaque époque. Elle est, depuis les années 1960, une icône féministe, écologiste, anticapitaliste et le symbole idéal pour notre gang. » Le côté pratique de l’anticapitalisme réside ici dans le fait que pendant tout le weekend, l’entrée à « Patriarchy is burning » est libre.
L’invention du concert-exposition littéraire
Entre les vidéos et les univers artistiques présentes dans l’exposition, la cohésion visuelle est frappante. Elle découle d’une vision partagée où des figures archaïques sont représentées de manière très contemporaine et dans la révélation de fores archaïques dans le modernisme. Cette cohérence ne tombe pas du ciel. Les deux voix de Gang of Witches ne se limitent pas au chant. Paola Hivelin expose ses sculptures sous le tire « Witches spread like fire » : des coiffes sombres et ardentes qui représentent différents types de violences faites aux femmes. Et Sophie Rokh est autant chanteuse que batteuse et écrivaine, signant une nouvelle qui est au cœur du magnifique ouvrage édité pour accompagner cette exposition. Rien à voir avec un catalogue d’exposition habituel : c’est une œuvre d’art en soi, tirée à trois cents exemplaires seulement et destinée à devenir un objet culte en soi !
Danse et performances
Si l’exposition sera la même sur les deux jours, on pourra voir le soir du samedi 15 juin l’inénarrable Louis(e) De Ville, célèbre Dragking et égérie américaine de la scène burlesque parisienne, ici à admirer en sa partie masculine (Louis donc), avec la performance « Fait mâle », où la véritable Louise retourne et décortique les codes de ce qu’on appelle la masculinité toxique, pour mieux s’en amuser et en démonter la liberté ne se gagne qu’en dépassant les schémas assignés. On la connaît autant dans des tableaux où elle exacerbe et détourne les images de la revue-girl.
Après quoi la soirée enchaîne avec le concert de Gang of Witches, et puis, un événement Voguing où Amélie Poulain, passée par la danse classique, le hip hop et le waacking, orchestre un hommage au film « Paris is burning », ce documentaire légendaire sur la scène voguing. Elle transformera le Yoyo en ballroom et « on y verra des créatures extraordinaires, qui ne seront plus ni hommes ni femmes », comme l’annoncent les cheffes des Witches, Paola Hivelin et Sophie Rokh. Dimanche 16, à 16h, Rokh lira son « roman-feuilleton dystopique » dont le titre est « Ad Vitam Aeternam », suivi d’une série d’autres performances, notamment avec Julie Atala Muz, autre vedette américaine de la scène du New Burlesque. Autrement dit, le Yoyo du Palais de Tokyo sera l’incontournable tête de pont quand les sorcières modernes, fortes de leurs super-capacités artistiques, feront brûler le patriarcat idéologique, physique et financier.
Thomas Hahn
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