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Festival Avignon Off 2024 : Quelques coups de cœur danse et théâtre

Stéphanie Nègre 19 juillet 2024
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"Sous Tension" © Compagnie DTS

Cette nouvelle édition du Festival Off d’Avignon réserve, une fois de plus, de belles surprises en danse et théâtre. Morceaux choisis.

Hope hunt and the ascension into Lazarus de Oona Doherty

Avec ce solo démarré non sur scène mais à l’extérieur, devant le théâtre, la chorégraphe Oona Doherty nous emmène sur les traces de personnages qu’elle connait bien : Les gamins des quartiers populaires comme il en existe dans sa ville natale, Belfast. Avec sa gestuelle réaliste, issue de la break-dance et du mime, les impressions très fortes qu’elle nous fait partager sont faites de violences, de désespoir, de fuite – De la police, d’un règlement de compte ou plus métaphoriquement du quotidien ? –, et d’autodestruction. Cette première partie puissante illustre une sorte de « no futur » subit mais aussi, parfois, assumé voire revendiqué. Menée sur les notes du Misere d’Allegri, la seconde partie clôt Hope hunt sur une dimension lumineuse et pleine d’espoir.

Hope hunt and the ascension into Lazarus de Oona Doherty, avec Sati Veyrunes, du 6 au 16 juillet aux Hivernales, 18 rue Guillaume Puy

Hope Hunt © C Alexander

Pillowgraphies, danses pour sept fantômes et lumière noire de Sarah Crépin et Etienne Cuppens

Créé en 2002 au Havre par Sarah Crépin et Etienne Cuppens, la compagnie Bazooka développe des projets chorégraphiques à la dimension visuelle très forte. Leur bal des fantômes s’organise en deux parties. Dans la première, nous découvrons les sept silhouettes enveloppées d’un drap blanc avec deux trous ronds pour les yeux, interpréter une danse hypnotique, presque immatérielle. Le dispositif fonctionne et les fantômes apparaissent comme en apesanteur, ballottés par les mouvements de l’air. Ils forment une ronde sur Daphnis et Chloé de Ravel, se croisent, se rassemblent, semblent nous partager leurs états d’âme mais savent aussi être drôles. Extrait de la bande-son des Sept Samouraïs, clin d’œil à la chorégraphie du Boléro de Béjart, la première partie mêle l’humour au fantastique. En seconde partie , les draps tombent. Les danseurs reprennent la première partie, vêtus de tuniques et collants noirs. Dépouillée de sa dimension fantastique, cette seconde partie peut laisser le spectateur sur sa faim.

Pillowgraphies, danses pour sept fantômes et lumière noire, de Sarah Crépin et Etienne Cuppens, avec les danseurs de la compagnie La Bazooka, du 3 au 21 juillet à la Scierie, 15 Bd Saint-Lazare

Pillowgraphies © R Legrand

Sous-tension de Laurent Reunbrouck

Comment naissent puis évoluent les tensions au sein d’un groupe ? C’est la question que le chorégraphe Laurent Reunbrouck a souhaité explorer ici. Organisé en huit tableaux rassemblant dix danseurs, Sous-tension nous montre tous les stades de cet état, du stress quotidien, familier des citadins, à la paranoïa et à la violence puis développe les échappatoires possibles, individuelles ou collectives. La chorégraphie, nourrie de hip-hop et de krump, offre des moments explosifs, comme si les corps étaient parcourus par un courant électrique. La danse sait aussi se faire apaisée, pour souligner les contrastes, comme dans un solo avec un voile qui semble matérialiser le repli sur soi salutaire dans bien des situations hostiles. Pièce originale qui gagnerait à se déployer sur une scène plus grande,  Sous-tension donne envie de suivre le travail de Laurent Reunbrouck.

Sous-tension de Laurent Reunbrouck, avec les danseurs de la compagnie DTS, du 6 au 21 juillet au Théâtre Golovine, 1 Bis Rue Sainte-Catherine

Sous Tension © Compagnie DTS

U sognu di a terra de Fanny Alfonsi

Les nouvelles technologies envahissent notre vie quotidienne et nombre d’artistes questionnent leur impact sur nos vies. Spectacle qui mêle théâtre en français et en corse et danse, U Sognu di a terra questionne l’évolution du monde actuel, du numérique auquel on ne peut échapper, au changement climatique. La danse, mélange d’influences néo-classiques et contemporaines,  illustre les propos repris à partir d’échanges entre les artistes et le public scolaire qu’ils côtoient durant l’année. Certaines répliques font sourire mais le spectacle dégage une véritable poésie qui fait la part belle à la nature, très présente que ce soit par le texte ou dans la danse, organique et fluide.

U sognu di a terra de Fanny Alfonsi, compagnie le Cygne noir, avec J-B. Alfonsi, P-M. de Peretti et G Lemoine, du 3 au 21 juillet à l’espace Alya, 31 Bis Rue Guillaume Puy.

U sognu di a terra © Le cygne noir

Amis ! Amis ?  D’après Amicissimi de Luigi Pirandello, mis en scène par Lucia Pozzi

La pièce Amis ! Amis ? est une adaptation de la nouvelle Amicissimi de Luigi Pirandello qui questionne une fois de plus la part de théâtre qui existe dans chaque personne. Ici, une femme de la bourgeoisie se fait interpeller, dans la rue, par un individu qui s’adresse à elle comme s’il était son meilleur ami. Elle ne le reconnait pas mais sa bonne éducation l’oblige à l’inviter chez elle sans trop pouvoir le questionner. La mise en scène efficace permet de garder le mystère de la situation : Sommes-nous face à un escroc ou bien Donna Luigia qui vit seule, commence-t-elle à perdre la tête ? Mystère. Mettre en scène Pirandello, au début, est un clin d’œil à sa pièce majeure Six personnages en quête d’auteur.  Amis ! Amis ?  est un excellent moment de théâtre, impeccablement mené par Lucia Pozzi, Hervé Belmontet et Emmanuel Baillet.

Amis ! Amis ?  mis en scène de Lucia Pozzi, avec L Pozzi, H Belmontet et E Baillet, du 29 juin au 21 juillet au théâtre L’Optimist, 50 Rue Guillaume Puy.

Amis ! Amis ? © Cie Eureka

Que du bonheur (avec vos capteurs) de Thierry Collet

Depuis 2009, Thierry Collet prend le prétexte d’un spectacle de magie, sa discipline artistique d’origine, pour mettre en lumière des réflexions sur notre société. Ici, il fait le parallèle entre ce qu’un prestidigitateur réussissait à faire jadis grâce à son talent, et ce qui est désormais rendu techniquement faisable par un ordinateur à distance grâce à des algorithmes nourris de données récupérées par les applications que nous utilisons tous sur nos téléphones. Drôle, interactif, ce spectacle d’une heure vaut mieux qu’un long discours sur le nombre gigantesque de données que nous générons, la puissance des algorithmes et de l’intelligence artificielle. Tout en conservant la dimension divertissante du spectacle de magie, il laisse songeur sur les déclinaisons possibles de l’utilisation des données personnelles.

Que du bonheur (avec vos capteurs) de Thierry Collet avec Thierry Collet et Frédéric Lambierge, du 9 au 21 juillet à l’espace Mistral, 11 bd Raspail

Que du bonheur (avec vos capteurs) © S Gosselin


Stéphanie Nègre

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