Fabian Chappuis ressuscite Andorra avec brio
Andorra De Max Frisch, traduction d’Arman Jacob (éd. L’Arche) Mise en scène de Fabian Chappuis Avec Alban Aumard, Anne Coutureau, Romain Dutheil, Stéphanie Labbé, Hugo Malpeyre, Laurent d’Olce, Loïc Risser, Marie-Céline Tuvache, Élisabeth Ventura et Éric Wolfer Jusqu’au 14 février 2016 Du mardi au samedi à 20h, dimanche à 16h Tarifs : de 7 à 26 € Réservation en ligne Durée : 1h50 Théâtre 13/Seine M° Bibliothèque – |
Jusqu’au 14 février 2016
Un petit pays de Cocagne à la nature riante et aux auberges savoureuses, accueillant avec tout le monde et proclamant sa neutralité politique. Ça ne vous rappelle rien ? Il va pourtant s’y dérouler le lynchage le plus abject puisque dans tout paradis il faut trouver un bouc émissaire. Une fable du Suisse Max Frisch mise en scène avec brio au Théâtre 13. Un si beau pays Est-ce parce qu’il s’est inspiré du nom de la principauté d’Andorre, petit paradis coincé entre la France et l’Espagne, réputé aujourd’hui pour ses pistes de ski et ses faibles taxes, resté neutre durant la Deuxième Guerre mondiale et qui servit donc de passage et de plaque tournante à des réfugiés, Juifs, Polonais et Français résistants, puis nazis en fuite après 1945 ? Max Frisch a imaginé un pays nommé Andorra, tranquille comme la Suisse, neutre et apolitique. Andri, le fils du maître d’école, est un garçon simple et volontaire. Son père a raconté à ses propres élèves et à ses concitoyens qu’il avait sauvé Andri de la guerre, que c’était un réfugié juif, passant ainsi à leurs yeux pour un héros. Andri sait qu’il n’est pas son vrai fils, et le médecin, le menuisier et le soldat le lui font bien sentir jusqu’à faire de lui un paria, un véritable ennemi du peuple. Une fable d’aujourd’hui Le travail d’adaptation et de mise en scène de Fabian Chappuis est remarquable de clarté et de simplicité. Il a resserré le texte en le débarrassant de scènes trop longues et s’est entouré d’un excellent casting pour camper des personnages qui pourraient exister aujourd’hui. Des vidéos, contemporaines, font d’ailleurs écho à l’action de la pièce en forme de témoignages. Romain Dutheil incarne le héros, Andri, avec une étonnante finesse, une palette dramatique assez impressionnante. Autour de lui, des comédiens justes et inventifs pour camper la faune des villageois partagés entre clairvoyance et lâcheté : Laurent d’Olce incarne puissamment le père alcoolique, Élisabeth Ventura est une fiancée brisée et passionnée, Loïc Risser un prêtre très ambigu et Alban Aumard, Stéphanie Labbé, Hugo Malpeyre et Éric Wolfer les petits bourgeois manipulateurs de cette farce dramatique. Autopsie d’une haine ordinaire Ici, le théâtre joue pleinement son rôle de miroir social révélant les mécanismes haineux du rejet de l’autre, de l’exclusion de l’étranger. Andri est le réceptacle des fantasmes et des peurs des uns et des autres, qui tous lui façonnent une identité différente. Au final, c’est lui-même qui ne se retrouve plus à force d’être rejeté et réinventé. Dans une scénographie qui fait coulisser des pans de murs blanchis par l’oubli, Andorra, comédie noire, nous interpelle avec force. Hélène Kuttner [Photos © Loran Perrin et Bastien Capela] |
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