Effroyables jardins au Théâtre Le Lucernaire
Un seul homme sous les projecteurs pour une pièce aux multiples personnages. Aujourd’hui adulte et mûr, un haut fonctionnaire européen se remémore comment, étant enfant, il pouvait détester les clowns et surtout celui qui vivait chez lui, son père. Celui-ci qui lorsqu’il quittait l’habit d’instituteur pour revêtir celui d’auguste, en venait à délaisser une épouse malgré tout conciliante et un fils lui en ayant voulut pendant de nombreuses années.
Mais lorsque l’oncle de ce dernier, lui raconte un jour ordinaire comment ce père et lui sont à la fin de la Seconde Guerre mondiale rentrés dans la Résistance, comment ils ont été arrêtés puis faits prisonniers par les nazis, comment ils ont été gardés par un soldat-clown refusant de perdre son humanité, tout s’éclaire et la vision qu’il pouvait jusque là avoir de sa famille et des pitreries de son père après guerre, se trouve transformée par le récit raconté.
On vogue donc entre rires et larmes dans le souvenir d’une histoire individuelle qui n’est malheureusement, que trop universelle. En effet, en racontant la terrible histoire de cette époque à travers le prisme de l’individualité, Michel Quint parvient avec finesse à mieux cristalliser l’expérience générale, le sentiment commun.
Ne jamais oublier le passé
Les témoins vivants se faisant aujourd’hui malheureusement de plus en plus rares, chaque jour, la Mémoire de cette sombre période de l’Histoire doit être ravivée auprès de toutes les générations et si l’on se penche un peu sur la question, on constate à quel point les mots peuvent avoir plus d’impacts que tous les beaux et grands Monuments érigés… Au fond, Effroyables jardins n’est qu’une histoire parmi d’autres de cette époque tourmentée : on connaît depuis longtemps Le journal d’Anne Franck, tant de fois interprété… On connaît, grâce à la redécouverte récente par Denise Epstein du manuscrit de sa mère, Irène Némirowsky, Suite Française ; tant d’histoires parmi d’autres des années noires de l’Humanité. Grâce à tous ces livres, mais également à tous les films réalisés, à toutes les pièces jouées, l’histoire n’est apparemment pas prête d’être oubliée et nous ne pouvons que nous en réjouir et participer à ce Devoir de Mémoire.
Grâce à une mise en scène extrêmement épurée, Márcia de Castro décide avec l’adaptation d’Effroyables jardins, de concentrer l’attention du spectateur sur l’histoire de cet homme revenant sur son douloureux passé, qu’interprète André Salzet. Cela est disons-le, tout à son honneur car nul besoin d’artifices ou de décor grandiose pour raconter une telle histoire.
Rendez vous donc au Lucernaire pour voir Effroyables jardins. Et, même si au début de la représentation, le jeu d’André Salzet pourrait quelque peu vous ennuyer du fait de quelques longueurs, vous ne pourrez que vous réjouir de constater comme la deuxième partie est bien meilleure et vous touchera. En vous rappelant qu’il est indispensable pour le présent et l’avenir, de ne jamais oublier le passé.
Jonathan Hoenig
Effroyables jardins
Texte : Michel Quint.
Mise en scène : Márcia de Castro.
Acteur : André Slazet.
Du 25 novembre 2009 au 24 janvier 2010
Du mardi au samedi à 18h30 et à 15h le dimanche (relâches le 25 décembre 2009 et les 1er et 22 janvier 2010)
Durée : 1h20.
Tarif plein : 22 euros.
Tarif réduit : 15 euros (étudiant ; moins 26 ans ; chômeurs ; plus de 60 ans ), scolaires ; 10 euros.
Théâtre du Lucernaire
53, rue Notre-Dame-des-Champs, Paris, VIe.
M° Notre Dame des Champs, Vavin
Réservations : 01 45 44 57 34
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