Du Vietnam au cirque, du village à la ville… (à la Villette)
A O Lang Pho Mise en scène de Tuan Le Avec 16 acrobates et 4 musiciens vietnamiens Jusqu’au 17 avril 2016 Du mardi au samedi à 20h Dans le cadre du festival 100 % Réservation en ligne Durée : 1h10 Espace Chapiteaux de la Villette M° Porte de la Villette |
Jusqu’au 17 avril 2016 “Lang, c’est le village. Pho, c’est la ville”, explique Tuan Le, le directeur artistique, jongleur et ancien membre du Cirque du Soleil. Et en effet, avec A O Lang Pho, on traverse le Vietnam, de la campagne à Saigon. Le panier tressé, en forme de calebasse, est un élément important dans la manière de vivre traditionnelle. “On l’utilise pour la pêche”, explique Tuan Le. C’est pourquoi il est si énorme que la contorsionniste peut presque y disparaître. Mais ce n‘était pas son dessein. Le panier couvrant son buste et son ventre, elle se transforme en puce ou grenouille, capable de sauter à quatre pattes, le dos courbé. On traverse le Vietnam, de ses ports, lacs, fleuves, chantiers ou ports d’un autre temps en direction de ses motos, autobus, embouteillages, cours de gym, immeubles et danseurs hip-hop. Le miracle de cet A O Lang Pho est qu’il réussit à éviter tous les pièges. Ni nostalgique, ni carte postale de clichés touristiques, ni conceptualisation occidentale. Tuan Le, qui assure la mise en scène, s’est installé à Berlin à l’âge de 13 ans. Des cabarets berlinois il est passé au Cirque du Soleil avant de proposer aux institutions françaises le projet d’un cirque contemporain nourri du quotidien vietnamien.
Ce spectacle-là est-il vraiment du cirque vietnamien ? Les tableaux sont si riches en inventions acrobatiques, chorégraphiques et visuelles qu’on oublie assez vite qu’on est venu voir un spectacle de “cirque”. Et surtout, les bâtons de bambou et les paniers tressés ne peuvent-ils pas aussi bien nous parler de l’Égypte des pharaons ou de l’Amazonie ? Le lien universel à la nature et au quotidien des humains dépasse le seul Vietnam. De loin… Le premier spectacle signé Tuan Le, intitulé Lâng Tôi, a tourné pendant des années, en France et dans le monde. Il utilisait les bambous comme élément scénographique principal. Ces longs tuyaux légers mais incroyablement résistants sont toujours présents, pour devenir agrès, planchers, barres, voiliers, matériau de construction sur un chantier… Mais ils ont trouvé un contrepoint circulaire, les paniers, roues, cerceaux ou plateaux devenant des frisbees. Les corps des 16 acrobates leur donnent la réplique plastique, et tout se marie dans des créations très arts plastiques. Mais toujours, les formes et constellations surgissent de façon naturelle. C’est truffé d’effets de surprise, sans effets de manche. Sans crier gare, l’agitation la plus vive se transforme en respiration silencieuse. Les plateaux volants passent sous les jambes d’une lignée de convives qui sautent en l’air comme on fait la ola dans un stade de foot. Mais, ici, tout va tellement plus vite ! Visuellement, plastiquement, acrobatiquement, A O Lang Pho est inénarrable. Mais sur le fond, on ne nous parle que du quotidien, de la vie des puces, grenouilles ou autres tortues aux disputes entre voisins dans une métropole agitée d’aujourd’hui, en passant par les pêcheurs d’autrefois. Le vocabulaire de la breakdance pointe son nez, mais, côté musique, on reste avec les airs mélodieux du Cai Luong, théâtre chanté et dansé vietnamien. Bien sûr que c’est là un spectacle consensuel. Mais si c’est le résultat d’une telle richesse humaine, artistique et technique… Thomas Hahn [Photos © Nguyen The Duong] |
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