Dominique Dimey : chanson, filiation et émotion au Théâtre Essaïon
Dans “Bernard Dimey père et fille, une incroyable rencontre” Dominique Dimey raconte en chansons sa découverte émouvante d’un père qu’elle ne connaissait pas.
Jeune fille venue de Châteauroux, élevée par une mère célibataire qui ne lui a jamais parlé de son père, Dominique Dimey s’installe dans une chambre de bonne à Montmartre afin de suivre les cours de Jean-Laurent Cochet. Dans les bars et les petits restos de son quartier, elle y croise à de nombreuses reprises un quinquagénaire barbu, peu soucieux de sa personne, qu’elle prend pour un artiste peintre. C’est une affiche de concert qui lui révèle qu’il s’agit en fait d’un auteur interprète qu’elle salue à la fin d’un récital qu’il vient de donner salle Pleyel. L’artiste s’intéresse à la jeune fille blonde venue le féliciter et lui apprendre qu’ils sont voisins. Le courant passe. Les confidences faites autour d’un verre ou d’un bon repas en compagnie des acolytes du poète vont amener rapidement Dominique Dimey à entendre cette phrase qui provoquera chez elle le choc que l’on peut imaginer et qui sera confirmée par sa mère “C’est con, mais je crois que je pourrais être ton père !”. Après les quelques semaines nécessaires pour digérer cette révélation, Dominique Dimey continuera à le fréquenter durant les quelques années qui lui restent à vivre.
La notoriété est parfaitement injuste avec les auteurs de chansons. Ceux qui rendent célèbres ceux qui les chantent sont toujours restés désespérément dans l’ombre. Qui sait que Syracuse chantée par Henri Salvador (un autre artiste ayant eu des difficultés avec sa filiation !) est signée Bernard Dimey ? Le poète écrivait de superbes alexandrins avec une facilité déconcertante et ses textes poignants et poétiques ont été choisis par les plus grands parmi lesquels Charles Aznavour, Serge Reggiani, Zizi Jeanmaire, Juliette Greco, Les Frères Jacques ou Yves Montand. Dominique Dimey retrace cette rencontre qui va marquer sa vie avec ce père inconnu, vivant à Montmartre, à deux pas du métro Pigalle, en artiste digne du XIXe siècle, tout entier centré sur son art et ses amis. Son hédonisme, marqué par un goût prononcé pour le tabac, la boisson et le bonne chère, sera responsable d’une vie écourtée puisqu’il meurt alors qu’il allait avoir cinquante ans en 1981 mais après les quelques années de bonheur apportées par sa fille retrouvée.
Avec la finesse et la générosité qu’on lui connait (bon sang ne saurait mentir, l’artiste engagée a mis ses albums au service des combats en faveur de la protection de l’enfance et de la planète) Dominique Dimey vient porter témoignage de qui fut son père, ce bon vivant à la personnalité désintéressée dilapidant tout ce qu’il gagnait au profit de ses amis plus nécessiteux que lui et inspiré par les thèmes de la nuit, du temps qui passe ou de l’enfance perdue. Elle le fait avec les chansons du poète auquel Richard Bohringer prête sa belle voix grave, accompagnée au piano par Charles Tois ou à l’accordéon par Laurent Derache, dans une mise en scène de Bruno Laurent.
Bernard Dimey père et fille au Théâtre Essaïon, met en avant l’un de nos plus grands paroliers et une chanteuse terriblement attachante. Impossible par ces temps de froidure d’ignorer ce spectacle qui nous fait chaud au cœur !
Philippe Escalier
Articles liés
Découvrez le seul-en-scène “Florence 1990” à La Petite Croisée des Chemins
18 novembre 1990. Florence Arthaud arrive dans le port de Pointe-à-Pitre à la barre de son trimaran et remporte la Route du Rhum, première femme à s’imposer dans une course en solitaire. Adolescent, je suis alors fasciné par cette...
Bananagun dévoile leur nouveau single “With the Night” extrait de leur nouvel album à paraître
Bananagun, originaire de Melbourne, partage “With the Night”, extrait de leur deuxième album “Why is the Colour of the Sky ?”, dont la sortie est prévue le 8 novembre via Full Time Hobby. Ce single au piano reflète le...
“Nadia Léger. Une femme d’avant-garde” au Musée Maillol : une exposition à ne pas manquer !
Nadia Khodossievitch-Léger (1904-1982) a été une figure de l’art du XXe siècle. À travers plus de 150 œuvres, la rétrospective Nadia Léger. Une femme d’avant-garde retrace le parcours largement méconnu de cette femme d’exception, tout à la fois peintre prolifique, éditrice...