Des fleurs pour Algernon – Studio des Champs-Elysées

Nous nous trouvons dans une sorte de laboratoire. Le cobaye n’est pas la souris mais un homme, Charlie. Ce dernier est l’archétype même de l’imbécile heureux. Doté d’un QI minuscule, il nettoyait les toilettes dans une entreprise et était la risée de tout le monde, sans jamais s’en rendre compte. Il avait des « amis » au boulot sans savoir qu’ils se moquaient de lui. Il savait qu’il était loin d’être une flèche et donc ne s’étonna point lorsque la souris Algernon le battit à plates coutures à chaque test effectué par des chirurgiens à la Frankenstein qui avaient décidé d’expérimenter une opération du cerveau pour le rendre intelligent. Lui, il était d’accord pour cette intervention parce qu’il allait enfin pouvoir apprendre plein de choses… comme Algernon opérée avant lui. De fait, une fois charcuté, il est devenu plus que brillant, un génie même, auquel les sommités du monde entier ont fait appel pour résoudre une foule de problèmes. Las, Algernon déclina peu à peu pour ne redevenir que la petite souris qu’elle était… et mourir. Le même sort lui sera-t-il réservé ?

Adaptation par Gérald Sibleyras d’un grand classique de science fiction éponyme signé Daniel Keyes, ce texte est dit par Grégory Gadebois. Je devrais dire « est vécu par ». Certes le comédien raconte une histoire mais de telle manière que, si on ne le connaît pas, on peut aisément penser que l’interprète est lui-même un handicapé mental. Peu à peu, subtilement, le jeu et la diction de Grégory Gadebois se transforment. Il devient le génial intellectuel de l’histoire. Entre temps, et après, il nous aura intensément fait ressentir tous les caps par lesquels son personnage est passé. Disons-le carrément, Gadebois — Pensionnaire de la Comédie-Française de 2006 à 2012, César du meilleur acteur pour Angèle et Tony en 2012 — est stupéfiant ! C’est en grande partie grâce à lui que ce monologue vit, vibre et résonne en nous. Je vous le promets, même les plus réfractaires à la SF seront tenus en haleine par ce qui est avant tout l’histoire d’un homme, voire si l’on extrapole, celle des peuples.

Le comédien nous fait entrer en totale empathie avec son personnage, si attendrissant. Un homme d’abord obscur et dont l’esprit s’éveille jusqu’à des sommets rarement atteints. Une révolution à tous points de vue car quand on accède à la connaissance, on découvre ce que l’on n’avait pas, avant. Notre Charlie, jusque là bien au chaud de son ignorance va soudain découvrir la réalité de sa pauvre vie d’avant. Il se rendra compte qu’il n’était alors qu’un laissé pour compte, sujet de railleries et non aimé. Pourtant, il n’en veut à personne et revient vers ses « amis »…. à qui, maintenant, il fait carrément peur. De rejet en rejet, il trouvera sa place dans les hautes sphères intellectuelles… et découvrira l’Amour… pendant un temps seulement, la décadence étant, selon l’auteur, inéluctable.

Parsemé de pépites d’humour, ce texte fort à l’écriture précise est appuyé par la mise en scène intelligente d’Anne Kessler. D’aspect statique, elle nous remue autant que le reste. Une très belle réflexion sur la vie et sur les choix que nous pouvons faire !

Caroline Fabre

Des fleurs pour Algernon 

De David Keyes

Adaptation de Gérald Sibleyras
Mise en scène d’Anne Kessler de la Comédie-Française

Avec Grégory Gadebois

Scénographie : Guy Zilberstein // Lumières : Arnaud Jung // Son : Michel Winogradoff

Du 15 septembre au 31 décembre 2012
Du mardi au samedi à 20h30
Le dimanche à 16h

Réservation par tél. : 01.53.23.99.19 & Résathéâtre : 0892.707.705 (0,34 €/mn) (location ouverte du lundi au samedi de 11à 19h et le dimanche de 11h à 15h30)

Tarif : 29 €

Opération « Premiers aux Premières » (-50%) du 15 au 23 septembre 2012 inclus.
Jeunes -26 ans : 10 €. Du mardi au jeudi selon disponibilités à partir d’1 heure avant le début de la représentation

Studio des Champs-Elysées
15, avenue Montaigne 
75016 Paris
M° Alma Marceau 

www.comediedeschampselysees.com 

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[Photo : Artcomar]