« Dernier Carton » d’Olivier Balu au Théâtre de l’Opprimé
Dernier Carton Écrit et mis en scène par Olivier Balu Avec Patrice Laffont et Michaël Msihid Du 7 au 10 décembre 2016 Théâtre de l’Opprimé |
Du 07 au 10 décembre 2016 Le jeune auteur Olivier Balu vient de présenter sa nouvelle pièce au Théâtre de l’Opprimé. Une fable sociale et intense servie par un duo d’acteur talentueux : Patrice Laffont et Michaël Msihid. Après une rupture douloureuse, Richard (Patrice Laffont) a décidé de quitter son appartement parisien pour une vie plus retirée. Face à lui, le déménageur, Oussama (Michaël Mshid). Qui est-il ? Que sait-il ? Pourquoi refuse-t-il de partir ? Entre ces deux hommes aux abois la peur couve comme l’orage qui gronde, puis éclate, et soudain plus rien n’est comme avant. Dans l’intimité de la petite salle du Théâtre de l’Opprimé, sur une scène dépouillée, deux hommes s’affrontent. C’est un affrontement à tous les niveaux, social – l’un est déménageur, l’autre une star de la télé – idéologique, culturel, physique, poétique. C’est une pièce sur le mensonge, la folie, le bluff, qui renverse continuellement les rapports de force. Tour à tour, les deux hommes se soumettent ou prennent le pouvoir, grâce à une habile construction dramatique, implacable comme dans un drame classique en trois actes. Un duo électrique Olivier Balu et sa compagnie du Lapin Vert avaient déjà été remarqués pour son humour burlesque dans Supermoi. Dans cette nouvelle pièce, l’auteur livre une vision singulière de la société, entre un jeune musulman poète et menteur, et un septuagénaire en passe de devenir neurasthénique. Olivier Balu brouille les frontières et se joue des codes. Il ballade le spectateur entre le malaise – accentué par le judicieux choix de musique – et des envolées de rire. Il gagne en violence, en intensité. En matière de mise en scène, Dernier Carton est d’une sobriété exemplaire. L’intrigue évolue autour de deux accessoires fondamentaux : un escabeau et un carton. L’escabeau est un personnage à part entière, tant il bouge et évolue sur la scène. Et le dernier carton posé au sol, que le déménageur s’obstine à ne pas récupérer, contient des objets divers (sac de farine, scotch, multiprises crasseuses…). Chaque objet, aussi insignifiant soit-il, raconte une histoire et fait sens. Une forme d’arte povera transposé au décor de théâtre. Le jeu des deux acteurs est aussi remarquable : dans une ronde incessante, chacun ne cesse de réécrire sa propre histoire, avec des dialogues savoureux. Patrice Laffont – pour qui Olivier Balu a écrit cette pièce sur mesure – et Michaël Msihid s’en donnent à cœur joie. La question est posée : sont-ce deux « nazes » ou deux génies ? Richard et Oussama ne trouveront la paix que dans leur amour commun des mots. La pièce achevée, on pense à Roland Barthes qui désignait « Cette tricherie salutaire, cette esquive, ce leurre magnifique, qui permet d’entendre la langue hors-pouvoir, dans la splendeur d’une révolution permanente du langage, je l’appelle pour ma part : littérature ». Justement, cette littérature, sous la forme d’un manuscrit inachevé au fond d’un tiroir, clôture la pièce dans un esprit libertaire. Ainsi, Dernier Carton invite à réfléchir sur les différentes formes de discours : trompeur, poétique, violent, rassembleur. C’est divertissant, tendre et brillant. Voilà pourquoi nous espérons voir bientôt cette pièce remontée dans d’autres salles de théâtre. Léopold Gautier
[Crédits Photo © Mathias Kellermann] |
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