“Danse élargie”, l’élasticité maximale
Danse élargie Paula Rosolen Du 2 au 5, du 10 au 13 et du 16 au 19 septembre 2015 Théâtre des Abbesses M° Abbesses |
Du 2 au 19 septembre 2015 “Danse élargie” n’est pas une nouvelle discipline. Juste le titre d’un concours qui se déroule, tous les deux ans, au Théâtre de la Ville. Mais c’est en juin. Début septembre, en ouverture de saison, les portes parisiennes s’ouvrent de nouveau, pour trois compagnies lauréates. Chacune peut alors présenter une version complète et définitive de la forme brève créée pour “Danse élargie”. Et il arrive que le jury ait du nez. Noé Soulier, primé en 2010, à la première édition donc, quand personne ne le connaissait encore, est aujourd’hui le chorégraphe phare de la dernière génération française. Curieusement, ce n’est pas de lui qu’on peut dire qu’il élargit la danse, en y introduisant d’autres techniques. Au contraire, il l’approfondit par une analyse rigoureuse et pourtant jouissive. En 2014, à la troisième édition, il a fait partie du jury. Tout commence là, par ailleurs. À “Danse élargie”, jury élargi, élargi dans le sens où l’illustre cercle n’est composé qu’à moitié de chorégraphes. Aussi y avait-il, parmi ceux qui ont choisi les lauréats 2014, un plasticien taïwanais, un percussionniste et un homme de théâtre de réputation mondiale. Non, pas Bob Wilson, mais Thomas Ostermeier, le Berlinois. [embedyt] https://www.youtube.com/watch?v=B8ruixIpj5g[/embedyt] Aerobics! Un ballet en 3 actes de Paula Rosolen En revanche, si le premier prix 2014 est allé à Aerobics! de Paula Rosolen, il n’est que trop évident que le charme discret de Noé Soulier a opéré pleinement. Le cheval de bataille de cette jeune chorégraphe allemande est le même que celui de Soulier : analyser, déconstruire et recomposer un vocabulaire, avec une attention aussi affectueuse qu’analytique pour chaque mouvement ainsi que pour le langage construit par l’ensemble de l’univers en question. L’aérobic élargie de Rosolen, déclinée en un “ballet en trois actes” aux sept interprètes drôlement élastiques, est à la danse ce que serait une composition répétitive de Phil Glass s’il voulait bien permettre à Stromae de la revisiter. Mais Rosolen aurait pu créer un dessin animé, une installation ou du cirque basés sur l’aérobic, peu importe ! C’est “Danse élargie”, et la liberté est totale. Au concours, toutes les disciplines sont admises, et ce qu’on y voit est aussi transdisciplinaire que la composition du jury. Ne ratez donc pas la prochaine édition, à pressentir pour juin 2016, sur trois jours au Théâtre de la Ville, à l’entrée gratuite. On ne saurait dire ce qui est plus difficile : gagner un concours sur l’énorme plateau du Théâtre de la Ville ou assurer seul une soirée au Théâtre des Abbesses. C’est dans la salle située à Montmartre que les lauréats du passé se voient offrir une chance de rencontrer le public et d’affronter son regard quand celui-ci ne se concentre que sur eux. Quand une pièce est basée sur une discipline sportive, ça marche toujours au concours. Le concept danse & sport est drôlement surreprésenté chez les gagnants des deux dernières éditions. TYJ d’Alina Bilokon & Léa Rault Troisième prix et (!) Prix du public (!!) en 2014 : TYJ, un concert chorégraphique loufoque et énigmatique, frôlant l’absurde, où le guitariste Jérémy Rouault accompagne les danseuses-chorégraphes Alina Bilokon et Léa Rault à travers ses propres compositions. J’y arrive pas de Brice Bernier Après, il peut arriver que le jury, dans ses considérations artistiques, ne tienne pas compte des disponibilités des artistes pour une ouverture de saison à Paris. Aussi, la conférence-spectacle totalement loufoque What you need to know de l’Américain Davis Freeman, deuxième prix 2014, ne revient pas. Ce qui ouvre encore une opportunité à Brice Bernier, lauréat en 2010 avec sa pièce Insolents solistes pour le collectif hip-hop KLP, de présenter une nouvelle création. Ce sera sa troisième apparition grâce à “Danse élargie” et sa première en solo à laquelle il donne un titre très courageux : J’y arrive pas. Ça sent l’autodérision et, en effet, il choisit un sujet qui suggère une certaine drôlerie, puisqu’il s’agit de notre rapport, malin mais maladif et maladroit, aux smartphones et autres interfaces qui font de tout utilisateur un technicien de surface. Thomas Hahn [Photos © Laurent Philippe / Sofian Jouini] |
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