Cyrano de Bergerac
Cyrano de Bergerac qui se joue au Théâtre du Châtelet est adapté de la pièce d’Edmond Rostand, à l’initiative d’Henri Cain qui en signe le livret. Franco Alfano met en musique le plus célèbre personnage de la littérature française. Cet opéra méconnu écrit dans les années 30 se joue totalement en français conformément aux souhaits d’Alfano. Est-il nécessaire de réécrire Cyrano? Certains diront que non! Mais ce sont ceux qui n’auront jamais eu l’occasion de voir jouer cet opéra. Le personnage de Cyrano transcende les époques, il est le symbole de notre temps, il est la lueur d’espoir de ce siècle de « fashisme » dans lequel nous vivons. Henri Cain propose une excellente réduction de l’œuvre de Rostand, elle est à la fois très respectueuse et elle préserve l’essentiel de tous les grands moments de la pièce ainsi que ses célèbres tirades.
Le Théâtre du Châtelet offre un cadre magnifique à Petrika Ionesco pour y mettre en scène l’opéra d’Alfano dont les influences sont clairement debussiennes. La mise en scène est certes classique mais n’en n’est pas moins efficace, l’ennui ne gagne jamais le spectateur qui sort bouche bée après chaque tableau.
Des décors somptueux, magistraux, qui soulignent avec intelligence le propos de l’auteur. Il est certains que la sobriété n’est pas de mise, mais c’est pour le plus grand plaisir du public qui regarde comme un enfant la majesté d’une scène qui irradie les pupilles.
Les acteurs offrent un jeu généreux plein d’émotion, de justesse et de panache faisant vibrer un public transi par un personnage de légende. Le point d’orgue de cette pièce est sans nul doute la scène du balcon à la fin de l’acte II, le public est alors transporté au centre de cette histoire d’amour grâce à une mise en scène talentueuse et à un Placido Domingo au sommet de son art. Placido Domingo propose un jeu subtil et extrêmement crédible, capable à la fois d’interpréter un Cyrano plein d’espoir et de naïveté, un Cyrano conquérant et meneur ainsi qu’un Cyrano courtisan et alangui prêt à se sacrifier par amour. Le célèbre ténor emporte la salle dans une émotion tourbillonnante que lui seul peut transmettre. Toutefois la scène finale n’est pas à la hauteur des attentes de l’auditoire qui ne ressent pas le florilège d’émotion que l’œuvre originale de Rostand procure, une nuance qui ne gâche en rien le plaisir de l’audience qui reste ébahi par une représentation surprenante. Les interprètes de Roxane et de Christian sont tout aussi convaincants, Roxane s’impose par sa sincérité, naturellement douée pour enflammer et affoler la scène grâce à sa présence unique, l’excellente Nathalie Manfrino électrise la salle, pendant que Samir Pirgu (Christian) joue à la perfection le jeune homme candide qui conquit le cœur de Roxane.
Intelligence, talent et expérience sont les maîtres mots de ce show qui émerveille les spectateurs pendant presque trois heures.
François SLAMA
Cyrano de Bergerac de Franco Alfano (1875-1954)
Au Théâtre du Châtelet, à Paris, jusqu’au 31 mai.
Rens et loc : 01 40 28 28 40 et sur le site du Châtelet
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