Culottée, Noémie de Lattre !
Comment rester féministe en porte-jarretelle ! Chaque dimanche et lundi, Noémie de Lattre clame haut et fort son féminisme sans rien sacrifier de sa féminité. Un show bouillant, entre cabaret et tribune, stand-up et confession. C’est désopilant et pertinent. Courrez-y !
Nommée pour le Molière du seul en scène 2020, cette comédienne pétillante remporte un franc succès à la Pépinière. Il faut dire que son one woman show est une réussite totale.
Interprétation sincère et complice
Noémie de Lattre se targue de signer le « premier manifeste féministe pop ». Elle peut être fière, car elle rend le féminisme non seulement accessible, mais agréable. On peut même dire fréquentable. Elle, pour qui ce mot était synonyme de « vieilles filles aigries à aisselles velues », raconte comment elle en est arrivée là, et « comment ça va vous arriver à vous aussi », car elle n’a de cesse de vouloir vous acquérir à sa cause : « une cause de merde », aux yeux de beaucoup, regrette-t-elle, « pourtant, ce n’est pas une maladie vénérienne ». Noémie de Lattre pique, tacle, elle ne caresse pas dans le sens du poil. D’ailleurs, elle parle beaucoup d’épilation et de barbe !
Elle s’évertue à réhabiliter cette noble cause, donc, car elle est convaincue de sa nécessité depuis longtemps, elle qui à 5 ans, humiliée par une professeure de danse classique, a compris que « si les petites filles sages vont au paradis, les autres vont… où elles veulent ».
Libre, insoumise et rebelle
Avec ses décolletés plongeants et ses talons vertigineux, Noémie de Lattre sait où elle va. Elle lutte de façon originale contre les stéréotypes, dénonce sexisme ordinaire, discriminations et violences, sans épargner les « cruchasses », ni oublier de séduire les hommes du premier rang.
Elle aborde tous les grands thèmes avec une simplicité désarmante. Entre la grotte préhistorique et Loana, en passant par la Vierge Marie, elle revisite l’Histoire, à l’aune du patriarcat : « Réinventons nos propres modèles ! ». Elle parle de carrière, de famille, de quotidien, bref de la charge mentale, ou encore de rap et de publicité. Et beaucoup de sexe !
En somme, de tout et de rien, donc de l’essentiel : « Le plaisir féminin, tout le monde s’en fout, parce qu’il n’est pas nécessaire à la reproduction ». Mais sa leçon d’anatomie vaut à elle seule le détour : allez-y, vous en apprendrez de belles sur le « matos » ! Car Noémie de Lattre est loin d’être un « monstre frigide ».
Culottée, elle fait voler les tabous en éclat, abordant la question des règles de façon décomplexée, comme celles de grammaire, avec dérision : « Ah ! Cette langue française où le masculin l’emporte sur le féminin… Une femme au foyer est une ménagère et un homme, un nouveau père, ce héros des temps modernes. Certains métiers n’ont pas leur équivalent : pour auteur, mon correcteur automatique m’indique autruche et pour metteur en scène, menteuse en scène. Cherchez l’erreur ! ».
Mise en scène dynamique
Le spectacle est bien rythmé, ponctué de danses sensuelles et de séquences plus émouvantes. La dernière rend un hommage poignant à toutes celles, ici et ailleurs, qui peinent, qui souffrent, voire qui meurent sous les coups.
Présence flamboyante, plume acérée, mise en scène parfaite… ce spectacle est réjouissant. Noémie de Lattre le dit sans détour : « Je suis là pour la cause et pour être aimée ». Alors, oui, on aime nana-là. Et quand la salle se lève pour la standing ovation, elle pleure de joie : « Merci, vous êtes prêts pour la révolution ». Y compris les hommes ! Elle a d’ailleurs écrit son spectacle en pensant à eux (d’où le titre) et croit en l’émergence d’une « espèce en voie d’apparition : l’homme féministe », parce qu’elle considère qu’« on a tout à gagner à avancer main dans la main ».
Sarah Meneghello
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