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Clarkstrip : “Au final, ça l’a fait : ça s’est bien passé et ça m’a plu”

Naïs Boekholt 20 novembre 2020
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Crédit: Clarkstrip

Graphiste de métier, Clark s’est lancé dans le monde de la nuit il y a environ trois ans. Stripteaseur, gogo danseur, artiste sur échasses et burlesque boy, il a accepté notre invitation pour nous montrer quelques facettes de son métier atypique, encore sujet de polémiques aujourd’hui. Entre expérience à l’étranger, en France et l’arrivée du Covid, découvrez ce qu’est la vie de stripteaseur.

Peux-tu te présenter ? 

Moi c’est Clark. Je travaille dans le milieu de la nuit en tant que stripteaseur depuis à peu près 3 ans. Je touche aussi au burlesque et aux échasses. J’ai commencé par curiosité : on m’a proposé d’entrer dans ce milieu, à l’époque je n’avais pas de barrières pour faire ça car je n’étais pas en couple. Ça peut paraitre anodin mais pour certains ça peut être un problème. Donc je me suis lancé, je me suis dis on verra ce que ça donne et si ça ne me plait pas j’aurais au moins eu la chance de pouvoir essayer. Et au final, ça l’a fait : ça m’a plu et ça s’est bien passé.

Est-ce que tu as fait autre chose avant de devenir stripteaseur ?

Je suis graphiste de formation. Jusqu’à mars 2020, j’étais principalement graphiste ; c’est-à-dire que je bossais en entreprise la semaine et je gérais la partie spectacle le week-end. En septembre, j’ai décidé de me lancer en auto-entrepreneur, aussi bien en tant que graphiste et qu’artiste. Mais je ne m’attendais pas aux complications actuelles.

Quand est-ce que ton aventure a commencé ?

Tout a démarré avec un ami, il avait commencé un peu avant moi mais ne se sentait pas de continuer le chemin tout seul. Il m’a demandé si je voulais bien l’accompagner. Et un soir, sur une soirée Chippendales, l’organisateur de la soirée m’a proposé de monter sur scène avec eux.

L’été dernier, tu as travaillé dans un cabaret à Genève, et en octobre dernier, à Hambourg. Tu peux nous en dire plus ? 

À Hambourg,  j’ai pu tester le burlesque. Ce n’était pas du burlesque en tant que tel car ça restait très axé sur le striptease, il n’empêche que par rapport à ce que j’ai pu faire avant, ça m’a apporté une nouvelle façon de travailler. Le rythme est totalement différent car on est dans un seul et même lieu, pendant un mois complet, et on travaille tous les soirs. C’est différent du striptease traditionnel, où on danse dans des boites ou chez des particuliers. Dans ces cas-là, tu danses et tu rentres chez toi. Là, c’était un véritable job à temps plein.

J’ai beaucoup aimé cette expérience, car contrairement aux stripteases traditionnels où je change d’endroits et de configuration, j’étais dans un lieu fixe où je répétais les mêmes numéros. Ça permet d’améliorer le show et d’être plus attentif à certains détails. L’avantage par rapport au striptease chez des particuliers, c’est qu’on sait où on va. Normalement, on ne sait pas trop chez qui on va, on ne sait pas comment ça va se passer, et il y aura surement des choses qu’on ne pourra pas faire. En cabaret, on peut se lâcher mais je ne ferai pas ça toute l’année car c’est très répétitif. 1 mois par-ci par-là, c’est bien.

Comment est-ce que tu as vécu le premier confinement et comment ton business s’en est porté ?

Je n’ai pas pu continué à travailler. Avec un groupe de stripteaseurs et stripteaseuses, on a fait des lives sur Instagram. C’était des lives très softs qu’on faisait entre nous pour nous promouvoir. Il y a eu pas mal de répercussions financières avec des annulations de contrats. Même si on a des aides, ça ne couvre pas ce qu’on aurait gagné en évènement.

Le plus frustrant, c’est de ne pas avoir pu faire des shows et avoir dû renoncer à des expériences et des opportunités : je devais faire un Salon que je n’avais jamais fait, je devais aller travailler dans un EPHAD avec une collègue, j’étais censé faire une pièce de théâtre à Pau sur un zénith et on ne sait toujours pas si on aura l’occasion de faire nos shows. Car même revenus à la normale, je me demande où est-ce qu’on aura encore la possibilité de travailler ? On ne vit pas une année entière sous le joug d’un virus sans que ça laisse des traces.

Est-ce que c’est difficile de faire ton boulot ? Es-tu jugé, harcelé ou soumis à des contraintes ?

Des jugements pas vraiment, en tout cas pas directement. Par contre il y a souvent le côté relation sentimentale qui peut mettre des barrières. Les jugements viennent à tort et à raison : à tort parce que pour beaucoup, l’image du stripteaseur c’est l’image du chaud lapin. Et à raison car j’ai connu des femmes qui n’avaient pas de problème avec le fait que je sois stripteaseur, mais vu qu’elles ne connaissaient pas le milieu, elles ne s’attendaient pas aux contraintes que ça pourrait engendrer : ne pas être là les week-ends ou devoir partir travailler à l’autre bout de la France pendant plusieurs jours. Un travail comme ça engendre forcément des contraintes.

Au niveau du harcèlement, ça va encore parce-que je suis un garçon. C’est pire pour les filles. Qu’elles soient stripteaseuses ou pas, les filles se font facilement harceler sur les réseaux sociaux. Ça m’arrive aussi régulièrement mais comme ça reste du virtuel, je fais avec.

Selon toi, quelle place a le striptease et le cabaret en France ?

J’ai l’impression que c’est plus développé, de manière générale, ailleurs. Après je n’ai travaillé qu’en France, en Suisse et en Allemagne, mais je connais pas mal de personnes qui sont partis travailler en Angleterre, aux Etats-Unis, en Australie, au Canada ou encore au Brésil. Effectivement, ces pays sont plus développés dans ces domaines que la France. Dans la plupart de ces pays, il y a des clubs de striptease pour hommes, alors qu’en France pas du tout. Il n’y a à la rigueur que des clubs réservés à un public féminin. En Allemagne, où j’étais, il y avait carrément des clubs mixtes. En France, c’est inimaginable. J’imagine que c’est une question d’offre et de demande, peut-être aussi de mentalité. Quand on fait des soirées Chippendales, autrement dit des soirées réservées aux femmes, le succès est pourtant présent.

Qu’est-ce qui t’a donné envie de devenir burlesque boy ?

Le côté un peu plus spectaculaire, et la mise en scène. Ces deux points sont plus mis en avant que dans le striptease. Quand un public vient voir un striptease, beaucoup s’intéresse plus au physique qu’au spectacle en lui-même.

Est-ce que c’est toi qui choisi tes propres shows ?

Oui. C’est moi qui arrive avec mes numéros. On ne me demande pas de faire tel ou tel show. La seule modification à laquelle j’ai été confronté, ça a été l’inversement de deux de mes numéros à Hambourg.

Est-ce que tu penses que le marché du burlesque et du monde du cabaret est au point mort en France (à part avec les grands cabarets de Paris) ?

L’engouement autour des cabarets est beaucoup moins présent en France que dans d’autres pays. J’ai l’impression que le petit cabaret traditionnel de campagne ne fait pas rêver le public en France. Quand j’étais à Hambourg, j’ai remarqué que par rapport à beaucoup de villes en France, c’est une ville étendue. Le spectacle y est très présent : on y retrouve des théâtres, des cabarets et beaucoup de salles de spectacle dédiées aux musicals, comme Le Roi Lion, Pretty Woman ou Tina Turner. C’est assez développé par rapport à ce que je connais en France.

Propos recueillis par Naïs Boekholt

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